Quand les zombies mangèrent le cinéma

Chers amis, l’heure est grave. Au moment d’écrire ces mots, il m’est difficile de savoir comment aborder cette critique. Loin d’être un spectateur difficile, il est rare que je me retrouve en plein désespoir devant un film. Pourtant, Retour à Zombieland a réussi à se distinguer, mais pas dans le sens où l’on aurait pu le vouloir. Équipez-vous bien, faîtes le plein de munitions, car aujourd’hui, ça va saigner.


Dix ans. C’est ce qui nous sépare de Bienvenue à Zombieland, premier film qui nous présentait cette bande de joyeux lurons créant un groupe aussi volatile qu’il est invincible une fois soudé. Déjanté, explosif, il jouait la carte de l’humour pour se frayer une place dans un sous-genre du cinéma d’horreur souvent assez limité, et sans être vraiment brillant, ça marchait plutôt bien. Alors, quand quelque chose marche bien à Hollywood, qu’est-ce qu’on fait ? Une suite, bien sûr ! Et jamais l’expression « on prend les mêmes et on recommence » n’aura trouvé une aussi bonne illustration. Car nous retrouvons notre charmante petite équipe, quelques années plus tard, laquelle a pris possession de la Maison Blanche. Elle s’est installée, pour une fois, mais, évidemment, comme dans le premier, les deux filles vont encore décider de partir sur un coup de tête, et c’est reparti pour un tour.


Vous voilà tombé dans le piège. Alors que ce Retour à Zombieland repart exactement sur les mêmes bases que le premier, on commence vite à flairer l’entourloupe. A mes yeux, le principe d’une suite est, certes, d’entretenir ce qui a été installé dans le précédent, pour maintenir une forme de cohérence à l’échelle d’un ensemble, tout en ayant la capacité, tout de même, d’apporter quelque chose de spécifique et d’identifiable pour alimenter l’ensemble alors créé. Est-ce que c’est ce que propose Retour à Zombieland ? Pas du tout, évidemment ! Car, il y a dix ans, Bienvenue à Zombieland apportait, quelque part, une petite touche de fraîcheur à un sous-genre dont les poncifs sont déjà bien éculés, mais ce second film fait preuve d’une fainéantise aberrante en reprenant exactement les mêmes vannes, et les mêmes ressorts scénaristiques. En gros, Retour à Zombieland est un pur copié-collé du premier film, auquel on a rajouté des éléments totalement inutiles et lourds pour en faire un film complètement idiot.


Au fur et à mesure que le film avance, il enchaîne les défauts avec une rigueur spectaculaire. Mal rythmé, mal écrit, complètement vide de propos, ennuyeux, il coche absolument toutes les cases du film raté par excellence. L’humour ne fait jamais mouche, hormis, peut-être, deux ou trois répliques qui ont pu me faire sourire, tentons de rester positifs… Mais le plus insupportable est la propension de ce film à nous prendre de pour des idiots, à sortir des vannes, en appuyant dessus comme pas permis pour nous dire « hein, t’as vu, en fait la blague ça veut dire ça, c’est drôle, hein, elle est drôle ma blague hein, hein ? Allez vas-y, ris ! » Et c’est bien là toute l’illustration d’un des grands maux du cinéma hollywoodien contemporain : il prend son spectateur pour un idiot. Il faut tout dire, insister, tartiner, pour écraser toute forme de subtilité d’un coup de pied bien énervé.


L’humour est d’une lourdeur à faire pâlir de jalousie le monster truck de Luke Wilson, quand il ne se contente pas de simplement repomper toutes les vannes du premier. Il ne se réinvente jamais, il ne fait que jouer sur plus de clichés pour alimenter l’ « univers Zombieland », ou enchaîner des sortes de sketches sans jamais que cela ait une quelconque harmonie à l’échelle du film, il ne tente même pas d’exprimer quelque chose, ou à la rigueur, faire semblant d’évoquer des sujets à travers quelques répliques niaises et déjà entendues mille fois. Ah, mais c’est vrai, « c’est du divertissement »… Oui, soit, c’est vrai, et on sentait ce divertissement dans le premier, mais, à un moment, quand rien n’est drôle, quand on n’attend que le générique de fin, on a tendance à oublier qu’on est devant du divertissement.


Et, pour combler le tout, le cinéma est lui-même absent du film, ayant décidé de prendre quelques vacances très loin pour éviter de risquer de nous infliger une mise en scène intelligente et de faire quelque chose avec la caméra, les acteurs ou le montage, ça aurait bien été dommage. Tout comme il était dommage que la scène la plus drôle soit celle qui intervient après le générique. Bref, Ruben Fleischer avait déjà fait très fort avec l’indigeste et l’inconsistant Venom, mais il a montré qu’il était capable de faire encore pire avec Retour à Zombieland. Il peut se targuer de venir contester à Qu’est-ce qu’on a encore fait au bon Dieu ? sa place de Flop n°1 de l’année. En tout cas, s’ils ont déjà mis dix ans à nous sortir cette suite, qu’ils n’hésitent pas à prendre encore plus leur temps pour en faire une autre. D’ici là, avec un peu de chance, on aura tous été zombifiés…


Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art

JKDZ29
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le 10 nov. 2019

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