Hideo is falling down, falling down, my (un)fair lady

Depuis les temps immémoriaux où le jeu vidéo existe, le sens du mouvement en a toujours été presque l’un des composants essentiels. Prenez super mario bros en 1985. Vous avancez d’un point A à un point B. Vous pouvez sauter, vous pouvez rentrer dans des tuyaux, mais vous avancez. Le jeu vidéo repose assez peu sur l’immobilisme, parce que lorsqu’on a une manette dans les mains, une croix directionnelle ou un stick, c’est décidément qu’il faut que votre personnage se meuve dans une direction choisie. Point de vue en 2D ou 3D, peut importe.


Maintenant imaginez ceci. Et si l’un des plus grands réalisateurs de jeu vidéo de tout les temps, Hideo Kojima, décidait de recycler son Silent Hills annulé par Konami en un tout nouveau jeu expérimental où le seul but principal est d’avancer ? Vous vous diriez que ce n’est pas possible ? Que ça ne va pas être amusant ?


Il l’a fait. C’est Death Stranding. Un jeu acclamé par la critique spécialisée, considéré comme un chef d’œuvre du genre. Pour ma part, je vais tenter de décrire en quoi ce jeu est probablement l’une des plus grandes purges mentales de ces dernières années.


1. Le Gameplay


Le jeu se découpe en phases: la phase principale étant la livraison de colis. Vous devez livrer des colis à travers ce qui reste de l’Amérique à des gens dont Kojima n’a pas pris la peine de donner des noms. Pour se faire, il va falloir vous trimballer à pieds, en moto, en camion à travers les plaines, montagnes...


Les premières heures de jeu sont horribles. Parce que vous n’avez strictement aucun moyen de déplacement autre que vos jambes. C’est long, c’est ennuyeux et le moteur physique est horrible, d’autant plus catastrophique quand vous sortez des sentiers battus ou que vous rencontrez des échoués, des sortes d’esprits des morts qui errent sur terre pour se venger des vivants. Ça va être très dur au début, mettez le vous bien dans la tête.


Fort heureusement, le protagoniste Sam Porter Bridges est un rapatrié, qui décidément ne peut pas mourir, comme la plupart des protagonistes de jeu vidéo cela étant dit. Fort heureusement, au bout du chapitre 3, des possibilités se débloquent. Notamment car le personnage incarné par l’acteur Norman Reedus, va étendre le « réseau chiral » une sorte de wifi du monde des morts qui va permettre aux Etats-Unis de se reconnecter entre eux, et donc de partager des connaissances, et donc de fabriquer du matériel.


Ainsi on aura accès à des exo squelettes pour courir plus vite et moins ponctionner votre jauge d’endurance, des échelles, des cordes d’escalades, des motos, des camions qui rendront votre périple ( un peu ) plus agréable. Le jeu est absolument à privilégier en jouant avec une connexion internet, puisque d’autres joueurs peuvent vous laisser des objets, des constructions susceptibles de vous aider !


Autre chose, parlons des armes. Vous avez deux types d’ennemis dans le jeu: les échoués, des sortes de fantômes qu’il vous faudra badigeonner de votre propre sang pour espérer les tuer, ou les fuir. Les Mules, qui sont des anciens livreurs de Bridges comme Sam, et qui sont devenus des voleurs de colis, voir des assassins anarchistes.


Les combats contre les mules sont les plus « réussis », dans le sens où il va falloir privilégier une approche non-léthale. Si vous tuez vos ennemis, ceux ci deviendront des échoués, et c’est pas cool.


Les combats contre les échoués sont par contre assez casse-pieds, et je pense notamment à un Boss, dont je vais parler un peu plus tard en mode spoilers, que l’on rencontre trois fois d’affilée dans un gameplay TPS le plus mauvais que j’ai pu voir de cette génération.


En résumé Death Stranding brille surtout par sa mécanique de livraison, de construction et éventuellement des combats contre les Mules. Cependant il faut savoir que le moteur physique est dégueulasse, malgré sa beauté, la conduite des véhicules sur les cailloux est désastreuse, certains moments d’escalades vont se transformer en cauchemar pour vous. Et les combats contre les échoués, c’est vraiment pas très bon.


2. L’histoire: Euh.../20


Le scénario de Death Stranding est particulier, il est unique en son genre. Nous sommes aux Etats-Unis, ce qu’il en reste après le death stranding, une catastrophe qui a atomisé la plupart du pays. Les morts échoués se baladent dans le monde des vivants, la pluie corrosive brûle et fait vieillir tout ce qu’elle touche et dans ce monde là, on incarne Sam Porter Bridges.


Le genre de livreur Delivroo brisé par la vie, dépressif, solitaire, atteint d’haptophobie, il ne supporte pas qu’on le touche, qu’on s’approche de lui. Sam va rendre un dernier hommage à sa mère, Bridget Strand, la présidente des Etats-Unis, qui va lui faire jurer de finir ce qu’elle a commencé: Reconnecter les Etats-Unis en faisant des livraisons grosso modo.


Et nous voilà parti pour un voyage introspectif qui va durer longtemps, très longtemps, beaucoup trop longtemps selon moi. Plus de 40h voir 50H de jeu pour en voir le bout !


En cours de chemin on va croiser des personnages variés et divers qui sont globalement assez attachants; tout d’abord Fragile (Léa Seydoux) que j’ai beaucoup apprécié, elle a un character design de dingue. Ensuite on a Deadman ( Guillermo Del Toro) probablement le personnage secondaire le plus développé dans le jeu. Die-Hardman ( Tommy lee jenkins) que j’ai trouvé un peu moins réussi, Heartman ( Nicolas Winding Refn) qui véritablement dépote visuellement et Mama ( Margaret Qualley ) qui elle aussi a un secret assez intéressant et qui pourtant n’a pas le droit à une conclusion digne de ce nom.


Sam est équipé d’un brise-brouillard, une machine qui fonctionne avec un BB, un enfant né d’une mère morte cérébralement mais maintenue en vie pour permettre à l’enfant de détecter les « échoués ». Sam va véritablement s’attacher à l’enfant durant l’aventure.


Sam va chercher à retrouver « Amélie », la fille de la présidente Strand, qui lui parle pendant ses rêves, et qui au début du jeu, semble être la seule personne qui compte réellement à ses yeux.


Sam se frottera aussi à Higgs, le chef des Mules, un anarchiste criminel qui véritablement est réussi en tant que antagoniste. Il a un style, il en impose, il fait « peur », bref j’ai adoré l’avoir en méchant principal. Parce que oui, c’est selon le moi le vrai méchant de l’histoire. Et malgré que sa chute intervienne au chapitre 9 sur 15 chapitres, ce qui est venu après ne m’a absolument pas emballé.


En fait on va rentrer maintenant dans la partie spoilers de manière rapide:


Pour moi le moment où Higgs est battu par Sam est le moment de non retour du jeu. Celui où le scénario qui jusque là, malgré des baisses de rythme, m’emballait quand même, après le chapitre 9, plus rien n’a fonctionné.


Primo, Hideo Kojima va vous forcer à faire un aller retour pour finir le jeu. Vous avez bien entendu. On doit faire le chemin en sens inverse pour terminer le jeu. Ça a été un vrai calvaire. Rajoutez à cela un énième affrontement contre le personnage de Cliff, qui se trouve être le papa de Sam, et qui donc est l’objet du twist principal du jeu, à savoir que Sam est le BB originel que Bridget/Amélie a adopté et élevé comme son propre fils.


Pour moi, Cliff a été très mal géré dans l’aventure. Malgré des apparitions visuellement impressionnantes, j’ai trouvé que Hideo Kojima aurait pu expédier cela plus vite. Bref après un retour éprouvant au lieu du départ, une vrai catastrophe à jouer, pour livrer des insectes à Fragile que, honnêtement n’importe qui d’autre aurait pu lui apporter, il suffisait juste de sortir du bunker de Bridges.


La fin tire trop en rallonge. Elle ne finit jamais, je n’en pouvais plus, j’ai passé les deux dernières cinématiques ( je les ai regardé sur YouTube plus tard) parce que littéralement c’est trop long. On se retape deux fois l’intégralité des flashbacks du BB et de Cliff. L’interminable séquence de générique sur la grève d’Amélie/Bridget m’a frustré.


En fait pour faire simple, cette fin ne valait pas l’investissement colossal des heures que j’ai passé dessus, dont certaines furent très déplaisantes. Certes quelques petits moments bienvenus, la dernière accolade Sam/Deadman ou Fragile, Sam qui se libère symboliquement de ses chaînes ( et le joueur) puis adopte Lou, un BB qui aura enfin la chance de vivre comme un enfant.


Tout n’est pas à jeter dans Death Stranding, mais tout n’est pas parfait malheureusement.


3. Direction artistique et musique


J’ai rien à dire là dessus. Le jeu est magnifique, le Motion-capture est l’un des plus beau de cette génération, des plans , une mise en scène incroyable avec des références métaphysiques qui brisent le quatrième mur, des clins d’œil cinématographiques, bref Kojima est un artiste, et cela je le respecte.


La musique est très bonne, en partie composé par Ludvig Forsell et par des groupes de musique alternatifs comme Low Roar. Ça passe très bien. Très bon doublage français au passage.


Conclusion


Death Stranding est une monumentale perte de temps. Probablement la plus belle jamais portée sur console de salon, la plus expérimentale, la plus absolue. Death Stranding est une oeuvre d’art, mais elle n’est pas amusante. Du moins pas toujours.


J’ai joué à des jeux deux fois plus longs que Death Stranding, Xenoblade Chronicles 2 ou Trails of Cold Steel IV, a tout hasard, et jamais je n’ai eu autant l’impression d’être dans le néant qu’avec le dernier BB d’hideo Kojima.


Sans doute suis-je trop stupide pour les aficionados du créateur japonais pour comprendre ce qu’il a voulu dire. J’ai bien vu les messages qu’il essaie de faire passer. Et pourtant, cela n’empêche pas le jeu d’être horriblement lent, pas amusant.


Doit-on jouer à Death Stranding ?


Faites le en vôtre âme et conscience. Je ne le déconseille pas, parce que véritablement il y a un vrai travail derrière, une vision inhabituelle pour le jeu vidéo, et j’ai joué à quelque chose de différent. Mais je ne peux absolument pas le recommander pour autant, car le jeu est une véritable purge physique et mentale.


Faites une randonnée dans les montagnes à la limite, ça sera plus intéressant.

SpiderVelvet
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le 4 févr. 2021

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