Beyond: Two Souls par Hugo Harnois
Avouons-le sans sourciller, Beyond Two Souls était destiné à être critiqué sur notre site. Symbolisant parfaitement la frontière entre le jeu vidéo et le septième art, on ne pouvait passer à côté de ce jeu ayant fait beaucoup parlé de lui. Jodie, jeune femme d'une vingtaine d'année, est unique en son genre. Elle possède des pouvoirs psychiques lui permettant de contrôler une mystérieuse entité du nom d'Aiden. Alors qu'Ellen Page lui prête ses traits, nous prendrons part à ses mouvements et ses différents choix de voie.
Le réalisateur David Cage retourne à son thème de prédilection, le fantastique ancré dans un monde terne et réaliste où la mélancolie ne cesse de déborder de son cadre. Ses personnages à la mine grave et au regard douloureux sont une nouvelle fois tristes et torturés. Et en dépit d'une belle mise en scène et d'un graphisme photo-réaliste qu'on lui connaissait déjà, l'allemand ne nous donne pas vraiment l'impression que nos différents choix influent le cours du jeu, à l'inverse du mémorable Heavy Rain.
Concernant la jouabilité, il faut avouer que la prise en main de Jodie est agréable avec ses mouvements tangibles, cela malgré une lenteur parfois agaçante. De même pour Aiden, plutôt fluide et facilement contrôlable. On aurait cependant apprécier que celui-ci intègre plus souvent les phases d'action sans que ce soit la ligne scénaristique qui nous l'impose. Une fois encore, la sensation de liberté n'est pas encore optimale et le joueur a souvent la fâcheuse sensation de suivre un chemin bien tracé, tandis que la philosophie de ce jeu tend vers l'inverse.
Continuant sans cesse ses références cinématographiques, ce créateur singulier construit son jeu comme un puzzle au montage complexe, où chaque scène clé de l'existence de Jodie défile dans le désordre. Plus nous avançons dans l'histoire, plus nous cernons des problèmes que nous avions toutefois compris très vite. Mais l'équilibre entre œuvre vidéo-ludique et cinéma n'a pas été trouvé, ce dernier primant trop sur la première. Le joueur, car il faut rappeler qu'il n'est pas un « simple » spectateur, est en effet trop passif sur ce qui se déroule à l'écran. Et lorsque l'on ajoute à cette absence d'action de nombreux chapitres cassant le rythme de l'ensemble, on décroche trop facilement.
La comparaison est certainement trop facile, mais il n'empêche qu'elle est bien présente et fait partie des modèles à suivre. Il y a un an, The Last of Us a su mettre tout le monde d'accord, cinéphiles et ludophiles, en livrant un récit majestueux à l'ambiance sans pareille et en multipliant les parallèles cinématographiques. Aujourd'hui, l'intention de Cage et de son Beyond Two Souls est plus que louable car il est le seul à faire cela. Mais il suffit désormais de rééquilibrer la balance...