Enchaînant les critiques dithyrambiques lors de sa sortie en 2007, force est de constater que God of War 2 a pris quelques rides. Ça pourrait être une bonne chose pour un jeu dépeignant l’Antiquité, mais ça l’est moins pour un soft dont le but avoué est de proposer du spectacle titanesque.

Mais d’abord, revenons à God of War 1, qui a encore plus mal vieilli, avec son système de combat pauvre, ses environnements ternes et peu variés et son manque de caractère épique : un comble pour un jeu traçant l’histoire d’un héros (« fictif ») antique. Sa suite corrige heureusement le tir dans bien des domaines, et l’on ne peut que s’en réjouir : le jeu reste probablement le plus impressionnant graphiquement sur PS2, étant proche visuellement des premières productions PS3, et les développeurs ont enfin compris que c’était très bien d’avoir un jeu techniquement impressionnant, mais que l’effet était magnifié si on proposait au joueur des décors époustouflants, des combats spectaculaires et globalement une meilleure mise en scène. Fini les seules ruelles d’Athènes et les ternes grottes, place à de multiples temples qui font voir du pays, entre iles méditerranéennes, montagne enneigée avec un petit détour par les Enfers.

God of War fait toujours un peu n’importe quoi avec la mythologie dont il s’inspire, mais il a cette fois compris que tant qu’à faire dans les références sorties de nulle part, autant valait-il y aller à fond, et le jeu ne se privera donc pas d’introduire Persée, Thésée, Prométhée, Atlas ou encore les Moires, avec leurs attributs respectifs, et ce de manière plus ou moins incongrue. Et le scénario vire tellement dans le n’importe quoi, et dans les mélanges les plus improbables (le Colosse de Rhodes ou le Phénix rattachés à la mythologie grecque, pourquoi pas après tout…) qu’on finit par ne plus s’en offusquer, les combats ont le mérite d’être plus réussis, et surtout plus nombreux que dans le premier épisode, et ça fait plaisir.

Car le jeu est mieux rythmé que son aîné, et a pris conscience de son potentiel en scènes d’actions spectaculaires. Du coup, les combats ont beau ne pas être bien difficiles (les boss ont peu de patterns différents, et redonnent régulièrement de la vie à Kratos), ils sont plus marquants, et demandent un peu plus de talent que les simples affrontements contre le menu fretin. Ceux-ci mettent en lumière la pauvreté du système de jeu, toujours figé sur les mêmes bases que le premier épisode. A savoir, une arme principale efficace et qui permet d’enchainer des combos très efficaces sans beaucoup de doigté ou de précision dans le timing, des armes secondaires trop lentes, mais plus puissantes, quelques magies plus ou moins efficaces (ce qui fait que le joueur aura tendance à n’en utiliser qu’une ou deux différentes au cours du jeu), le tout magnifié par un système d’upgrade assez simpliste, et à mon sens peu pertinent, puisque les sommes colossales de points réclamées pour upgrader une arme/un pouvoir incitent surtout le joueur à toujours garder les mêmes. Et donc à le rendre prisonnier de la répétitivité du gameplay… Les ennemis ont beau être différents, la même stratégie de base s’appliquera à tous : un peu d’esquive quand un gros coup ennemi se prépare, sinon du bourrinage (amusant un temps, mais un peu crétin) fera l’affaire. Oubliez les combos, ceux de plus de trois coups ne doivent pas exister, et on en gagne un par amélioration d’armes, toutes les 2-3 heures de jeu.

Et donc on en vient à un point crucial : et si God of War 2 n’était pas un bon Beat Them All ?
Deux points : 1) Tout d’abord c’est un BTA au gameplay progressif, càd qu’on le fait plus pour suivre une histoire, découvrir un univers et se laisser porter par une direction artistique/un héros, que pour trouver un gameplay riche. Pour plus de précisions sur la question, je vous renvoie à un excellent test de God of War 1 : http://www.senscritique.com/jeuvideo/God_of_War/critique/25894563 2) Peut-être n’est-ce pas un bon BTA, parce qu’il souhaite surtout manger à tous râteliers, et proposer une expérience variée, qui grappille un peu dans les codes de plusieurs genres de jeux vidéo. Et c’est comme ça que je l’ai ressenti : un système de BTA du pauvre, une progression de « Metroïdvania », c’est-à-dire que Kratos acquiert chaque fois des nouvelles armes/capacités qui libèrent des chemins devant lesquels le joueur est déjà passé et qui étaient inaccessibles (mais sans le côté tortueux du genre), des donjons remplis d’énigmes et aux allures de temple, à la Zelda, mais sans la même qualité de level design et des phases de plate-formes anecdotiques, et surtout plombées par l’inertie improbable des sauts de Kratos (et sa capacité aléatoire à s’agripper aux rebords). Le tout avec une caméra dirigiste et incontrôlable, qui rend les retours en arrière très pénibles.

Le parti pris est clair : proposer de tout, n’exceller en rien, et proposer du coup une aventure marquante. Et elle l’est, c’est vrai que certaines scènes choquent tellement qu’on ne peut les oublier (pour ça, le 3 fera mieux), que certains combats parviennent à être vraiment épiques (et que l’achèvement du boss n’en devient que plus attendu) et que globalement, ce petit périple dans cette Grèce mythologique n’est au final pas désagréable (si ce n’est le Temple des Moires à la fin, qu’il est long et pénible !). Et ça fait de God of War 2 un bon jeu, un meilleur jeu que son aîné. Mais pas pour autant un jeu culte ou excellent à mes yeux, et vu sa réputation et l’accueil reçu à sa sortie, c’est quelque peu décevant.
Floax
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le 3 janv. 2014

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