« L'Étranger »

Je veux commencer par dire que j'ai beaucoup aimé le jeu et que c'est la 4e fois que je reviens sur mes impressions pour les corriger, Isolation m'a inspiré beaucoup de choses.
Les voici en 8000 caractères...
Mes premières heures ont été une déception sans nom. Ce n'est qu'après une quinzaine d'heures dessus que les choses me sont apparues plus clairement, alors en route pour les hauts et les bas.

1. Des développeurs doivent pleurer un peu partout dans le monde, Sega vient de relever incommensurablement le standard de qualité des adaptations film > jeu. Non content d'offrir un jeu à la hauteur d'un film mythique, les Devs. se payent le luxe de non pas adapter les événements d'un film, mais de créer une trame (totalement crédible et valable) complémentaire à l'histoire initiale. Quand on sait le monument qu'est le huitième passager et qu'il date d'un peu moins de 40 ans, c'est un tour de force encore plus magistral. Creativ Assembly enfonce encore le clou en joignant 5 pistes marquantes (dont le thème principal) créées pour le film original. Et récupère Tom Skeritt et Sigourney Weaver (et les autres, mais pas Ian Holmes) pour le doublage du DLC expandable crew.*


2. Un moteur graphique maison donne vie à la station Sevastopole. Visuellement irréprochable, on y trouve un soin de réalisation très au-dessus de beaucoup d'autres AAA.
   Les cinéphiles apprécieront ce détail: le travail photographique/éclairage n'a jamais été à ce point criant dans un jeu, l’étalonnage, la tonalité des couleurs, c'est terne, un peu aseptisé, mais ça sonne juste, crédible comme un photo-réalisme, mais au lieu de simuler la réalité, ça simule le rendu original du huitième passager. Les jeux utilisent tous du post-traitement, mais ici c'est au-delà de ça.


3. Très peu de AAA première personne peuvent s'enorgueillir d'atteindre les 15h de durée de vie, dans ce cas on est, quoiqu'il arrive, au-delà des 20h voir des 25h... comme si Isolation n'avait pas déjà cloué au pilori tous les autres titres de sa catégorie...

J'ai envie d'être dithyrambique, mais je ne peux pas l'être plus longtemps, car il y a des défauts et pas forcément que des mineurs.
La durée de vie est importante, mais c'est en partie à cause du système de sauvegarde.
4. Pas de sauvegarde manuelle, pas de Quick Save non plus, quelques checkpoint excessivement rares viennent à votre aide... Le reste du temps, à vous d'atteindre les bornes téléphoniques pour sauvegarder. Elles n'ont pas été toujours placées à proximité de chaque objectif, ainsi régulièrement 10 minutes de jeu (voir plus) partent en fumée parce qu'on n'a pas su atteindre la borne. Quand on sait qu'être pris par l'Étranger est synonyme de mort , la frustration s'invite souvent. En plus du système de sauvegarde discutable, chaque interaction avec l'environnement est très lente, 5 secondes pour ouvrir un terminal, idem pour le fermer, une fois sur un ordinateur même la navigation semble manquer de répondant... et pendant ce temps rien n'est en pause. Si vous entendez la bête, il est très possible que même si vous réagissez au quart de tour elle soit déjà sur vous alors que vous êtes encore en train d'attendre qu'Amanda veuille bien lever la tête pour pouvoir se tirer.

5. Côté craft c'est également une vive déception, je pouvais voir Ripley sur les teasers assembler nombre de bidules improbables pour avoir un appareil ou un autre. Une fois en jeu ça se limite à trouver l'objet et instantanément votre Gadget s'améliore. Côté des consommables c'est plutôt pareil, j'ai dû utiliser 10 cocktails Molotov, 5 générateurs de son et 3 grenades aveuglantes au total (et j'étais en difficulté max + le succès "ne tuer aucun humain")... pas exactement indispensables. (Quand je pense à ce qu'offrait Dead Space 3, j'en veux vraiment aux Devs. de ne pas s'en être inspiré)




6. L'IA est catastrophique, PNJ qui vous regarde de longues secondes avant de penser à tirer ou bien qui tire vainement alors qu'une vitre incassable vous sépare d'eux, les humains engagent rarement une vraie poursuite pour vous retrouver... L'Alien est un pur script (quelques guides expliquent déjà les détails de son fonctionnement), que vous fassiez du bruit ou non, c'est binaire. Soit les Devs. ont prévu que la créature soit présente dans un endroit précis et elle est là toujours quelque part à 15 ou 20m autour de vous, soit vous êtes dans une zone où les Devs. l'ont exclue et même si vous commenciez à hurler jamais elle n'arrivera.
   Vous pouvez vous faufiler dans une zone différente sans aucun bruit, la chose vous suivra. Une fois caché dans une armoire inutile d'attendre qu'elle aille voir ailleurs, elle fait des rondes en continu... Avec de tels mécanismes, la peur et l'angoisse ont vite fait de passer par la fenêtre, au mieux des sursauts et de la surprise, mais certainement pas de la peur (et je suis bon client pourtant, Amnesia ou Outlast me terrifient).




7. Sans peur, sans action et sans aucun moyen de pratiquer une véritable infiltration**, sans puzzle ou quête annexe le gameplay semble un peu creux. J'en suis venu à me dire qu'il s'agit d'un jeu d'aventure et pas d'un survival. J'ajoute aussi que même si la station est d'une crédibilité exceptionnelle, elle est mortellement inamovible, interactions avec l'environnement proche de zéro, cela en est triste tant c'est sublime et bien réalisé. On voudrait jouer, enflammer, casser, expérimenter le moteur physique... Impossible.




8. Avant de conclure, je voudrais glisser un mot sur les synthétiques (les PNJ Androïdes). Nous sommes là en présence d'un peu de génie. Ils ne courent pas, sont tous identiques ou presque, ne peuvent que vous frapper/étrangler, progressent en ligne droite sans se préoccuper du feu et répètent en boucle des phrases aussi inquiétantes qu'incongrues, mais ils sont pourtant bien un paramètre critique à gérer et peuvent compliquer grandement vos parcours.
   Tout comme le mieux que vous puissiez faire avec l'Alien c'est de la faire fuir pour quelques dizaines de secondes, vous devrez faire des choix avec ces entités. En tuer un est complexe et une dépense en munitions affolante (sans parler du bruit). Quand on voit les zombies à toutes les sauces, Sega a pondu ici quelque chose de différent, de neuf. Cela m'inspire de voir que de telles "innovations" sont encore possibles.

CONCLUSION : Malgré tous ces défauts Alien: Isolation demeure un titre qui fera date, un chef-d'oeuvre épique comme l'on n’en voit pas souvent, même de la part de gros studios/éditeurs. Malgré tous ces défauts, je l'ai adoré, je le recommande chaudement et même sans être un fan de la première heure de la saga, il y a des passages tout bonnement jouissifs à vivre. Autant dire que si vous êtes fan, y jouer est indispensable tant l'univers fourmille d'infos, d'histoires, de réponses et de rêves qui deviennent réalité... Ne boudez pas votre plaisir !