Le cinéma de genre horrifique a essayé de sortir la tête de l’eau dans la deuxième moitié des années 2000 et au début des années 2010 comme j’en parlais sur ma chronique de A L’Intérieur de Julien Maury et Alexandre Bustillo. Franck Richard a essayé de s’engouffrer dans la brèche en tentant de profiter de cette nouvelle hype avec un premier long métrage portant le nom de La Meute. Avec son casting intriguant, son ambiance craspec rappelant les films de rednecks américains à tendance Massacre à la Tronçonneuse, et cette volonté de vouloir sortir des sentiers battus du cinéma français, la promesse sur le papier était belle. L’exécution est toute autre et les critiques, aussi bien du public que des professionnels du cinéma, n’ont pas été tendres. Sur Allocine, la presse lui donne un timide 2.1/5 sur 17 critiques, cela sera un 1.4/5 pour les spectateurs sur plus de 760 notes. Sur Senscritique, ils sont plus tendres avec un 4.4/10 de moyenne sur plus de 1100 notes. Bref, La Meute est un bien beau plantage, raté sur bien des points même si tout n’est pas à jeter.


Dès le départ, on sent que Franck Richard a envie de bien faire les choses. L’ambiance est sordide, froide, humide. Les couleurs sont très ternes, presque délavées, les décors sont déglingos, crados, à la limite du post apo. On ressent très vite qu’il va miser sur l’atmosphère de son film, sur sa direction artistique. La photographie, bien que trop sombre parfois, a vraiment de la gueule et certains plans pourraient faire de très beaux tableaux. Franck Richard semble clairement marqué par le cinéma horrifique 70’s et va essayer de retranscrire cela dans les paysages post industriels du nord de la France, tout en faisant des clins d’œil à ses sources d’inspiration. On y croise par exemple un panneau « Texas », le mot « Saloon » ou encore cette voiture américaine que notre héroïne conduit dès le premier plan. Cette ambiance est le très gros point fort du film, mais c’est malheureusement un des seuls car très rapidement, on va assister à une accumulation de clichés tous plus vus et revus les uns que les autres. Dès le premier plan, avec ce tatouage Love / Hate sur les phalanges de l’héroïne, son look grunge pseudo gothique qui écoute du rock. Mais c’est pareil pour les autres personnages, que ce soit la mamie psychopathe, le beau brun ténébreux qui va s’avérer être un méchant, les motards bourrins, … On pourrait également citer la maison isolée, le passé de cette famille dégénérée ou même certains plans qu’on a déjà vus bien trop de fois. Franck Richard va également avoir du mal à cacher ses nombreuses inspirations. Il est facile d’y voir du Massacre à la Tronçonneuse, bien évidemment, mais on pourra citer La Nuit des Morts Vivants, ou Saw 2 le temps d’une scène. Il semble avoir tout particulièrement apprécié The Descent de Neil Marshall. L’ambiance brumeuse pourrait renvoyer à celle du The Fog de Carpenter. C’est bien joli d’avoir des références, mais il faut savoir les digérer et les retranscrire dans son propre univers pour qu’elles aient réellement un sens et/ou une utilité.


Le casting de La Meute est étonnant et des plus sympathiques. Malheureusement, les acteurs ne semblent pas toujours très à l’aise dans leur rôle. Yolande Moreau, jamais dernière pour sortir des sentiers battus, a un jeu qui sonne faux ; Benjamin Biolay, tout en sobriété, ne semble pas très impliqué dans ce qu’il fait ; Philippe Nahon semble s’amuser avec son personnage décalé mais n’a pas assez de présence à l’écran ; Émilie Dequenne est par contre plutôt convaincante mais n’arrive malgré tout pas à tirer le film vers le haut. Il faut dire qu’ils ne sont pas gâtés au niveau des dialogues avec des textes qui se veulent percutants, à base de punchlines et d’expressions bien vulgaires (« Je vais repeindre le lino avec le jus de tes couilles » par exemple), mais qui au final tombent à plat. On ne parlera pas des seconds rôles bien pourris, comme les trois bikers, plus que risibles bien qu’ils pourront prêter à faire rire. Il ne faudra pas non plus compter sur le scénario, quasi inexistant, qui ne sait jamais réellement dans quelle direction partir. On passe de l’épouvante au survival pour finir sur le fantastique et le « home invasion ». C’est d’ailleurs lorsqu’il vire au fantastique, avec l’arrivée de ces goules que le film perd définitivement le spectateur. Là, on commence à se poser plein de questions. Quelles sont les réelles motivations de tout ce beau monde ? Pourquoi ces goules ? Pourquoi on les nourrit ? D’où sort cette pioche toute propre que l’une d’elles se trimballe ? Et puis pourquoi ce titre ? A partir de combien d’entités peut-on parler de « meute » ? Certainement pas 4 comme dans la 2ème moitié du film, ni même les 8 qu’on aperçoit dans le plan final. Et puis c’est mou. Ou plutôt, ça se traine. Comme le film ne raconte pas grand-chose, il fait trainer certaines séquences. Un comble pour un film d’1h25 génériques compris. On se consolera avec les quelques effets gores, pas si nombreux mais néanmoins réussis, contrairement au maquillage façon latex collé sur la gueule des goules qui fait artificiel.


On sent beaucoup de bonne volonté dans ce que le réalisateur veut faire avec son film La Meute. Malheureusement il se rate sur presque tout. Reste une ambiance très réussie qui à elle seule permet au film d’être regardable.


Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-la-meute-de-franck-richard-2010/

cherycok
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le 4 mai 2022

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