Les traditions tendent à s’effacer depuis que le tutorat américain a entraîné l’occidentalisation du Japon, du libéralisme à outrance et d’un capitalisme sauvage dont ont pu profiter les clans de yakuzas qui ont su s’enrichir et s’adapter aux difficultés et évolutions de notre temps. Quant une société commence à s’accaparer le monopole et à faire de l’ombre aux autres, la concurrence s’interroge alors sur la stratégie à adopter pour ne pas avoir à céder des parts de marché. Les affaires sont bonnes pour l’organisation Sanno à présent dirigé par Kato et ses golden-boys aux dents longues qui n’hésite pas à employer les grands moyens pour rendre des services à des membres éminents de l’état. Un peu trop bonne pour l'inspecteur Kataoka qui va profiter des dissidences en interne pour pousser un grand clan d'Osaka à rompre le pacte mutuel de non agression, le but étant d'affaiblir chacune des deux organisations pour s'octroyer les lauriers de la lutte contre la criminalité. Ses conspirations et tentatives infructueuses de mettre de l'huile sur le feu vont l'obliger à brandir son joker de luxe : Otomo, le chef déchu et laissé pour mort qui va atterrir tel un grain de sable dans la mécanique de prédation.


Mais Otomo se sent vieux, et ne songe plus qu’à se retirer après avoir payé sa dette à la société, fatigué d’avoir dût croupir 5 ans derrière les barreaux, rompu à l’ivresse du sang qu’il a du répandre avant de verser le sien dans une cours de prison pour un outrage dont il s’est rendu coupable. Rattrapé par son passé, l’ancien yakuza visé par une tentative d’assassinat va devoir s’allier à son ancien bourreau Kimura. Peu rancuniers, les deux compères s’étant laissé des marques indélébiles, vont désormais faire front commun afin de se rapprocher du clan Hanabishi pour esquisser leur propre organisation criminelle et enfin prendre leur revanche sur Kato et ses sbires. Mais les Hanabishi ne sont pas si différent des Sanno depuis que la nouvelle génération a balayé l'ancienne d'un revers de balle. On se retrouve avec un nouveau combat sans code d'honneur, où les complots et assassinats sont rapidement expédiés et sournoisement fomentés afin de ne laisser aucune traces compromettantes qui pourrait précipiter tout le monde dans une guerre à l’issue bien trop incertaine.


Suite au succès critique et financier de Outrage, Kitano ressuscite donc son personnage qui ne fera encore figure que d’instrument et de pion au sein d’un vaste échiquier avant de se retourner contre son maître à jouer. Si cette suite s'enlise un peu dans de longues continuités dialogués, c'est seulement parce que l'intrigue s'avère beaucoup plus dense qu'auparavant, pour autant on retrouve le même cynisme que dans le premier, l'absurdité des rapports hiérarchiques, et toujours une certaine inventivité dans les mises à mort aussi sordide qu'incongrue comme le passage à tabac réjouissant d'une enflure bien connu du précédent opus. Outrage Beyond reflète également la condition de son réalisateur interprète, désincarné, dépressif et emplit d’une forme de noirceur vorace qui ne peut aboutir que par la mort des nombreux protagonistes de l’histoire. En désespoir de cause, les yakuzas ne font plus tellement figure de fantasme et de vertu dans l’imaginaire cinéphilique, ils ne sont plus respectables ni même respectés par les autorités comme l’inspecteur Kataoka qui agit lui même comme une impitoyable raclure arriviste en orientant les affrontements entre les différents camps.

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le 10 avr. 2023

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