Depuis quelques années les fans de Castlevania devaient se rabattre (rien de péjoratif là dedans) sur console portable pour assouvir leur passion. Entre un Curse of Darkness limité ou un Judgment simplement minable, la célèbre série n'a jamais réussi la transition en 3D. Le passage en 3D, le passage en HD, assurer l'héritage de la lignée... voilà bien de défis à relever pour ce Lords of Shadow. Alors, mission accomplie ?

Dans l'esprit on est ici dans un jeu d'action-aventure où l'on alterne baston, exploration et plate-forme dans une équation relativement équilibrée. Côté gameplay Lords of Shadow singe clairement God of War. Si les objets existent toujours leur utilisation se révèle vraiment limitée, la diversité des combos à apprendre compense heureusement cela.
Avec ses caméras prédéterminés, l'aspect du nouveau fouet et le système de combos équivalent, l'inspiration ne fait aucun doute. D'ailleurs c'est peut-être là où se situe la première faiblesse du jeu.
Les inspirations du titres sont nombreuses et en soit ce n'est pas forcément un mal mais le soucis est qu'elles ne sont pas toutes parfaitement intégrées.

Commençons par God of War, puisque c'est la première chose qui saute aux yeux. D'un point de vue sensation le jeu assure plutôt pas mal sa partition et la prise en main est intuitive (en même temps certains enchaînement sont quasiment copier-coller de la licence du divin chauve, difficile de faire plus familier) mais dès qu'on s'attarde sur le système de caméra il y a de quoi devenir fou.
Privilégiant les plans larges (très large même) et fixe (quelques travellings pour faire joli) le système de caméra arrive pourtant à être foireux en masquant le chemin en hors champs ou en noyant les zones interactives dans le reste du décor. Mourir parce que la caméra ne nous permet pas de voir où se finit notre saut, tourner 40 minutes parce que l'angle de caméra ne change qu'APRÈS la disparition du joueur derrière un rocher masquant le chemin, tourner en rond dans une salle parce que l'enchaînement des caméras ne restitue pas la topologie de la map... des défauts incroyablement horripilants mais qui jalonnent pourtant le (long) parcours du joueur dans Lords of Shadow.
Catastrophique, sans doute le mot le plus juste pour qualifier ce système de caméra, une contrainte d'autant plus irritante qu'on ne peut pas modifier, même temporairement, l'angle afin de mieux voir ce qui nous entoure.

Il y a aussi des colosses repompés chez Fumito Ueda pour des affrontements rigolos mais largement moins orgasmique que dans Shadow of The Colossus. Pas mauvais en soit on est tout de même en droit d'être déçu par un simple copier-coller. Un copier-collé qui s'avère d'ailleurs superflu puisque ces séquences n'apportent pas grand chose, ni à la mythologie, ni au déroulement de l'histoire.
Idem pour l'intégration en mode "pied de biche" du dieu Pan, si celui-ci joue un rôle un peu plus important dans l'histoire il semble pourtant ne pas venir du même univers et donc ne semble pas avoir sa place dans le jeu.
On s'arrachera aussi les cheveux au détour de certains niveaux particulièrement pénibles comme la boite à musique. Sorte de temple du "die and retry" où le joueur est largué sans la moindre indication et sans le moindre soucis de l'intérêt ludique.

Mais problème d'inspiration surtout à propos de l'histoire et du héros, Gabriel Belmont.
Le Bellâtre est anti-charismatique au possible, avec son corps en bouteille d'orangina inversée, sa serpillère sur la tête et sa mâchoire encore plus carrée que le Colorado. Donc notre grand brun est vénère parce que sa fiancée est morte et il part casser la gueule à 3 seigneurs-démon pour récupérer un masques aux pouvoirs incroyables. Evidemment il s'est fait manipuler contre son plein-gré (le gros rebondissement qu'on aura compris dès le deuxième niveau) et se retrouve à combattre un mec en slip pour sauver le monde. Cette histoire pas hyper originale est racontée n'importe comment, les éléments sont laissés de côté puis reviennent sans qu'on comprenne trop comment et disparaissent sans plus de raisons. En résulte un imbroglio peu digeste et surtout pas super motivant sur le long terme.

Dis comme ça on pourrait croire que tout est à jeter dans ce Lords of Shadow mais ce n'est pas le cas. Outre le gameplay sympathique le jeu se démarque par des graphismes agréables et un renouvellement permanent des environnements. Si certains passages sont un peu fades (les marais, la forêt verte fluo) d'autres sont vraiment somptueux (le château, les cimes enneigées, le village abandonné).
Les énigmes aussi sont plutôt bien trouvées (pour peu que la caméra veuille bien ne pas faire de la merde) et arrivent à se renouveler tout au long de l'aventure. On appréciera aussi le bestiaire particulièrement fourni, avec des zombies, des lycans, des vampires, des insectes géants, etc... On ne cesse de rencontrer de nouveaux adversaires et d'appréhender de nouvelles façons de les battre et si l'histoire peine vraiment à convaincre la progression dans l'univers reste agréable grâce à ce genre de détails.
Et puis il y a la musique, superbe, qui accompagne parfaitement les pérégrinations de Gabriel et qui contribue parfaitement aux différentes ambiances.

Malgré son côté melting-pot bancal Castlevania : Lords of Shadow est le premier Castlevania réussi en 3D et c'est déjà un bonne nouvelle. Le jeu est bourré de bonnes idées et de bons moments mais il est également horriblement frustrant. Avec son système de caméra horrible il pourra rendre le plus patient de joueur complètement fou, la bave aux lèvres, piétinant les morceaux de manettes, arrachant le papier-peint avec les dents. Lords of Shadow a tout du brouillon mal dégrossi, un jeu qui a voulu en faire trop d'un seul coup et qui n'a pas eu le temps de faire le tri (il y a même des robots !!) ni de faire les finitions.
Les bases sont là et, pour la première fois, la série est crédible en 3D. Désormais on espère une suite qui saura gommer les erreurs de ce Lords of Shadow aussi sympathique que gonflant.

Créée

le 3 juil. 2011

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