Ashen
6.2
Ashen

Jeu de A44 Games et Annapurna Interactive (2018Xbox One)

J'ai passé un agréable moment sur Ashen mais je pense que le jeu se loupe sur plusieurs points. Commençons par le point positif du jeu - et qui explique en grande partie pourquoi j'ai pris plaisir à jouer à Ashen - : l'univers et la direction artistique. Le style graphique minimaliste est très particulier mais bourré de charme et l'univers est plaisant à parcourir.


Les environnements sont très réussis, il y a presque un côté fait main dans les décors, avec de vastes plaines parsemées de rochers et de ruines, ainsi que des immenses structures à l'architecture biscornue mêlant échafaudages en bois et palais antiques faits de pierre. ll y a de quoi explorer, les zones sont suffisamment vastes - surtout au début - et complexes pour se perdre et errer.


L'effet d'échelle et les panoramas sont par ailleurs assez réussis : le regard embrasse facilement l'ensemble de l'environnement pour donner envie d'explorer les différentes structures et éléments que l'on voit au loin. Grâce à cet aspect qui semble artisanal, les limites entre ce qui est explorable et ce qui ne l'est pas restent assez floues. C'est suffisamment bien fait pour renforcer la dimension naturelle des environnements. Il y a rarement un chemin tout tracé pour atteindre un point, quitte parfois à se perdre dans des ruines ou dans des structures en bois labyrinthiques.


Si la direction artistique et l'agencement des décors est au top, je suis un peu moins convaincu par le level design pur, notamment en terme d'intérêt. Le jeu est étrangement linéaire dans son déroulement. Les zones sont disposées les unes à la suite des autres - chaque zone étant censé être plus hostile que la précédente - et les quêtes principales et secondaire apparaissent de manière à être accomplies de manière progressive, une zone après l'autre, de sorte que l'on ne fait souvent que passer dans un lieu sans jamais avoir la nécessité de revenir en arrière.


Ashen a de l'or entre les mains mais il n'en fait quasiment rien, le jeu ne sait pas comment remplir et faire vivre son univers, comment amener le joueur à s'investir et à explorer. L'idéal aurait peut-être été de créer une boucle de gameplay plus satisfaisante et de mettre l'accent sur le craft et la gestion du personnage, éléments classiques mais efficaces présents dans la plupart du jeu. Malheureusement Ashen est tout aussi limité sur cet aspect.


Par exemple, le loot est d'une platitude absolue. On trouve des items pour crafter des armes en quantité inutilement industrielle, mais très peu d'armes et encore moins d'armures. En fait, l'évolution du personnage se base davantage sur l'argent (comme dans beaucoup de jeux désormais), argent qui sert à augmenter la puissance des armes, du principal item de soin ou bien encore à s'équiper de différentes compétences. Ces choix sont assez succincts et surtout mal pensés.


L'upgrade des armes par exemple est peu clair, de telle sorte que l'on ne sait jamais si une arme finira par être plus puissante qu'une arme déjà bien upgradée. En pratique la seule manière de comparer la puissance des armes est d'augmenter toutes les armes, mais c'est financièrement impossible (d'un autre côté ça expliquerait la tonne d'items de craft que l'on trouve). Du coup, j'ai conservé l'arme disponible au début du jeu en l'augmentant au maximum. Je n'ai pas eu l'impression qu'il y avait mieux par la suite, ce qui est très décevant.


Enfin, la particularité d'Ashen - ou non particularité, c'est selon - est de proposer des combats dans la lignée des Dark Souls, à savoir des affrontements basés sur une certaine difficulté, des mouvements plutôt lents où il faut gérer l'esquive et les coups selon le pattern des différents ennemis. Là aussi, comme partout ailleurs dans le jeu, on ressent une retenue, un ascétisme forcé, un minimalisme qui reste certes plutôt efficace mais sans vision particulière, sans gros partis pris. Les mouvements lents, ainsi que la présence d'une barre d'endurance, obligent à gérer ses coups et empêche de trop bourriner. Cela dit, une fois retenu le pattern des ennemis, le jeu ne propose plus aucune subtilité.


La présence d'un binôme est la seule chose qui apporte un petit plus lors de l'exploration et des affrontements. L'idée est très bonne mais étrangement exécutée. On peut jouer avec un vrai joueur en ligne et c'est certainement l'option la plus intéressante, puisqu'il y a une véritable complémentarité, un sentiment de coopération qui peut parfois s'effacer devant l'initiative personnelle et l'envie de chacun d'explorer à droite ou à gauche. Par contre, j'ai très peu joué avec d'autres joueurs sans que je sache pourquoi (il aurait peut-être fallu que j'active une option de recherche à chaque fois ?).


Le reste du temps, on est tout de même accompagné par un partenaire dirigé par l'ordinateur qui, à mon avis, déséquilibre la difficulté. Il est tentant la plupart du temps de laisser le binôme aller au contact faire office d'appât et d'agir en support, quitte à être spectateur. Ça marche la plupart du temps, et c'est clairement la méthode la plus efficace et la plus viable en fait, notamment contre les boss. Le problème c'est que l'IA a parfois des absences, et son côté tête brulée est très pénalisant sur les dernières zones avec beaucoup d'ennemis puissants. Sans parler des moments où le binôme disparait complètement sans raison, le plus souvent lors des passages les plus critiques, après avoir erré dans un donjon depuis plus de vingt minutes... Ashen a du mal à trouver le juste équilibre : seul, le jeu me semble infaisable, mais accompagné par l'IA la difficulté devient aléatoire.


Preuve des légers déséquilibres dont souffre le jeu : il est parfois plus facile et pratique de traverser certaines zones en courant, pour aller plus vite et éviter des combats qui s'avèrent fastidieux, difficiles et peu gratifiants en terme de récompense. C'est notamment prégnant vers la fin où les zones se font plus linéaires et difficiles et où l'on se rend compte que l'on ne perd rien à courir et à éviter les ennemis pour aller directement au point de résolution de la quête, plutôt que de progresser péniblement pendant 20 minutes en tuant chaque ennemi pour mourir au même point et devoir tout recommencer.


Ashen n'est donc pas dénué de charme mais ses mécaniques restent fragiles, plutôt classiques et un peu répétitives. J'ai surtout pris plaisir à arpenter les environnements, à découvrir de nouveaux décors, à mes yeux la vraie motivation pour progresser dans l'aventure, car ce qui apparaît en théorie comme le cœur du gameplay - les combats, l'exploration, la gestion du personnage - manque de profondeur et peine à se renouveler pour rendre le jeu intéressant sur le long terme.

benton
6
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le 18 juin 2019

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