Ces dernières années l'on a tenté de nous faire croire que le jeu vidéo évoluait à grandes foulées vers un futur toujours resplendissant où l'audace du scénario enfin libéré de la partie enfantine de son public donnerait lieu à des jeux dont la complexité morale finirait par nous faire réfléchir. L'on nous faisait miroiter que le futur était arrivé, que l'on pourrait enfin ne plus avoir honte d'être joueur de jeu vidéo. Bref que la chose vidéoludique avait fini par gagner ses lettres de noblesse. C'était bien entendu un pur mensonge marketing décidé à extraire quelques euros de plus de la poches des gogos de tous âges réunis face à l'écran pour échapper quelques instants à la platitude de leur existence.
BioShock Infinite est le dernier né de cette race de jeux qui cachent sous un scénario juste assez profond pour faire illusion aux moins regardants d'entre nous sa totale incapacité à faire évoluer l'efficace formule de ses ancêtres. Vous y incarnez Booker DeWitt, soldat amnésique numéro 622, un homme tourmenté par un passé bla bla bla qui doit à tout prix effacer sa dette karmique en sauvant une princesse Disney nommée Elizabeth de sa vie de captive dans Columbia. Vous savez, le Rapture local. (Les historiens remarqueront au passage que c'est plus ou moins le même scénario que celui de Dishonored et BioShock 2; et cela même si Infinite se permet encore plus de facilité dans la résolution de son scénario par l'utilisation sans aucun talent de quelques vieilles cordes dignes de Sliders ou Doctor Who). Loin de moi l'idée de vous gâcher tous les arcanes majeurs de ce titre. Ils sont tellement rares et prévisibles pour quiconque doté d'un cerveau plus ou moins fonctionnel que je préfèrerais vous laisser les découvrir par vous-même. Croyez-moi, cela ne vous prendra pas plus de sept heures. Mentionnons cependant ce que tout le monde sait déjà : Elizabeth peut invoquer le Pouvoir de Ken Levine pour faire avancer l'histoire en ouvrant des failles entres les réalités afin que vous puissiez assister à des cinématiques et autres scripts du meilleur effet.
C'est sans-doute à ce moment de l'article que vous commencez à imaginer son auteur. Vous m'imaginez sans-doute excessif dans mon attaque de ce titre. Surtout si vous avez été pris corps et âmes par les charmes faciles de Columbia. C'est votre problème, pas le mien. BioShock n'est pas une série basée sur la facilité; mais au contraire sur une volonté d'élever le débat. Rapture reste le mètre-étalon de ce genre de productions. Une ville parfaite qui en quelques minutes explique de manière élégante l'histoire, les mécanismes de gameplay et même les enjeux sous-jacents de cette aventure dans laquelle nous venons de plonger le pied. Columbia, en comparaison, semble être un concept facile sorti de l'imagination d'un graphiste. Un mélange improbable d'art-déco, de bondieuseries et de défis technologiques fascinants à regarder. En termes de jeu pur cela ne vous donnera finalement qu'un beau couloir à travers lequel regarder l'action prendre place par le biais de scripts très conventionnels. La seule particularité de Columbia est bien de vous mettre sur des rails. À plus d'un titre.
Paradoxalement, si vous aimez d'amour pur le système de gameplay de BioShock : vous serez chez vous. Oh, d'accord, les Vigors - Plasmides du pauvre - ne font pas sens dans cette nouvelle cité. Oh, d'accord, rien n'a changé vis-à-vis des armes et des dispensaires. Oh, okay, le jeu a simplifié son rapport à la santé par l'adjonction d'un bouclier qui s'auto-recharge. Mais bon, c'est pas comme si on s'attendait à une évolution des séries autrefois prometteuses de notre passe-temps favori. Tant que vous voulez la même chose que BioShock 2; vous adorerez ce jeu.