Transfert de données

Il semblerait que, dans Big Hero 6, l’âme se confonde avec la carte-mémoire sur laquelle sont sauvegardées les propriétés du robot Baymax, doudou géant qui se soucie de soigner les bobos et qui servira au protagoniste principal pour faire son deuil. Peu importe le corps, seul compte un ensemble de données censées le rappeler, voire le réincarner ad vitam aeternam ; la clausule, en ce sens, assume le caractère interchangeable de son bibendum qu’il suffit de reconstruire « à l’identique ». C’est manquer là la complexité profonde et de l’enfant et de l’être humain pour qui le paraître ne se substituera jamais à l’être, surtout quand ce dernier est perdu pour toujours.

Aussi la morale pseudo-philosophique que défend le film mute-t-elle progressivement en mécanisation d’un individu réduit ici à un trait de caractère : la perte du frère, l’ami gaffeur, la fille féministe… Les voir fagotés dans une armure achève le processus de robotisation et nous rappelle que ce que nous avons sous les yeux est, lui aussi, le résultat d’une fusion, le produit du rachat de Marvel par Disney. Irions-nous trop loin en voyant dans Big Hero 6 une métaphore de la politique menée par la souris milliardaire depuis quelques années maintenant, à savoir nier l’âme de l’art et dégrader ce dernier en une somme d’algorithmes, rejeter l’indépendance et l’unicité d’une maison de production en en transférant les données vers un gigantesque ordinateur central qui convertit tout cela en produits dérivés jetables ?