Seul contre tous, le film porte bien son nom car c'est bien la situation du héros. En préface de ce film il y avait Carne qui expliquait le début de l'histoire qui nous est raconté avec des photos commentées en voix off. Cette suite est toute aussi dévastatrice avec la folie humaine. On ne discerne plus ce qui est fou ou qui ne l'est pas, ce qui le devient, on ne sait plus si on marche sur la tête ou pas, plus rien n'a de sens. Seule la violence et la haine motivent la vie. Elle est un moment de haine, la vie n'étant pas assez juste, les riches sont riches, les pauvres sont pauvres, c'est pas juste, voilà le sens du propos du bonhomme. Mais c'est en fait un homme en totale perdition accablé par le fait qu'il ne sache pas quoi faire qui reporte la haine qu'il devrait avoir contre lui contre les autres. En fait on a là un homme sans attache qui s'emporte violemment contre tout le monde se montrant à l'égal d'une sombre réflexion idéologique rageuse accusant ceux qui sont mieux lotis que lui d'être les responsables de sa condition. Un type qui tuerait car se sent délaissé, insulté, spolié, et victime de ceux qui ne sont pas dans sa condition. Un pauvre type. Dramatiquement héroïque car malgré sa facilité à s'emporter il reste maître de lui-même pour ne pas se détruire totalement. Et à la fin quad il dit qu'il va se battre pour vivre, soupirs de soulagement car c'est bien la première fois qu'on ne voudrait pas qu'un type aussi fou ne survive.
En somme nous avons un personnage perdu, mais trop faible pour se donner de la peine, se faire vivre donc il cherche a pomper le reste des individus, à les voler, il leur crache dessus si il ne lui accorde pas la moindre faveur alors que lui passe son temps à boire dans les cafés, un type qui crache sur ce qu'il créer par sa fainéantise, sa tendance aux raccourcis douteux et sa haine de la réussite des autres. Un mec sombrement violent, et dévasté.
Car oui notre héros est dévasté. Il lui manque quelque chose qui se dessine petit à petit au coeur de son discours, l'amour. Oui personne ne l'aime et il n'aime personne. Mais c'est bien ça qui le sauvera à la fin, je n'en dirai pas plus. Et à la fin c'est bien dis "l'homme a une morale", avertissement, car même en étant si haineux il y a encore d'autres paliers. Notre héros c'est arrêté car il avait une morale, une morale, voilà que sonne le glas. Car cette morale même anti-sociétale, va lui permettre de survivre, pour l'homme survivre est une loi génétique.
Du point de vue de la réalisation c'est magistral. Gaspard Noé est inimitable. Son style est identifiable et tellement net. Il créer un univers avec un coup de caméra, dirige ses acteurs avec brio. Noé a un sens du plan juste magistral, une esthétique du débris aussi bien humain qu'urbain sans égal. Un génie de la réalisation, un style à part entière. On peut ne pas aimer le propos, sa façon de le traiter, mais on ne peut pas dire qu'il n'est pas un réalisateur. De telles qualités filmiques sont époustouflantes. Il c'est ce qu'est une caméra et il sait ce qu'il doit en faire. C'est ainsi qu'on peut parler d'un vrai style Noé, un style qui marque. Au-delà de la clarté harmonieuse des plans et de leur construction sans faille, il y a une teinture rouge ocre de l'image. Comme pour mieux dessiner les angles, angles apparents on pourrait dire. Dureté de l'image, violence de la couleur, acharnement de la voix off, on devrait pisser le sang de toutes nos voies. Ben non car c'est tellement sublime, magnifique, sublimation de la haine, de la violence, controverse de la pensée courante radicale contre la société. Car oui notre héros est un extrémiste violent, sans limites qui vide ça haine sur le monde, et crache salement à la figure de pauvres innocents. Et cette réalisation qui en esthétise la laideur et la crasse n'en est que plus géniale.
En définitive un film époustouflant de maîtrise technique. Un film époustouflant de propos provocateurs, mais tellement révélateur d'un type d'individu près à tout par bêtise fainéante. En lutte contre le système se sentant désavoué. Un type rejeté par lui-même qui e veut dès lors aux autres. Un type détestable au possible qu'on veut voir vivre pour le faire mentir.