Le 3e film de la série de La planète des singes, Les évadés de la planète des singes, annonçait clairement dans son dénouement qu'une autre suite aurait lieu, la voici avec cette Conquête de la planète des singes. Sa position ingrate de 4e film fait de lui une des réussites les plus oubliées de la série. Il dispose pourtant de solides qualités qui lui permettent de ne pas dépareiller par rapport aux précédents " épisodes ".

Le monde a beaucoup changé depuis la venue de Cornélius et Zira dans les années 70. Maintenant une quasi-dictature policière règne et suite à la disparition des chats et des chiens (décimés par une épidémie) les hommes se sont tournés vers les singes pour en faire des animaux de compagnie. Conditionnés dès leur plus jeune âge pour obéir aux hommes, la façon dont ils sont traités est plus proche de l'esclavage qu'autre chose. César, lui, a été épargné, élevé dans le cirque d'Armando il est aussi intelligent que ses parents. Témoin de la cruauté des hommes envers les singes il ne peut se retenir de le crier en public. A cause de cela, Armando est capturé par les forces de police et forcé de se suicider, César quand à lui doit se faire passer pour un singe normal et est soumis à l'infâme conditionnement. Véritable agent double il va organiser la lutte armée des singes, seule alternative contre la cruauté des hommes.

Ce scénario en droite continuation du 3e film décrit l'un des événements les plus intéressants de la série de 5 films : Comment la planète des Hommes est devenue la planète des singes ! Scénario qui peut se lire à plusieurs niveaux tout aussi passionnant.

En premier lieu on a un approfondissement des thèmes développés dans le 3e film. Ici encore on met en exergue certains aspects discutables de notre société humaine. Le besoin quasi maladif d'avoir des animaux de compagnie sur lesquels on peut décharger son trop plein d'agressivité ou d'amour. Le conditionnement inhumain des singes (à coup de lance flamme, tout de même !) fait penser à une version hardcore des expérimentations sur les animaux. Décidément, l'air de ne pas y toucher de la saga de La Planète des singes dresse un portrait assez sombre et réaliste de notre monde.

En second lieu le film dresse un parallèle avec certains évènements historiques. Les émeutes de Watts à Los Angeles étaient clairement la référence des concepteurs du film et celui-ci prend bien en compte le climat de violence qui y régnait. Alors faut-il voir dans cette description d'un état policier une représentation de l'état US et dans la façon dont sont traités les singes une idée du traitement des minorités aux USA ? Un parallèle audacieux et particulièrement pessimiste envers la société US. Mais on peut aussi trouver dans cette histoire de fortes réminiscences de l'histoire romaine. Le traitement esclavagiste des hommes envers les singes, l'affrontement entre les " légions " de policiers face à la masse des esclaves singes... En y regardant bien La Conquête de la planète des singes a tout d'un péplum déguisé, une sorte de remake futuriste de Spartacus !

L'ensemble de ces thèmes graves fait que ce 4e volet de La Planète des Singes baigne constamment dans une ambiance sombre et dramatique. Nanti d'un très faible budget au regard de l'ambition du projet, le réalisateur Jack Lee Thompson réussit pourtant à donner corps à l'ensemble de ces idées. Il utilise pour cela intelligemment les décors, à l'architecture froide quasi " stalinienne ", et les costumes proches de ceux portés dans l'Allemagne nazie des années 30. Un design général sobre, particulièrement adapté pour dépeindre cette dictature des Hommes. Thomson réussit en plus à éviter l'écueil d'une description des personnages trop caricatural (en gros tous les hommes sont des salauds et tous les singes des victimes) grâce, entre autre, a l'assistant du gouverneur pour qui une attitude plus juste envers les singes est la solution plutôt que la répression aveugle choisie par le gouverneur.

A tous les niveaux donc cette Conquête de la Planète des Singes est une réussite et aurait pu constituer une magnifique conclusion de la saga. Malheureusement la production estima qu'un film de plus ne serait pas plus mal...
Palplathune
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le 9 oct. 2010

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Palplathune

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