Donut County
6.3
Donut County

Jeu de Ben Esposito et Annapurna Interactive (2018Nintendo Switch)

L'important dans le donut ce n'est pas le trou, mais c'est tout ce qu'il y a autour

Je ne sais pas vous mais moi, quand un jeu a l'audace de se construire intégralement autour d'un concept totalement nouveau, ça m'interpelle.
Mieux que ça, ça me rend curieux.


C'était donc (presque) une obligation pour moi de jouer à ce "Donut County".
Un jeu dont le principe est de déplacer un trou qui s'agrandit au fur et à mesure que des choses tombent dedans - donnant ainsi la possibilité de faire tomber des choses plus grandes à l'intérieur ! - j'avoue que ça m'a donné envie de voir jusqu'où ça pouvait aller.


Premier constat : ce jeu est une production indé et il nous le rappelle souvent à ses dépends.
La physique des éléments présents est assez sommaire ; les objets présents au sol souvent redondants ; le manque de détails peut aussi grandement frustrer...


Alors certes, au départ c'est drôle de foutre un peu la merde partout mais très vite le concept annonce également ses limites.
Après deux trois niveaux réalisés (très) rapidement j'ai eu du mal à m'imaginer ce que ce jeu allait bien pouvoir m'apporter par la suite en termes de profondeur.
Parce que bon, comprendre qu'il faut commencer par les objets les plus petits pour ensuite pouvoir boulotter les plus grands, ça ne vole franchement pas bien haut et ça lasse très vite.


Et le problème avec tout ça, c'est qu'à ce ludisme sommaire viennent très vite s'ajouter une narration et une direction artistique plus que discutable.
C'est que ce titre entend développer en parallèle de ses phases de jeu toute une étrange intrigue autour de "donuts" qui sont en fait des trous vendus par un raton-laveur en quête de drône hors de prix...
(Hmmm... Comment dire... Quel intérêt franchement ?)
Surtout que ces phases de narration passive sont assez longues - lestées par un minimalisme de jeu indépendant parfois limite - et qui plus agrémentées de choix musicaux vraiment pas tip-top.
Alors ajoutez à ça les "trululus" des boîtes de dialogues et vous comprendrez rapidement pourquoi ce jeu a commencé à m’exaspérer.


Seulement voilà, malgré ce premier constat peu engageant, force m'est de constater que ce jeu a tout de même fini par me séduire.
...Parce qu'en effet, sur sa deuxième moitié de partie, "Donut County" abat enfin ses cartes et démontre qu'il avait lui-même compris et anticipé toutes les limites de son concept.


D'abord c'est le gameplay qui s'enrichit quelque peu. Stage après stage quelques mécaniques toutes bêtes sont amenées.
Au départ pas de quoi s'extasier non plus mais à force de poser des mots nouveaux, "Donut County" finit par poser une grammaire qui permet l'installation d'énigmes et de puzzles.
Franchement, même si j'espérais un truc dans ce genre là, je dois bien avouer que je ne l'ai pas forcément vu venir et que ça a été une bonne surprise.


Même chose pour ce qui est de la narration. Si au départ j'avoue que je n'ai accordé que peu d'intérêt à l'intrigue et aux personnages, au bout d'une moment j'ai commencé à rentrer dans le trip.
L'air de rien cette histoire de raton-laveurs s'amusant à profiter des gens en mode parasite, ça donne davantage de sens à nos actions et - mieux encore - je trouve que ça permet de leur donner une petite dimension sadique.
Pour ma part, j'ai fini par m'amuser à dézinguer ces espaces autant pour la jubilation du saccage que pour le plaisir de voir le personnage de BK se justifier avec sa mauvaise foi habituelle.


En définitive, j'ai fini par me laisser prendre par ce jeu.
Simple et basique au départ certes, mais sachant apporter progressivement de la "profondeur" à son "trou".
Limite, c'est finalement ma frustration de n'avoir affaire qu'à un jeu indé qui m'a rattrapé sur la dernière ligne droite, bridant ainsi quelque peu mon plaisir.
Ah quand même : l'absence d'interactivité plus complexe avec les lieux et les personnages auxquels on s'attaque, la narration un peu lourdasse et les énigmes plus que simplistes sont autant d'éléments qui - s'ils avaient été poussés un peu plus loin - auraient pu donner un jeu encore plus détonnant.
C'est terrible de découvrir plein de bonnes idées et de ne pas les voir poussées jusqu'au bout.


Malgré tout, force m'est de constater que, l'un dans l'autre, ce "Donut County" a su remplir en partie sa part du contrat.
Il a su construire du gameplay sur quelque chose de simple et de novateur.
Il a su séduire en posant sa patte et en m'emmenant ailleurs.
Et surtout - mieux que ça - il a su laisser derrière lui quelques briques nouvelles dans le champ de possibilités du média.


Eh bah comme quoi...
On peut n'être qu'un trou et pourtant ne pas être aussi vide que ça. ;-)

lhomme-grenouille
6

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste 2021 : cette année de brun durant laquelle le JV va faire du bien...

Créée

le 22 févr. 2021

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