Gémellité dépressive

Une énième comédie dramatique indé US sur le thème de la dépression? Pas faux, mais, à bien y regarder, le prix du Meilleur Scénario gagné au festival de Sundance en 2014 par "The Skeleton Twins" n'est pas volé. Malgré un déroulement très classique, ce deuxième film de Craig Johnson parvient à se différencier de la masse grâce à une espèce d'alliance parfaite entre la subtilité de l'écriture de ses personnages et le talent des interprètes qui la font vivre.

Alors qu'elle ne l'a pas revu depuis dix ans, Maggie vient au chevet de son frère jumeau Milo après que celui-ci ait tenté de mettre fin à ses jours. Pour se remettre et renouer des liens, elle lui propose de venir vivre avec elle et son mari...

"The Skeleton Twins" suit la trajectoire émotionnelle gémellaire de ces faux-jumeaux -justement- qui semblent saboter leurs vies respectives volontairement. Toujours en deuil du suicide de leur père, Milo est vampirisé par une relation du passé où son désir de figure paternelle a fait de lui une victime inconsciente pendant que Maggie met en péril son mariage avec des relations sans lendemain et ses doutes sur le fait de devenir mère de peur de reproduire les mêmes erreurs que la sienne. Évidemment, le lien qu'ils vont tous deux peu à peu recréer va faire déteindre leur fragilité commune sur chacun de leurs problèmes jusqu'à en toucher le fond avant de repartir vers des horizons plus sereins.

Sur un plan global, "The Skeleton Twins" n'invente donc pas grand chose autour d'une intrigue un peu déjà connue à l'avance mais le film est véritablement transcendé par l'intelligence de ses comédiens principaux Bill Hader et Kristen Wiig, conscients qu'ils ont là un superbe matériau pour faire transparaître toute leur complicité issue de leurs années passées ensemble au Saturday Night Live. Dès lors, il devient impossible de ne pas succomber à l'alchimie naturelle émanant des retrouvailles de ces deux jumeaux tant dans leurs moments de légèreté que dans leurs conflits. Épaulé par deux solides seconds rôles (et, chose rare, que le scénario fouille tout autant que les principaux) interprétés par Ty Burrell dans une performance assez inédite et Luke Wilson touchant en mari archétypal, le duo brillant formé par Hader et Wiig s'approprie totalement la finesse du scénario sur les rapports frère/soeur pour devenir l'âme d'un film qui, sans eux, n'aurait sans doute pas eu la même capacité à nous émouvoir.
À l'image de la séquence presque déjà culte du playback sur "Nothing's gonna stop us now" de Starship, "The Skeleton Twins" a trouvé les acteurs parfaits pour le faire vivre un peu plus que la moyenne dans les mémoires et c'est sa plus grande qualité.