Attendu après son remarquable premier long-métrage, La mécanique de l’ombre, Thomas Kruithof reste dans le thriller politique à la française – un genre sans aucun doute passionnant, à explorer à souhait et que le cinéaste maîtrise sans conteste.
À l’image de son premier long-métrage, Thomas Kruithof sonde les arcanes du pouvoir, à travers le personnage de Clémence Collombet, maire d’une ville de banlieue parisienne, très bien incarnée par Isabelle Huppert (comme d’habitude). Le cinéaste a effectué des recherches auprès de vrais élus de banlieue parisienne et de leur chef de cabinet, qu’il a rencontrés, écoutés et interrogés, et cela se sent : le film frappe surtout pour son réalisme presque documentaire, montrant la complexité d’une simple mesure politique en raison de tous les acteurs qui y interviennent et jouent un rôle dans l’ombre – encore et toujours l’ombre étant la matière que le cinéaste aime à explorer.
Le scénario est haletant, comme le peuvent être de nos jours les séries. Il faut d’ailleurs souligner que le co-scénariste du film, Jean-Baptiste Delafon, n’est autre que le co-scénariste de la série Le baron noir. Outre le rythme maintenant le spectateur en haleine, Les Promesses séduit pour le portrait psychologique de la mairesse, femme à la fois honnête et fidèle à ses idéaux mais humaine avant tout, c’est-à-dire parfois menteuse, perfide, faible ou séduite par le pouvoir ; par ailleurs, le cinéaste saisit parfaitement toute la complexité du travail de l’édile au quotidien, l’obligeant à promettre sans se compromettre, à communiquer sans agir, à s’informer tout en restant secret, à exercer des pressions et les subir, à faire jouer son réseau, à être loyal et savoir trahir, à flairer les coups bas et les esquiver. Son chef de cab’, avec qui elle forme un couple à part entière, incarné par Reda Kateb, partage ces mêmes dualités, même si le cinéaste prend le parti de ne pas le mettre autant en lumière que la maire.
Bien que le scénario peine à se construire (l’idée de base du film n’est semble-t-il pas vraiment claire dans la tête du cinéaste), que des scènes soient un peu trop romanesques et certains personnages secondaires assez mal écrits, le résultat est vraiment plaisant avec ce film politique dans l’ère du temps, en pleine Macronie où les maires peuvent devenir ministres et où cet homme de l’ombre, exemplaire quoique issu de banlieue, veut participer, contre tous déterminismes, au futur prometteur du pays.