Le Sony's Spider-Man Universe se précise, et en même temps, toujours pas l’ombre d’une toile dans le potager. Si le tisseur de toile trouve le succès côté animation, dans les live-action, c’est encore le brouillard, que l’on confond de nouveau et absurdement avec l’aspect ténébreux des personnages. À peu de choses près, nous y sommes, au fond du fond de la crevasse, en accompagnant son camarade symbiote. Venom est face à son propre carnage et « Morbius » à sa propre tambouille artificielle, sans saveur. Daniel Espinosa (Easy Money, Sécurité Rapprochée, Enfant 44, Life) tente et espère dans le même mouvement, une stratégie abondamment recyclée et éprouver à tous les niveaux. Il est secondé par les scénaristes Matt Sazama et Burk Sharpless, qui ne cessent de piller les mythes pour les déformer au lieu de les transcender. Le vampire continue de traverser les générations et à multiplier ses nuances sur divers supports. Il fascine par son attrait du sang et une dépendance à des pulsions, qui révèle les limites de l’humanité autour de lui.


Mais ici, on ne fait pas d’histoire, on ne crée pas d’enjeux, juste des prétextes pour aller aspirer la vitalité de mercenaires et d’âmes innocentes, sans pour autant tâcher le décor de sang, ce serait de mauvais goût. Du CGI à en perdre la tête, avec des enchaînements douteux et une spatialisation incohérente ne sont que des petits exemples auxquels le spectateur devra affronter. Ajoutons du bullet-time en bonus et nous avons atteint le sommet de l’esthétique ignoble, déjà pillé ailleurs et pas dans les meilleurs crus. Jared Leto continue de disparaître derrière les personnalités borderline de ses rôles. Il incarne un docteur Michael Morbius obsédé par rien du tout en fait. Seule sa créature, qu’il cache après son expérience ratée, domine les traits de sa personnalité et son parcours, dans un récit qui avance sans balises, juste à coup de pulsions primitives, dans un désordre qui n’a pas lieu d’être. Il suffit de s’arrêter sur les premières minutes du film pour constater l’indigence du montage qui se croît malin, mais cela entraîne indéniablement une narration aussi décousue qu’inoffensive.


Parlons-en d’ailleurs, du vampire qui n’effraie pas plus que cela, qui se cache dans un hors-champ mal mis en scène ou au milieu d’une photographie aussi plate qu’imperceptible. On confond constamment le flou et l’ombre dans cette origin-story, qui prend d’abord soin de définir l’inventaire du héros, car oui, ce n’est pas un vilain, avant de nous en faire la démonstration visuelle, également sans émotion. Les citations de Murnau à Dracula restent aussi anecdotiques que ringardes dans une approche, qui ne prend pas au sérieux les artistes et les mythes, qui ont redoré le blason du suceur de sang dans l’imaginaire collectif. Au lieu de cela, c’est Milo (Matt Smith) le boiteux, qui bascule soudainement en faux-frère ennemi. Le love interest répond au nom de Martine (Adria Arjona), si l’on parvient à s’en souvenir. Mais comme pour le médecin qu’interprète Jared Harris, ils ne seront que des éléments du décor, que l’on aura oublié de caractériser, avant de nous faire croire à des réels enjeux émotionnels. De même, nous avons un duo d’enquêteurs, sur la piste des cadavres, mais jamais sur le principal intéressé, car de toute évidence, quelqu’un a oublié de les intégrer à l’écriture.


Comme d’anciennes aventures solos de Marvel chez Sony, il n’y a rien de bon à retenir et les échecs s’empilent de nouveau, derrière un studio qui ne pensent qu’à gonfler sa tirelire, quand il s’agit de surfer au gré d’autres univers. Alors oui, l’humour en moins pourrait donner plus de crédibilité au personnage, mails tout le maillage qui en découle derrière ne convainc pas et ne suscite ni plus ni moins qu’une errance mentale durant toute l’intrigue, qui use de tremplin aussi gargantuesque que conventionnel dans les adaptations des comics aujourd’hui. Ainsi, Morbius est incapable de boucler son récit et en appel à des scène post-générique de récupération pour souligner le manque de sensationnel dans son climax, terne et bruyant. Son potentiel est de l’ordre du caméo, qui reviendra au besoin et pour servir un nouveau collectif. Ce film n’est ni plus ni moins qu’un sticker dans la collection d’un studio qui ne semble pas plus impliqué à développer ce pan du Spider-Man Universe, jusqu’à se vampiriser de lui-même. Reste à savoir si l’écurie d’en face, Disney, saura quoi faire de son futur « Blade ».

Cinememories
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le 30 mars 2022

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