Les miracles existent ! Il arrive que la foi soit récompensée ! L'argent ne fait pas (entièrement) tourner le monde !
Je crois que tout le monde a été surpris en apprenant que American McGee's Alice aurait la chance d'avoir une suite, alors qu'en dépit de sa forte identité et de son succès critique, il fut un fiasco commercial.
C'est donc avec impatience que les vétérans, les chercheurs de nouvelles sensations et les hipsters ont vu arriver ce nouvel épisode des aventures de la jeune Alice Lidell dans un Pays des Merveilles horrifique, violent et malsain.

Quiconque s'est informé sur le jeu sait sans doute qu'il se démarque par le fait d'interpréter l'œuvre Alice aux Pays des Merveilles d'une façon psychotique et gothique, atmosphère sombre et intrigue ténébreuse sont donc au rendez-vous (juste à temps pour le thé !)
L'histoire se démarque par sa maturité et par les cordes sensibles sur lesquelles elle joue : L'alcoolisme, la prostitution, le viol ou encore la pédophilie sont de la partie, omniprésents le long de l'aventure, ce qui est plutôt risqué pour les développeurs et rafraichissant pour le joueur qui ne voit pas souvent des thèmes si tabous et pourtant si présents dans notre monde prendre place dans un jeu vidéo.
En effet, bien qu'Alice passe la plupart de son temps dans les fabrications de son imagination, nous pouvons la contrôler quelques temps dans le monde réel, c'est-à-dire le Londres de la fin du XIXe siècle. J'ai pour ma part presque préféré ces parties aux péripéties imaginaires de la jeune héroïne bien qu'elles ne soient que du pur tourisme (on ne peut que marcher et observer), tout simplement parce que je les ai trouvés bien plus sombres que les segments dans le Pays des Merveilles. En effet c'est ici que l'on visite les rues dégueulasses de la ville, où toute la misère et la stupidité moisit, clairement exposées à la jeune protagoniste.
L'intrigue s'avère finalement intéressante : On prend du plaisir à découvrir le mystère traumatisant Alice, brisant son esprit et laissant le Pays des Merveilles torturé et mutilé, autant qu'à retrouver les personnages cultes de l'histoire originale qui subissent chacun un drame personnel (le Chapelier Fou est victime d'une révolution socialiste, le Charpentier qui organise un spectacle pour couvrir le viol des Huitres par la Morse...), avec un peu de psychologie par ci et par là, marquant une certaine profondeur scénaristique.

Une histoire, c'est super, mais si elle n'est pas marquée par des mécanismes de jeu corrects pour que le joueur la découvre, ça dégoute. Ici on peut constater une nette évolution par rapport au premier opus : Au revoir les mouvements rigides, les sauts imprécis et le faux-TPS.
A la place on nous propose un mélange de séquences de plateforme, de combats et de puzzles si faciles qu'ils ne vaudraient pas être mentionnés.
La plateforme est classique, mais les combats nous proposent un mélange de corps à corps et de shoot très fluide et agréable, plusieurs armes au design original étant proposées qui peuvent être upgradées. La caméra est souple et la plupart du temps bien gérée, je n'ai pas rencontré de problèmes de ce côté, bien qu'apparemment d'autres joueurs ont été rebutés par une caméra foireuse. Il y aussi tout plein d'objets a collectionner, apportant soit des infos sur la trame narrative, soit plein de contenu bonus.
Le problème vient du fait du level design qui s'avère plutôt répétitif et parfois un peu trop simplet (toujours sauter d'une plateforme a une autre, puis buter des monstres, puis resauter...). Ceci étant d'autant plus dégoutant par le fait que les développeurs ont quand même pensé à nous incruster un gros passage original propre à chaque chapitre pour aérer un peu la monotonie de l'ensemble (phases de shoot-them-up, phases en sidescrolling, un mini-jeu au gameplay ressemblant à Sonic), et pourtant on s'avère finalement lassé des phases principales de jeu, trop ressemblantes les unes aux autres, le tout agrémenté de quelques bugs plutôt gonflants.
Pas de boss fights non plus pour agrémenter, alors que plusieurs opportunités étaient à saisir.
MAIS, lecteur, tout ceci est compensé. Le gameplay, jouissif mais répétitif n'est rien comparé à la force brute, puissante, imposante, pénétrante, le gros obélisque d'or du titre...

LES GRAPHISMES (fap fap fap fap...).
Là, t'as deux choix :
Soit tu fais ta petite pimbêche, garce, pute capricieuse et tu chiales parce que t'as quelques textures de gamme PS1, des détails ou tu vois carrément les pixels et l'utilisation du moteur de jeu le plus banal de l'industrie du jeu vidéo.
Soit tu admires le travail de ouf fait avec l'Unreal Engine, la fluidité et les animations ahurissantes fait sur les cheveux et les vêtements d'Alice, tu te prosternes face à la magnitude de la direction artistique la plus puissante dans un jeu vidéo en regardant les environnements dans leur globalité au lieu de ronchonner sur ta petite texture.
C'est un peu comme un gars qui sait admirer un superbe gâteau, incroyablement appétissant et qui ne peut que pleurer de joie devant une telle œuvre d'art culinaire, et un autre gars qui ne fait que ronchonner parce qu'une des fraises du gâteau a un grain de poussière (ou sont pas des fraises bio).
Alors après on peut discuter : C'est vrai qu'au final, tu retrouves peu d'éléments purement gothiques exhibant pleinement la folie et toute la dimension glauque, ou du moins, moins d'éléments qu'on te le fait croire dans les vidéos et les critiques. On se retrouve alors avec des niveaux étant steampunk, a style japonais, entre autres... ce qui n'enlève rien de la force de la direction artistique toujours originale et loufoque, pour notre plus grand plaisir.
N'empêche que c'est toujours un plaisir de voir le look des personnages, les robes d'Alice sublimes et détaillées, la moindre des choses bénéficiant d'une patte artistique forte (même le cadre de target-lock est beau)
Au final on se retrouve avec un jeu qui est tout simplement merveilleux à admirer, comme le plus beau voyage du monde, le level design et l'histoire (bien que celle ci soit vraiment bonne) passant au second plan, étant juste un guide touristique qui nous prend de la main pour nous mener dans des paysages les uns plus beaux que les autres.

Apres pour ceux que ça intéresse, au niveau sonore : les musiques sont plutôt discrètes, mais vont bien avec l'ambiance du jeu, rien de bien remarquable, par contre le jeu en VO profite d'un vocabulaire plus complexe à comprendre que la moyenne, d'autant plus qu'il y a quelques problèmes de sons (limpidité sonore, voix trop basses, bruitages trop forts...)

BON : Vous avez vu tous les trucs méchants sur Alice : Madness Returns que j'ai dit et tous les points négatifs que j'ai soulevé ? OSEF. Va tout de suite t'acheter ce putain de jeu énormissime qui a été pour moi une claque, et va te vanter auprès de tes copains que tu supportes les développeurs artsy et que la folie et le sang ça te fait pas peur, c'est pour ça que t'es trop cool et c'est comme ça que je pourrais me délecter quand on annoncera une suite à ce petit coup de cœur.
Vagabond
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le 19 juil. 2011

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Vagabond

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