Ce que j’aime le plus dans les jeux vidéo, c’est leur étonnante capacité à nous faire voyager. Et Far Cry 3, c’est un mélange à 50/50 de voyage exotique et de descente de drogue, ça part comme des vacances d’été bien gentillettes et ça finit en trip sanguinolent et hallucinant.

Pourtant ça partait bien. Je suis Jason Brody, je suis californien, jeune et con, fraîchement diplômé, et plutôt que d’aller s’enterrer à Cancún pour le Spring Break comme le dernier des étudiants en goguette, je me suis laissé dire que ça serait vachement plus awesome de faire le tour de l’Asie avec ma copine Liza, mon frère Grant qui est réserviste de l’armée, sa copine Daisy, mon autre frangin Riley et mon pote hyper-friqué Keith. Zou, on s’envole pour l’Extrême-Orient, on fait le tour des coins a touriste, c’est trop la teuf, on se prend des murges dans des boîtes hyper branchées à Bangkok, et puisqu’un type même pas louche nous propose du saut en parachute et que de toutes façons on est bourrés, on accepte.
Le saut en parachute, c’est vraiment extrême, mais se prendre un coup de crosse de kalash dans les gencives une fois arrivé au sol et sentir l’acier froid d’un canon dans le dos, c’est autrement plus extrême.

Far Cry 3 nous entraîne sur une de ces îles de l’immense océan Pacifique qui se trouvent a des centaines de kilomètres des continents, où la notion de loi et d’ordre établi n’est plus qu’un mot qui prête à sourire tellement tout est loin. Rook Island est un archipel paradisiaque et violent, peuplé par une tribu appelée les Rakyat, et par des bandes de pirates et de mercenaires qui font régner leur loi et organisent leurs activités comme ça leur chante, assurés qu’ils sont que personne ne viendra les déloger. Trafic de drogue, d’armes, d’esclaves, exploitation minière, désossage d’épaves, tout y passe. Les pirates sont presque tous camés vingt-quatre heures sur vingt-quatre, armés jusqu’aux dents, la jungle regorge d’animaux sauvages (et pas les peluches léthargiques que vous voyez au zoo hein, plutôt des tigres, des chiens enragés, des ours, des serpents, tous prêts à vous bouffer pour le dîner), et le soleil affiche quarante degrés à l’ombre.

Bienvenue.
Et maintenant que moi, Jason Brody, j’ai de justesse réussi à m’enfuir en courant du camp où j’étais prisonnier, après avoir vu mon propre frère Grant se prendre une balle dans le cou, je suis libre, paumé et seul. Il va s’agir de tout faire pour délivrer mes amis et foutre le camp de cet enfer.
L’histoire de Jason prend aux tripes car elle dépeint très bien la désillusion et l’endurcissement d’un touriste américain naïf et presque fragile qui va finir par chasser le buffle au lance-roquette.
Lorsque Jason se réveille dans sa cage, il est terrorisé, paniqué, incapable de faire du mal à une mouche. Mais progressivement, Rook Island le force à courir, à tuer, à brûler, à s’embarquer dans un trip hallucinatoire et à tout faire pour survivre. Jason parle (et c’est suffisamment rare pour être signalé), il a une vraie personnalité, et on s’y attache. Il finit même par prendre goût à cette île qui lui permet d’assouvir tous ses penchants et de se défouler avec la liberté étourdissante qu’elle nous propose.
Mais je ne peux parler de Jason sans parler de Vaas. Vaas Montenegro, un des grands méchants du jeu, et qui est officiellement, je le dis et je l’assume, un des meilleurs si ce n’est LE meilleur méchant de jeu vidéo qu’on ait jamais créé depuis dix ans. Doublé et joué par l’excellent Michael Mando, Vaas Montenegro est le chef des pirates, un homme au passé flou qui exsude une folie douce sans aucune limite, meurtrière et prête à se réveiller quand ça lui chante. Le personnage est d’ailleurs tellement charismatique qu’il devient plus intéressant que celui du joueur. Chacune de ses apparitions est l’occasion de voir ce pirate exprimer sa folie dans l’une des meilleurs VF qu’on n’ait jamais faite (en même temps, Michael est québécois), extrêmement convaincante.
Pendant une bonne vingtaine d’heures (beaucoup plus avec les objets à rechercher, l’exploration, les missions secondaires et les défis), il va s’agir d’arpenter les deux îles pour attaquer et prendre les camps de pirates et de mercenaires répartis un peu partout, pour permettre aux Rakyat qui nous ont recueillis et adoptés de s’y installer et de faire disparaître ainsi les patrouilles d’adversaires.
Le Dunia Engine 2.0 affiche des paysages sublimes avec des effets de lumières ravissants et des textures qui le sont tout autant, malgré quelques bugs assez rares. La progression de Jason dans l’histoire s’accompagne d’un tatouage sur le bras gauche qui va s’enrichir au fur et à mesure des éliminations et des missions, qui vont le récompenser de points de compétences à investir dans trois arbres : le héron (élimination à distance et survie), le requin (dégâts et résistance) et l’araignée (élimination silencieuse).
Car là encore, Far Cry 3 nous laisse une liberté très appréciée dans notre approche. On peut être subtil et nettoyer un camp au silencieux, ou bien attirer les pirates dans un coin en faisant du bruit avant de faire sauter des charges explosives, ou encore incendier les hautes herbes, casser la porte de la cage du tigre pour qu’il se rue sur ses geôliers, ou simplement enfiler un gilet pare-balles, épauler sa PKM et défourailler en vociférant « SURPRISE MOTHERFUCKERS ! »
Le jeu reste très raisonnable dans sa difficulté cependant. Malgré la variété d’ennemis (accro aux molotovs, tanks, snipers, dingues de la machette, tous des gens charmants) et leur nombre, Jason s’endurcit vite et a très vite accès à tout un arsenal au fur et à mesure qu’il déverrouille des tours de communication lui donnant de bons point de vue sur la région alentour. Arsenal qui participe à la crédibilité du jeu d’ailleurs, car étant essentiellement composé de flingues trouvables au marché noir partout dans le monde (au fait, ils sont personnalisables) : AK-47, pistolets mitrailleurs yougoslaves, lance-flammes soviétiques déstockés, MKG rouillées, grenades issues d’arsenaux américains revendus… faites votre choix. Mais pour porter tout ça, il va falloir fabriquer des sangles, des cartouchières, des ceintures et des sacs en chassant la faune de Rook Island (avec le matériel de votre choix, ça comprend autant les flèches que les pains de C4, yerk yerk) avant de la dépecer. Et en cueillant la flore de Rook Island, vous pouvez distiller les plantes et concocter des seringues aux effets variés qui vont essentiellement servir à booster vos capacités.

Comme ce pavé a tendance à s’allonger, je vais me dépêcher et préciser aussi que le jeu comprend un mode coop, se déroulant quelques temps avant le parachutage des touristes sur Rook Island, mais sur une autre île de l’archipel, qui raconte l’histoire de quatre héros bien badass comme on les aime qui se sont mis en tête de rattraper le capitaine du bateau qui les emmenait pour lui mettre une grande quantité de plomb dans la peau, après que ce dernier ait eu l’outrecuidance de vendre son navire et tout ce qu’il transportait aux pirates locaux.
Et enfin un multijoueur, dont on n’attendait pas grand-chose (on ne l’attendait d’ailleurs carrément pas, Far Cry est un jeu solo) mais qui se révèle pourtant efficace avec plusieurs modes de jeu variés et des cartes aux ambiances tout aussi variées, qui retracent les affrontements entre les pirates de Vaas et les Rakyat.

Far Cry 3 n’est pourtant pas exempt de défauts. On pourrait cracher sur sa trop grande facilité, sur les quelques plantages, sur son histoire pas toujours très bien mise en scène, mais ça n’est rien à côté des dizaines d’heures que vous allez passer sur Rook Island à traquer le pirate dans la jungle luxuriante avant de chasser le tigre au lance-roquette. Far Cry 3 est la définition même du bon FPS, un jeu prenant et bien conçu qui permet de défourailler et faire le con autant que ça nous chante.
VlocipdeAquatiq
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le 18 févr. 2014

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