Lost in Translation par Ripailloux
Je ne sais vraiment pas par quoi commencer concernant ce film. Il faut dire que ce Coppola est vraiment particulier. Se concentrant exclusivement sur deux personnages perdus en plein Tokyo, je finis par me perdre moi-même dans ma critique... Enfin bref on va essayer de faire quelque chose de sympa.
Lost In Translation nous installe donc au coeur d'un hôtel Japonais, dans lequel deux personnages bien différents sur le papier, vont se croiser et finir par échanger, principalement à cause de leur incroyable mal-être au sein d'une société qu'ils ne comprennent pas et qui leur joue des tours. Ce qui marque au premier abord dans ce film, c'est l'exagération avec laquelle Coppola montre les Japonais. Ils sont passionnés de jeux vidéos et de karaokés, ont des traditions bizarres et ne parlent pas un mot d'anglais... Sympa. Certains pourraient s'offusquer d'une peinture aussi caricaturale, mais bien sûr il faut voir au-delà du premier degré. Coppola souhaite simplement souligner de façon excessive le fait que nos deux personnages sont totalement en dehors de cette société. Si elle montre un Tokyo sous son jour carte postale/cliché, c'est juste pour mieux créer une rupture. Et elle le réussi parfaitement.
Quand Murray se demande l'intérêt d'un restaurant dans lequel on prépare nous même ce qu'on mangera, la question vient bien du personnage, et pas de Coppola. C'est évident.
En effet, l'ambiance joue un rôle primordial dans ce film. Coppola nous livre un film pratiquement contemplatif, jouant beaucoup sur les moments de "silence" pour nous faire entrer dans cet univers. Elle accompagne ces nombreux moments de musiques assez douces, parfois excellentes, parfois même ultra-originales pour un film du genre (Tommib de Squarepusher, c'est énorme). Ces choix musicaux sont payants.
L'ensemble de la mise en scène pousse également à l'introspection. Les plans sont intéressants à observer, pas toujours totalement francs, ils jouent avec la distance. Ils alternent entre plans larges et gros plans, afin de s'intéresser à l'intimité d'un personnage, ou à le recentrer dans son contexte. Tokyo est parfaitement filmé. Dès les premières images (et je ne parle pas de la culotte de Scarlett Johansson bien sûr) on voit Tokyo sous un jour imposant. De grands buildings dominent le taxi dans lequel Bill Murray observe impuissant sa ville d'une semaine... Les personnages sont d'ailleurs aussi paumés dans la ville qu'ils le sont dans leur vie. Johansson ne voit aucun avenir dans sa vie professionnelle, elle perd d'ailleurs son mari au fur et à mesure du récit (pas concrètement, mais au niveau de la présence), quant au personnage de Murray, il ne croit plus beaucoup à son mariage et ses contrats publicitaires ne le passionnent pas du tout. Ces personnages sont parfaitement traités, et d'une crédibilité touchante. Il faut dire que les acteurs y mettent du leur. Johansson est très juste, comme d'habitude, et Murray est juste parfait pour le rôle, son regard désabusé faisant pratiquement tout (on comprend pourquoi Coppola le voulait absolument).
De cette situation particulière naît alors une histoire d'amour. Mais pas une histoire d'amour traditionnelle. Peu de pièges, peu d'obstacles, cette histoire avance lentement au gré des déambulations nocturnes de nos deux insomniaques, totalement folles (la scène du Karaoké est magnifique à ce niveau là). Progressivement la relation entre les deux change, de façon absolument crédible. Pas de grosses ficelles, rien d'exagéré, l'ambiguïté naissante ne nous étonne jamais, et n'occulte jamais le reste du récit.
La démesure d'une métropole au service d'un récit d'égarement...
Coppola ne choisit pas un hôtel gigantesque pour rien. La vue vertigineuse de la vue de la chambre de Scarlett Johansson n'est qu'une métaphore du même vertige qu'elle vit dans sa vie. Certains plans sont esthétiquement très réfléchis. Les passages durant lesquels elle visite des temples, ou durant lesquels elle croise la tradition japonaise, sont autant de moments passionnants de par leur traitement. On n'est pas dans un documentaire, on vit réellement les choses à travers les personnages... Personnages au traitement épuré. Finalement on ne sait pas tant de choses sur eux, ils s'entendent sur à peu près tout ce dont ils parlent mais ne partagent jamais leurs goûts, leurs passions... Excepté 2/3 informations, ils ne vivent que par les sentiments qu'ils dégagent. Très bien d'ailleurs de la part de Coppola d'avoir évite les longues discussions sentimentalo-philosophiques. A travers le simple regard des personnages, et la mise en scène, on comprend parfaitement ce qu'il passe par la tête de chacun...
D'ailleurs, il est également très intéressant de souligner la présence quasi-exclusive de deux personnages... Qui pourrait me citer un autre acteur au rôle important ?
Je me demande finalement ce qui manque à ce film pour qu'il m'ai réellement séduit. Peut être un peu plus... Au final toute cette histoire n'apportera pas grand chose. Bien sûr les points de vue des deux personnages centraux changent à la fin du film, mais simplement au niveau de leurs sentiments... Il n y a pas un fond si grand. Alors bon, je serais le premier à défendre ceci en disant que l'intérêt n'est pas là. Mais bon, il me semble qu'il manque un petit quelque chose quand même.
Ca reste un très bon film, à voir, mélancolique, contemplatif, esthétiquement parfait. Un petit bijou qui aurait pu être encore plus poli mais qui est déjà très beau.
(Pas trop convaincu par l'organisation de ma critique... Mais tant pis)