Ce réalisateur est une découverte pour moi et surtout un véritable coup de cœur! J'ai regardé ses deux films en très peu de temps. J'ai commencé par "Le visiteur du musée" qui m'a complètement assommée (dans le bon sens) et ensuite celui ci: "Les Lettres d'un homme mort"
Konstantin Lopushansky a été clairement influencé par Tarkovski (il était son assistant sur Stalker qui est peut-être le plus grand point de référence de "lettres d'un homme mort"), mais à bien des égards, je trouve ce film supérieure à la plupart des travaux de Tarkovsky. Oh, Je me rends bien compte que, pour beaucoup d'entres vous, dire une telle chose équivaut à un sacrilège. Et puis il est vrai que je n'ai pas encore vu l'œuvre entière de Tarkovski (même si j'en ai déjà vu pas mal). C'est peut-être aussi mon goût prononcé pour les ambiances post-apocalyptiques, je ne sais pas... mais ce film est un chef d'œuvre, une évidence de la première à la toute dernière scène. Lopushansky a conçu un film aussi déprimant qu'édifiant et qui soulève plus de questions que presque n'importe quel film sur le même sujet.

Le film est tourné dans une brume dorée, où, comme notre «héros» le décrit, il y règne un crépuscule perpétuel. Visuellement, le film m'a fait penser aux films muets des années 30. Ce filtre jaune crée un effet unique qui rend tout laid mais à la fois tout étrangement beau. Les friches stériles du monde extérieur sont inquiétantes, dangereuses, hostiles. A d'autres moments, à l'image des détritus gorgés d'eau de cette bibliothèque abandonnée - le monde n'a jamais été plus spectaculaire.

Ce film expose les angoisses d'un peuple face à une catastrophe nucléaire (a savoir qu'il est sorti un mois avant la catastrophe de Tchernobyl), et imagine la vie des survivants terrés dans un souterrain. Après une explosion atomique, un savant, prix Nobel de Sciences, se retrouve bloqué dans le sous-sol délabré d'un musée avec sa femme mourante et quelques autres personnes. Là, il écrit à son fils Eric, disparu lors de l'explosion et qu'il a cherché en vain dans la ville entièrement dévastée. Faute de place dans l'abri central, les enfants, jugés trop atteints et malades, ne peuvent y aller. Le vieux savant décide de rester avec eux ...

Les lettres de ce père à son fils sont des aveux et des questions intimes que toute l'humanité doit essayer de répondre. L'espoir que son fils soit encore en vie quelque part maintient le pauvre homme debout, mais combien de temps pouvez-vous continuer à esperer quand vous voyez tout le monde mourir autour de vous? Et puis, en quoi être un savant peut il bien servir maintenant? Quelles hypothèses scientifiques peuvent elles bien être utiles dans un monde fini.... Ma scène préférée est celle du scientifique qui parle a cet autre homme, médecin je crois:
- L'homme: "nous avons reçu l'ordre d'évacuer dans l'abri central, nous partons aujourd'hui" [.....]
- Le savant: "qu'est ce ça veut dire?"
- L'homme: "30 ans hors surface, peut être 50 et peut-être l'éternité. Tout est fini, la planète est inhabitable "
- Le savant: "ça n'est pas possible. Appelles ça comme tu veux: un sixième sens, une intuition. Je n'ai pas d'hypothèse positive pour le moment mais je le sens, tu comprend? C'est simplement impossible, impossible de le croire, de se résigner"
- L'homme: "ma famille entière est morte brûlée, ça n'est pas possible ça?"
- Le savant: "je ne sais pas, quelque chose ne va pas dans ma tête, peut être même une sorte d'amnésie. J'ai besoin que mon cerveau se focalise sur un problème, de trouver une hypothèse, je ne sais pas de quoi, mais j'en ai besoin"
- L'homme: "l'air frais de la montagne et du repos"
Et ils se mettent à rire et à se serrer dans les bras, tous deux pris de fou rire. Une scène ultra poignante comme j'en ai rarement vu au cinéma....

"Lettres d'un homme mort" est une expérience cinématographique difficile, mais finalement très gratifiante. Difficile, bien sûr, en raison de l'imagerie et de l'atmosphère émotionnellement dévastatrice. Nous regardons littéralement une poignée de personnes qui croupissent et finissent par mourir, avec seulement une petite illusion d'espoir à la fin. Et enrichissante en raison de la représentation de véritables sentiments humains et des messages incitant à la réflexion.

Il est également intéressant de voir comment «Lettres d'un homme mort" reste en permanence vague quant à la cause de l'apocalypse. À une époque où les films de l'autre côté du rideau de fer (en Europe et particulièrement aux Etats-Unis) accusent régulièrement la Russie de l'apocalypse à venir, au contraire ce film suggère que la cause de la catastrophe réside dans une erreur humaine lors du lancement d'une navette spatiale....

Un film fantastique, mais évidemment pas adapté à toutes les occasions et / ou publics.

Edit: petit conseil, celui ci est a voir en premier, et ensuite "Le visiteur du musée". J'ai fait malheureusement l'inverse :D
Alors que l'histoire des "lettres d'un homme mort" se situe peu de temps après la catastrophe, "Le visiteur du musée" qui est également un film post apocalyptique, imagine la vie des années après celle ci. Une suite en quelque sorte, avec le même point de référence du musée (une métaphore qui j'imagine fait allusion a ce que l'humanité perdrai et tenterai de retrouver)

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le 5 mars 2014

Modifiée

le 5 mars 2014

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Chrisy Shalala

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