Sophie Letourneur mêle carnet de vacances, fragilité des liens et récit familial dans l’apesanteur des souvenirs d’été. Une chronique sensible mais un peu répétitive, où le montage joue un rôle particulier.
Sophie (Sophie Letourneur) et Jean-Phi (Philippe Katerine) passent des vacances en Sardaigne, accompagnés de leurs enfants Claudine (Bérénice Vernet), 11 ans, et Raoul (Esteban Melero), 3 ans. « Il se passe rien et il se passe tout !»
Sophie Letourneur prolonge l’univers amorcé dans Voyages en Italie, dont ce film constitue une suite formelle et affective. On retrouve ce même goût pour l’observation des personnages. Cette fois, le couple s’élargit et se transforme en famille. Les enfants prennent le pouvoir dans les relations… Tout comme dans le récit et le montage du film. Le choix d’un récit en flash-back enchâssé, raconté du point de vue de la fille, est l’une des très belles idées du film. Ce procédé crée une atmosphère de mémoire flottante : on ne suit pas une histoire qui se déroule, mais une histoire qui se recompose depuis le souvenir, avec toutes ses imprécisions, ses redites, ses ruptures de ton. On a l’impression d’habiter la mémoire d’un été. Avec ce procédé, la légèreté de ce qui est filmé est ainsi imprégnée par un ton tragico-nostalgique, quelque chose de plus grave, plus mélancolique.
Le dispositif est habile mais finit quand même par s’épuiser. Les scènes s’étirent, les motifs se répètent, et ce qui semblait au départ libre et sensible devient peu à peu monotone, parfois presque complaisant dans sa forme relâchée. Ce faux désordre, qui faisait le charme de Voyages en Italie, atteint ici ses limites, certains effets devenant mécaniques.
Reste malgré tout un film singulier qui prend au sérieux les petits riens, les gestes insignifiants, les silences gênés, les disputes anodines. Une œuvre fragile, touchante dans son honnêteté, qui capte quelque chose de très juste sur la mémoire familiale, l’érosion des sentiments et l’irréversibilité du temps.