Avec Persona, Bergman signe l’un de ses films les plus déroutants et les plus fascinants. L’histoire semble simple : une actrice qui cesse de parler et une infirmière qui s’occupe d’elle. Mais très vite, le film dépasse son intrigue pour devenir une sorte de face-à-face intense, presque hypnotique, entre deux femmes qui se reflètent, s’opposent et finissent par se confondre.
Ce qui impressionne, c’est la manière dont Bergman pousse son dispositif minimaliste jusqu’au bout. Deux personnages, une maison isolée, peu d’action… et pourtant, une tension permanente. La caméra scrute les visages comme rarement au cinéma, captant chaque fissure, chaque trouble. Le noir et blanc sublime ces détails et rend l’ensemble à la fois austère et d’une beauté saisissante.
Le jeu des actrices est évidemment central : Liv Ullmann et Bibi Andersson portent le film de bout en bout, chacune avec une intensité différente. Le contraste entre le silence de l’une et le flot de paroles de l’autre crée un déséquilibre qui rend chaque scène imprévisible.
Certaines séquences sont volontairement abstraites, presque expérimentales, et peuvent dérouter. Mais c’est précisément ce mélange d’intimité et d’éclats énigmatiques qui donne au film sa force. Persona n’est pas un film “facile”, c’est une œuvre qui demande de l’attention, mais qui offre en retour une expérience unique, où le cinéma devient un outil pour sonder l’identité, le désir, et les zones d’ombre de l’humain.