Si « La jument verte » garde l’essentiel du texte de Marcel Aymé, il s’en éloigne par la méchanceté voulue par le réalisateur. Cette rupture dans l’unité de ton très caractéristique de l’écrivain entraîne une mise en scène inégale et crée des ruptures de rythme qui dans les quelques rares moments de relâchements font tomber tension et attention, flirtant dangereusement avec l’ennui. Tant et si bien que les efforts des premiers, tous excellents, de Bourvil, Francis Blanche, Yves Robert, Sandra Millo, Marie Déa à Valérie Lagrange (dont c’est le premier rôle important au cinéma) finissent par être braillards et fatiguant. De plus, malgré les efforts dans les décors (beau travail de Max Douy), la photographie de Jacques Natteau n’arrive pas toujours à compenser les moments de défaillance dans la réalisation. C’est dommage car beaucoup de scènes sont réussies, comme, par exemple, la réconciliation des deux frères entourant à table le facteur ou la rencontre avec le Maire mourant (Carette excellent) ou encore la tendre scène de la grange entre papa et sa fille préférée et quelques autres, saupoudrées ci et là de bons mots. Et les filles jeunes ou moins jeunes, sont filmées en mettant en avant leur sensualité. En 1959 le film connut quelques tracas avec la censure et écopa de quelques coupes et d’une interdiction au moins de dix huit ans. De nos jours cela ferait sourire.