"Nous sommes condamnés à être libres"... au Groenland.
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« On ne naît pas yakuza, on le devient. » aurait pu dire Bourdieu, s’il avait troqué sa pipe contre un sabre.
Dans Outlaw: Gangster VIP 2, Keiichi Ozawa continue d’explorer la trajectoire tragique de Goro, ce yakuza mélancolique interprété par Tetsuya Watari, silhouette longiligne errant dans la neige comme un souvenir qu’on ne peut effacer. Derrière la façade du film de genre — bastons feutrées, loyauté virile et kimonos impeccables — se cache une chronique du déterminisme social, presque durkheimienne dans sa rigueur.
Goro voudrait bien s’en sortir. Il rêve de paix, d’une vie simple auprès de Yukiko (Chieko Matsubara), cette figure de pureté un peu trop lumineuse pour son monde obscur. Mais voilà : le monde, justement, ne le laisse pas faire. La société, cette machine invisible, l’a programmé pour chuter. Élevé dans la violence, marqué par la misère et l’abandon, Goro est un produit du milieu — un habitus tatoué sur la peau.
Quand il croise cette femme agressée par des yakuzas, il tente un geste chevaleresque : il la sauve, la supplie de quitter la ville, comme s’il voulait conjurer sa propre fatalité. Mais le destin, chez Ozawa, a le sens de l’ironie : il la retrouvera plus tard dans une maison de geishas. Car on n’échappe pas à sa classe, encore moins à la structure qui nous façonne. Durkheim aurait applaudi cette régularité du tragique social.
Le film, sous ses airs de polar stylisé, fonctionne comme une méditation sur la reproduction du malheur. Chaque tentative de rédemption ramène Goro à la case départ, comme si la neige elle-même — métaphore glacée de la société japonaise d’après-guerre — effaçait ses traces pour mieux le perdre.
Et Yukiko ? Elle incarne peut-être l’utopie d’un amour hors structure, l’idée folle que la tendresse pourrait désarmer la sociologie. Mais, dans ce Japon où la hiérarchie se vit jusqu’au bout des larmes, Yukiko n’est qu’un interlude fragile, un souffle de liberté déjà condamné.
Outlaw: Gangster VIP 2 n’est donc pas seulement un film de yakuzas — c’est un film sur l’impossibilité de devenir autre. Sur cette tension entre volonté individuelle et déterminisme collectif. Entre le sabre et la neige, Goro lutte contre un monde où tout est déjà écrit.
Ce film fait partie d’une série comptant six. Il me tarde de voir les autres pour savoir si, au déterminisme social, succèdera l’existentialisme prôné par Sartre.
Goro conservera-t-il une marge de liberté pour résister, transformer sa vie — et peut-être même changer la société ?
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il y a 8 jours
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