Les plaies des villes où le vil déplaît
Voici la journée trépidante de Bourvil dans l’enfer de la capitale, son petit appartement exigu, son travail, sa voiture à garer, sa sœur, sa maîtresse, celle de son patron, le déjeuner, les mille et un petits tracas de la vie quotidienne au milieu d’une ruche de cinglés, a priori, en rajoutant le charme de la dodoche, de l’époque et ma tendresse pour Bourvil, le film avait tout pour me plaire…
Malheureusement, je déteste lorsque l’unique ressort comique consiste en une avalanche d’ennuis qui croule sur les épaules frêles d’un héros maladroit, j’abhorre les quiproquos laborieusement étirés pendant des heures et je trouve que sans le génie de Tati ou de Franquin les gags sur les aléas techniques de la vie moderne peuvent très vite devenir plus angoissants que comiques…
Et surtout, je ne comprends pas pourquoi Bourvil ne retrouve pas ici son rôle de Normand gentillet perdu à la grand ville qui lui colle si bien à la peau au lieu de faire de son personnage un modèle presque parfait du gros connard parisien dans un mauvais jour. Egoïste, malpoli, rustre, maladroit, nerveux, chauffard, impatient, agressif… Difficile de reconnaitre le bon Bourvil derrière ce pisse-vinaigre, ce bouffe-creux, ce mâche-bile gobeur de pilules qui exhibe en outre contre toutes les lois de la plus élémentaire pudeur un répugnant soupçon de moustache au milieu de la lèvre supérieure, une brosse à dents révulsante sous son nez d’aigle, un ramasse-miettes de carnaval qui s’impose comme un cauchemar au spectateur pendant toute la séance. Si vous ajoutez à cette ignominie une douce et fraîche maîtresse dont ce satyre pourrait être le père, vous comprendrez pourquoi cette histoire ne mérite pas une seconde de votre pur et chaleureux regard.
Je rajoute néanmoins un point de générosité pour une réaction inattendue : c’est la première fois qu’un film parvient presque à me faire apprécier le métropolitain, c’est involontaire, certes, mais notable tout de même.