Une œuvre métaphysique à la narration particulièrement vélaire et au dénouement lumineux.

Il est vrai que l'on a souvent beau s'efforcer de s'éloigner des préjugés, d'essayer de vivre l'instant, de choisir de rester émerveillé par la manifestation de la vie plutôt que de se faire happer par son cycle sempiternel, mais il en reste que certaine choses nous mettent déjà la puce à l'oreille sur ce qu'il va se passer ou ce qu'elle vont être, quoi que l'on fasse. C'est le cas de ce fascinant concept de science-fiction réalisé par Jack Arnold, adapté du roman homonyme de Richard Matheson.


Le jeune âge d'une génération — à laquelle j'appartiens, par rapport à cette œuvre historique n'aura probablement pas été sans avoir eu une enfance bercée par le devenue classique Chérie, j'ai rétrécies les gosses de Joe Johnston, ni de passer à coter des fantastiques aventures d'Ant-Man dans le riche univers Marvel... ce qui pourrait donc encourager l'idée que le sujet pourrait déjà bien avoir été poncé et que la technologie contemporaine pourrait également bien avoir rendu désuète l'ingéniosité d'une mise en scène datant du siècle dernier. Le cliché a vite fait de s'immiscer même lorsque la rhétorique est aussi creuse. The Incredible Shrinking Man fait parti de ces œuvres au génie créatif que l'on ne trouve hélas plus, à l'exception de quelques faiseur.euses encore passionnés qui aime bricoler, fuyant la facilité du numérique pour fabriquer leur film.


En effet, l'œuvre d'Arnold séduit naturellement pour sa fabrication inventive menant à des angles de mise en scène à l'esthétisme artisanal cristallisant un plaisir inlassable, de la magie brute pure et simple pour les pupilles. On se gargarise même d'une distribution aux harmonies palpables à l'écran — Grant Williams, Randy Stuart et Paul Langton pour les vedettes principales, partagent une complicité romanesque, qui ne pourrait apparemment vivre de trouble que l'improbable dans un quotidien semblant accompli, ou bien dont on devrait peut-être au contraire comprendre que jamais rien n'est figé, rien n'est acquis...


À l'instar de notre personnage qui rapetissit et voit son environnement intime peu à peu devenir un espace temps dans lequel il se retrouve piégé — lui-même narrateur de sa propre histoire, il nous invite à mesure que son récit avance à être au diapason avec la réflexion philosophique qu'émane son périple vers l'infiniment petit. L'infinitésimal et l'infini sont si proches, ces deux extrémités du même concept qui se rencontrent pour former un cercle gigantesque frappe la conscience notre aventurier, hérissant alors les poils et recouvre de poésie une œuvre qui exploite à la base un pure concept de science-fiction, un ébahissement geek.


Ce film, ou cette fable pourrait t-on y voir finalement, a tout des arguments solides pour s'assurer d'un succès sans failles, à l'exception peut-être d'un titrage probablement un peu hâté — s'il n'était pas lui-même le fruit d'une adaptation littéraire, qui laisserait présager un film conceptuel, manquant certainement de profondeur. Une ritournelle qui n'aurait pas été surprenante tant le genre aime aller chercher des idées conceptuelles sur lesquelles se reposer pour narrer des histoires plus atypiques et singulières les unes que les autres... Mêlées à la magie, qu'elle soit artisanale ou numérique, peu importe le fond, si la forme de la fiction atteint son but : nous projeter dans un imaginaire, nous faire vivre des émotions, bref nous faire rêver, l'objectif est rempli. Fort heureusement ce n'est pas le cas de The Incredible Shrinking Man, même s'il aura fallu attendre les dernières minutes du long-métrage pour que le véritable joyaux noétique se révèle au spectateur. Une œuvre donc métaphysique à la narration particulièrement vélaire et au dénouement lumineux.

Flagadav
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le 3 nov. 2025

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