La Jeune Fille à la perle par Ghadzoeux
Histoire
Griet, jeune hollandaise de lignée modeste se retrouve au service de la famille Vermeer. Sensible aux charmes de la demoiselle, le célèbre peintre s'éprend d'elle au mépris de sa femme et des bonnes moeurs de l'époque. Griet, prise entre le marteau de sa condition et l'enclume de son rôle de muse malgré elle, tente de mener à bien sa tâche tout en répondant au mieux aux aspirations de son maître.
Critique
la réussite de ce film tient en un mot : la photographie! Car oui, s'il s'agissait de nous mettre en permanence devant des tableaux vivants de Vermeer, le pari est plus que réussi. On est clairement devant un film à contempler, au même titre qu'un documentaire sur telle ou telle région du monde. L'histoire n'est ici qu'un prétexte à situations où cherche avant tout à reproduire la vie telle qu'elle était dans les années 1660 à Delft (et dans toute la Hollande), comment s'articulent les relations en les " riches " et leurs servants, comment le monde est cloisonné et comment l'amour et l'art traversent ces barrières sans embages.
Je ne suis pas un expert en peinture et encore moins dans la peinture de Vermeer, mais le réalisateur nous laisse souvent à voir des scènes figées, immobiles, qui laissent à penser que le peintre a couché sur la toile ce passage précis, ou s'il ne l'a pas fait, aurait pu le faire. Les clairs-obscurs, les couleurs chaudes, le calme et la sérennité qui émane des toiles, tout est là pour rappeler les oeuvres de Vermeer.*
En ce qui concerne les acteurs on trouve l'inévitable Scarlett Johansson de ces derniers mois. Si la séquence de fin du film nous montre l'oeuvre originale qui donne son titre au film, on prend alors conscience que la ressemblance avec l'actrice n'est pas si frappante que ça, on est tout au long du film subjugués par son charme tout en douceur. Colin Firth, qui interprète Vermeer, est correct mais sans plus, de toute façon il ne s'agit paradoxalement pas d'un film sur Vermeer en personne. À la rigueur sur la création artistique et son aveuglement, mais à ce moment-là transposable à tout autre peintre et toute autre époque.
Concernant la réalisation proprement dite, on vient bien qu'elle ne sert qu'un objectif, maintes fois énoncé au-dessus. La reconstitution de la ville Hollandaise semble quasi-parfaite, on est loin des clichés grotesques de tant de super-productions qui se veulent historiques. On a droit à des plans serrés sur les visages, riches d'une lumière jaune-orangée, caractéristique de la bougie, des plans plus larges qui sont des scènes de vie comme un repas de famille, des servantes affairées à la lessive, tout ceci intégré dans un montage qui privilégie des plans longs et le plus souvent fixes. Filmé quasiment exclusivement en milieu urbain, seules deux petites scènes montrant l'idylle de Griet avec un apprenti boucher (partie anodine et anecdotique du film à mon avis, bien que servant à faire un parallèle entre les 2 mondes dans lesquels évolue Griet) sont tournées en pleine nature et là encore le côté " toile d'époque " est très marqué visuellement.
Pour conclure, on pourait croire qu'il s'agit a priori d'un film à la gloire de Vermeer, ou au mieux une biographie partielle mais il n'en est rien (il faudra plutôt loucher du côté de Pollock de et avec Ed Harris pour ce genre de film). Il s'agit plutôt à mes yeux à la fois d'un documentaire historique qui s'ignore et d'un magnifique plébiscite pour la création artistique et l'abnégation qu'elle exige. Alors ce sera 7/10 car malgré tout il reste des longueurs et ce film pourra déplaire aux gens allergiques aux musées, car on a vraiment cette impression de visiter un musée dédié aux oeuvres baroques flamandes.