Rien à pardonner (même par Dieu)
On avait pressenti depuis plusieurs films que le réalisateur danois n'était qu'un piètre faiseur, surfant pour le bonheur de ses jeunes spectateurs friands de sensations fortes et façonnés à l'uniformisation du goût (par ailleurs très discutable) sur les codes de la transgression et de la violence, le tout emballé avec prétention et ostentation, révélant au final la vacuité abyssale de l'ambition. Si on pouvait reconnaitre à Drive une première demi-heure pleine de promesses, hélas non tenues, on n'aura même plus ici la possibilité d'une rémission inaugurale tant le film nous plonge dès les premières minutes dans l'accablement, l'ennui et l'incompréhension. La relecture du complexe œdipien dans une Bangkok des trafiquants de drogues et gangsters se voudrait une expérience mystique. Elle n'est cependant qu'une succession de posters léchés où domine le rouge flamboyant. Entre cette esthétique de pacotille bâtie autour de la répétition des plans en enfilade et en perspective et l'omniprésence d'une musique surlignant le tout, on ne parvient jamais à s'intéresser au destin de ce fils mal aimé par une mère castratrice et dominatrice. Toujours retranché derrière son statut iconique résumé en un physique magnétique, Ryan Gosling livre le jeu désormais rebattu de l'homme seul et mutique,sans ici la moindre once de mystère et de séduction. Blonde platine, la comédienne britannique Kristin Scott Thomas se rêve en clone de Madonna ou de Donatella Versace auxquelles elle emprunte cette attitude savamment vulgaire et provocante, qui suscite à peine le sourire. Continuant à mettre en scène avec une complaisance de plus en plus écœurante une violence inutile qui finit de remettre le film à sa place - celle d'un divertissement vain et prétentieux - le réalisateur montre du coup les limites vite atteintes d'un talent largement surestimé, mais qui réussit à faire illusion puisqu'il fait partie de la sélection officielle de Cannes. On ne voit pas un meilleur moyen pour décrédibiliser le festival français.