À l’origine, Ray Yeung a eu l'idée de ce film après avoir lu "Oral history of older gay men in Hong Kong" ("Histoire orale des gays âgés à Hong Kong") écrit par le professeur Travis S.K. Kong. Il s'agit en fait à la base d'un document oral de douze interviews d'hommes âgés entre 60 et 70 ans dont la plupart sont encore "dans le placard". Le réalisateur y a trouvé des histoires extrêmement intéressantes et surtout des histoires qui n'avaient encore jamais été montrées au cinéma. Suite à cela, le réalisateur a commencé par demander à l'auteur de lui présenter quelques-uns de ses témoins et les échanges ont commencé. C'est donc en s'inspirant d'eux que le scénario est né.


Ray Yeung voulait qu'Un Printemps à Hong Kong soit fidèle à l’esprit du livre dont il est inspiré, c'est à dire construit à la façon d’une chronique qui met en valeur les existences ordinaires des deux protagonistes. Ainsi, leur quotidien est décrit en détail et on observe comment leur routine s'interrompt petit à petit, au fur et à mesure à l'évolution de leur relation. Les changements émotionnels sont subtils et l’atmosphère paisible et c'est sûrement cela qui m'a le plus touchée. Tout coule comme un léger filet d'eau qui essaye de se frayer un chemin.


Tourné dans le quartier appelé Kowloon City qui est très différent de ce qu'on voit habituellement de Hong Kong (ses centres commerciaux de luxe et ses hôtels très chers), tous les lieux sont représentatifs de la classe ouvrière dont font partie les personnages principaux. Ils sont deux hommes ordinaires, qu'on pourrait croiser tous les jours et dont on ne pourrait jamais imaginer qu'ils soient homosexuels. Sachant que le film est aussi une romance, le défi était de montrer la réalité de ces lieux urbains tout en y infusant du beau et de la poésie.


La partie la plus complexe a été de trouver des comédiens pour incarner ces personnages qui ont autour de 70 ans, et surtout d’en trouver qui acceptaient d’interpréter un personnage gay. Ray Yeung a rencontré une centaine d’acteurs et, au bout d'un an de recherche, il a fini par trouvé et convaincre Tai Bo et Ben Yuen d’interpréter ces rôles.


Afin d'être le plus proche possible de la réalité, le cinéaste s'est inspiré des témoignages des livres mais a aussi visité les appartements de certains des témoins avec son chef décorateur. En les observant eux et les objets qui constituaient leurs intérieurs, la façon dont ils parlaient et les photographies qu'ils collectionnaient, cela les a nourri pour le visuel du film. Alors que la plupart de ces hommes cachaient leur homosexualité mais, une fois qu’ils commençaient à parler de leur vie, ils devenaient très libres et leur mémoire très vive. "Comme ils avaient gardé tout cela secret pendant tant d’années, une fois les portes ouvertes, ils ne pouvaient plus s’arrêter" raconte le réalisateur.


Ce qui m'a énormément plu dans Un printemps à Hong Kong c'est la manière si délicate de Ray Yeung filme ses personnages. On sent toute la compassion qu'il a pour eux eux sans qu'il n'y ait jamais de doute sur ses motivations à les mettre en scène. Avec ce film, il nous montre qu'aujourd'hui encore la relation entre deux hommes n'est pas encore considérée comme Amour mais comme situation inédite et non conventionnelle d'autant plus lorsqu'il s'agit d'hommes d'un certain âge.


Je n'ai aucun défaut à relever par rapport à ce film pour tout avouer. Je n'ai pas vu le temps passer et j'ai éprouvé beaucoup de tendresse et de solidarité pour ce couple. Je ne peux donc que vivement vous le recommander et en parler autour de vous pour que les mentalités changent.

SybilleGuerriero
7

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Créée

le 31 mars 2022

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