C'est pour ce genre de cadeau que j'aime les jeux vidéo.

Assassin's Creed III, dernier épisode de la série en date, est-il vraiment nécessaire d'en faire un résumé pour toi, lecteur ? Non, toi aussi tu connais AC et en plus j'ai la flemme ! D'autant qu'il est absolument nécessaire d'avoir terminé les autres épisodes pour s'attaquer à celui-ci. Oui, l'univers attire les nouveaux-venus, oui le jeu comprend une rapide introduction aux évènements précédents, mais rien de suffisant pour obtenir tous les détails, tous les petits points qui constituent le sel de la série. Car ce coup-ci, on va vraiment en bouffer, de la révélation en chaine !





Adieu manichéisme.

Assassin's Creed III apporte deux choses qui manquaient à la saga : Un scénario travaillé diluant toute notion de bien et de mal, une histoire qui prend son temps et celui de former son héros à l'assassinat. Enfin.
Enfin on oublie ces héros instinctivement balèzes, façon Altaïr que l'on prend en main déjà formé, façon Ezio mystérieusement capable d'abattre une dizaine de gardes sans égratignures et de grimper sur n'importe quoi avant même sa formation, mystérieusement zappée. Si le second et très bon épisode apportait en effet une jeunesse a son héros, ce troisième opus fait peu ou prou la même chose avec son nouveau héros, Connor, mais y apporte un intérêt, une échelle de puissance. On devient un assassin patiemment, au fil du temps, nous laissant du coup apprécier l'écart avec les gens normaux, les civils, les gardes, nous impliquant bien plus dans le rôle. Très appréciable.
Ce pas à pas, on le retrouve dans l'introduction du jeu, une sorte de gigantesque tutoriel masqué, scénarisé et très agréable dans lequel on ne joue pas cet homme présent sur la jaquette ! Pour tout dire, on ne joue pas Connor avant bien quatre à six heures selon votre style. Mais pas de panique, il s'agit là d'un prologue sympathique reposant les bases du gameplay (rafraichi. mais nous y reviendrons) et se terminant sur un twist totalement inattendu, à n'en pas douter. Ca traine peut-être un peu en longueur, mais cela en vaut la chandelle. Ajoutez deux ou trois heures derrière avant de pouvoir enfiler un costume d'assassin et vous aurez une bonne idée du temps pris par l'histoire pour mettre en place de manière impressionnante ses bases : Le scénario veut vous surprendre, le jeu veut vous impressionner, le parcours de Connor sera épique et progressif et tout sera travaillé dans ses moindres détails.
Travaillée, l'histoire l'est assurément, et à l'image de la fougue de son héros, mi-indien mi-anglais, le doute nous envahira : Le manichéeisme n'est plus de mise, et ne sont pas toujours les "méchants" qui l'on pense. Quand bien même nous retrouvons l'habituel Assassins Versus Templiers, la voie ne sera pas si simple, et les arguments des derniers sont très intéressants et nous mettent le doute. Autant le joueur que son avatar virtuel, une belle prouesse.
Le tout s'accompagne d'un contexte historique passionnant (la naissance des Etats-unis et sa révolution intrinsèque) et déchirant : Un héros métisse tiraillé, le flou des nations (qui a raison ? qui a tort ? qui est fautif, que faut-il vraiment faire ?), le destin des populations natives, les guerres... Et une critique acerbe non pas vraiment des Pères Fondateurs (totalement démystifiés) mais bien du Mythe en lui-même. Une critique incarnée notamment par Shaun et ses phrases assassines (haha !) sur l'Histoire, touchant au but. La vérité n'est pas synonyme d'ancienneté et les hommes n'ont jamais été que des hommes. Mais laissons au joueur le soin de dénicher toute cette richesse de reflexion propre à Assassin's Creed, lors des phases dans le monde présent de Desmond, sur lesquelles nous reviendrons dans le jeu. Et dans ce test.





La Révolution passe par le gameplay, soldat !

Tout ça c'est bien beau, une belle histoire et un beau contexte, mais qu'en est-il du Jeu ? Les choses n'ont pas été faites à moitié et l'essouflement visible sur les demi-épisodes de la série s'estompe totalement. Le nouveau moteur graphique annonce la couleur dès l'intro : Les foules n'ont jamais aussi bien porté leur nom et voir des centaines de personnages à l'écran n'est plus un fantasme. Et on aura l'occasion d'en voir, du monde, pas seulement lors d'impressionnantes batailles rangées propres à la Révolution américaine. Au service de la narration, les graphismes somptueux, pas forcément plus que Revelations dans le détail le sont dans l'ambiance et la grandeur : Saisons fluctuanctes -La neige et ses traces de pas, sa difficulté de progresser les genoux empêtrés dans la poudreuse-, animations totalement repensées extraordinaires et fluides, etc.
Un enrobage pour mettre en valeur un système refondu, le free-run étant plus facile d'accès que jamais (une simple pression de gachette pour courir et passer les obstacles, le tout libérant la seconde touche auparavant nécessaire). C'est plus naturel, plus efficace et immersif et on peut maintenant passer par les arbres de manière naturelle, point de gameplay ayant son importance, notamment pour la chasse et la traque. Oui parce qu'on peut chasser, aussi. Frontière, l'environnement sauvage englobant les régions du jeu est vivant, forestier et peuplé d'animaux que ne renierait pas Red Dead Redemption. Cerfs, loups, ours, renards et tout un tas de bestioles que l'on peut piéger, appater, attraper, dépecer, pour en revendre les peaux et autres parties ou confectionner des objets utiles (un holster pour porter un second pistolet, par exemple). Il faut voir ça en action, lorsque perché sur une branche, nous scrutons cette biche -traquée grace à ses pas dans la neige ou aux indices détectés par notre chasseur indien Connor- se dirigeant vers l'appat posé à dessein juste en dessous de nous. Méthode qui fonctionne également avec nos ennemis, galérant à nous poursuivre au sol et que l'on pourra, par ailleurs, éliminer par mille méthodes dont une très classieuse utilisant les arbres, justement. Encore une fois, à découvrir par soi-même !
Et quand on parle d'éliminations, le système de combat à lui aussi été repensé. Egalement plus fluide, on oublie toute notion de passif/actif : le lock d'ennemis n'est plus nécessaire et on peut à loisir courir, se battre l'instant d'après, puis courir à nouveau, pour un résultat des plus naturels encore une fois. A ce titre, les éliminations en pleine course sont très sympas, et de manière générale le combat est plus impressionnant et violent que jamais. Il n'utilise que les quatre boutons de façade (attaquer, utiliser l'arme secondaire, parer, briser la défense. Parer permettant ensuite de voler l'arme adverse, d'enchainer par une attaque ou bien de balancer l'ennemi au loin) mais les combinaisons sont nombreuses et instinctives. Prendre un otage pour esquiver les armes à feu ou effectuer une double élimination n'aura jamais été aussi simple.
On peut également voler les armes adverses dont les fameux mousquets, armes à feu disposant d'un seul tir avant rechargement fastidieux (n'oublions pas la baïonnette au bout, prompte à toute violence gratuite !), se mettre à couvert pour plus de discrétion lors des phases d'infiltrations.
A ce titre, on regrettera quelques possibilités manquantes pour un titre de 2012 : Pouvoir se baisser, c'est bien, mais ne pas pouvoir le faire en dehors de buissons ou hautes herbes, c'est moins bien. Mais c'est chipoter pour un résultat global hautement satisfaisant aux nouveautés nombreuses dont je n'évoquerai rien ici pour ne pas gacher le plaisir. Disons simplement que la variété sera le maitre-mot des différentes missions de la campagne principale, qui évite l'écueil de moments insipides (comme porter des caisses ou livrer des conneries dans les débuts d'AC2) pour ne livrer que du majestueux et varié. Pouces en l'air.
Et comment passer à coté de cette feature complètement dingue mise en avant par Ubisoft dans ces trailers : Les batailles navales. Connor dispose d'un navire, et s'en servira, tant dans le scénario principal que lors de missions facultatives. Véritable jeu dans le jeu, les batailles navales sont immersives à défaut d'être réalistes. Jouer avec le vent, gérer les voiles, ou le type de boulets de canons, voir le pont et ses matelots s'activer lorsqu'on tient la barre et hurler nos ordres dans tous les sens, aborder les batiments ennemis... Le tout sous des météos changeantes du plus bel effet et à l'océan rendu comme jamais. Jouer le pirate dans les Caraïbes (check. On le fait vraiment) n'est jamais loin. Ambiance ambiance, et on y revient avec plaisir et frisson.






Contenu, contenu, contenu !

Des nouveautés de gameplay, j'en oublie, et à dessein, c'est au joueur de découvrir tout ça. Toutefois, avoir un bon gameplay et de bons graphismes, ça fait un bon jeu. Un scénario travaillé derrière, ça fait un excellent jeu. Mais pour un grand cru, il faut une excellente durée de vie, le rythme qui va avec et de l'a-coté passionnant. Et ça, c'est la définition d'Assassin's Creed 3 ! Gestion de patrimoine, de navire, de nos troupes -les assassins obéissant à nos ordres font un retour fracassant et disposent de nouvelles actions comme provoquer des émeutes ou simuler une escorte de prisonnier pour inflitrer des bases ennemies- équipements à crafter, chasse, traque, attaques de convois, missions scénarisées, d'autres aléatoires (toujours façon Red Dead), j'en passe et pas des moindres. Glander, contempler monts et vallées pendant des heures lors de chasses à l'ours ou lorsque l'on compte aider la veuve et l'orphelin (apparition des enfants dans le jeu), tout est possible et si la campagne principale se termine en environ vingt heures en trainant un peu, le facultatif comprend facilement vingt à trente heures de plus. Avec ce tour de force de rester intéressant. On n'échappera pas à la quête de plumes ou de feuilles perdues par Benjamin Franklin (!) mais rien n'empêche de laisser ça de coté pour partir à la recherche du trésor du capitaine Kid.
Un mot de nouveau sur les parties dans le monde présent, avec Desmond : Elles sont cette fois peu intrusives et sont l'occasion de gameplay agréable, une première ! Sans trop en dévoiler, nous pourrons enfin jouer à l'assassin dans de courtes séquences jouissives et -encore et toujours- immersives. De plus, la zone principale comporte son lot de révélations à découvrir, nous poussant toujours à la curiosité. Aurait-on enfin allié les différentes composantes d'Assassin's Creed dans un tout parfait ? On y touche, à cette perfection ! Mais...




Le syndrome Trilogie.

La fin ne mettra pas tout le monde d'accord. Comme un Halo3 ou un Mass Effect3 ( j'en rage encore. Les crocs serrés, les bulles aux lèvres), Assassin's Creed3 ne conclue pas correctement son histoire et de nombreuses questions restent en suspens. La question de Lucy est trop vite expédiée. Pas un mot sur Adam et Eve aperçus précédemment ni sur le satellite d'Abstergo prévu depuis le premier épisode, par exemple. On termine sur un choix crucial de Desmond (sur lequel on a aucune influence, et c'est pour le mieux, nous ne jouons pas à un RPG) mais tout débouche sur une fin ouverte à un quatrième épisode évident. Money money money ?
Rassurez-vous toutefois, puisqu'a contrario, les révélations fusent, quelques explications aussi, et l'avenir de Desmond est limpide (magnifique cinématique de fin). Et cette histoire de fin du monde trouve également une conclusion. Ouf. Le sentiment de clore une trilogie est bien là, et si la pointe de déception est inévitable, elle ne vient pas gacher le chef-d'oeuvre.


Car c'est bien ce qu'est Assassin's Creed III. Un chef-d'oeuvre, un joyau poli dans le diamant brut, immersif et jouissif sur tous les points, sur lequel tout fan trouvera son compte. Le gameplay pur ciselé, l'histoire aux nombreuses couches, la précision contextuelle et les réflexions qui s'ensuivent à faire bander historiens et philosophes en herbe... Et bien sûr du sanglant, de la course sur les toits, le tout sublimé par une ambiance à tomber.
Evidemment, le tout n'est pas exempt de défauts, les deux villes du jeu sont assez similaires, l'open-world comprend quelques bugs, quelques petites vilénies. Mais ce sont des gouttes d'eau plongées dans un océan d'excellence, ou chacun de ses défauts trouvera mille qualités pour le diluer.

Un grand jeu, un très grand jeu.




*Nb : Le multijoueur d'ACIII me plongeant dans les méandres de l'indifférence, je n'en parlerai pas. Mais il parait que c'est de la balle, pour ceux qui aiment.
Grenur
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le 1 nov. 2012

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