Halo 5: Guardians
6.7
Halo 5: Guardians

Jeu de 343 Industries et Xbox Game Studios (2015Xbox One)

Fan incontesté de la série Halo depuis de nombreuses années, il va sans dire que chaque annonce d’un nouveau jeu de la saga provoque chez moi des déferlements d’impatience peu communs. Halo 1 et 2 font partie de mes jeux préférés, Halo 3 garde une place spéciale dans mon cœur malgré sa campagne décevante, ODST est sous-estimé (ouioui) et Reach avait permis à Bungie de dire adieu à son univers avec les honneurs. Halo 4, développé cette fois par 343 Industries, avait divisé la communauté. J’avais personnellement beaucoup aimé sa campagne, un peu obscure dans sa narration mais remplie de moments de bravoure, sublimée par une direction artistique inspirée et surtout osant transcender la relation entre son personnage principal (John aka Sierra 117 aka Master Chief) et son éternelle compagne : l’I.A. Cortana. Le charme des épisodes de Bungie n’était plus là, mais la relance de la saga était réussie et les attentes pour la suite étaient bien réelles.


Halo 5 avait basé toute sa campagne marketing sur l’idée de chasse à l’homme et le fait que le Spartan Locke était lancé à la poursuite d’un 117 traître et déserteur, promettant une confrontation au sommet entre les deux guerriers. Bon, mieux vaut le dire tout de suite : la vraie trame du jeu n’a pas grand chose à voir avec ce que les publicités promettaient (quoi ? des pubs qui mentent vous dites ?). Ce qui ne signifie pas que la campagne de Halo 5 est dénuée d’intérêt, bien au contraire. Là où Halo 4 reprenait le modèle de Halo 1 en mettant en scène un Chief débarquant seul sur un monde-artefact hostile, Halo 5 suit la voie du second opus. Le jeu alterne ainsi les points de vue de Locke et du Chief, un choix permettant de varier les plaisirs et de visiter de multiples lieux, plutôt que d’être confiné à un seul astre.


Concrètement, cette nouvelle campagne est très solide. Habilement rythmée, elle enchaine les moments spectaculaires et est l’occasion de constater que 343 n’a rien perdu de son sens de la mise en scène. La progression se construit en une succession de champs de bataille, remplis d’ennemis et offrant toujours une relative liberté quant à la marche à suivre. Les maps sont grandes, truffées de passages secrets et autres endroits à découvrir, et leur exploration est d’autant plus aisée que les possibilités de déplacement des Spartans ont été multipliées : on peut désormais grimper en s’agrippant à des rebords, dasher et enfin sprinter à volonté. Les zones de combat peuvent ainsi être abordées d’autant plus de manières : au joueur de choisir s’il préfère charger ou se placer en hauteur et prendre un avantage certain sur l’ennemi. D’autant plus que l’on n’est cette fois plus seul puisque chaque personnage principal est le leader d’une escouade de quatre Spartans. Vos camarades vous suivent sur le champ de bataille, peuvent recevoir des ordres simples (en gros, « on avance », « utilise ce véhicule » ou « attaque ce Grognard ») mais également vous soigner si vous cédez sous les balles ennemies, à la manière d’un Gears of War. Pas de quoi révolutionner la série mais ça ajoute une saveur supplémentaire aux affrontements. En parlant d’ennemis, peu de changements de ce côté, on retrouve la totalité des races Covenants, tandis que les troupes Forunners se voient rééquilibrées. Il en va de même pour l’arsenal : peu de nouvelles armes mais celles déjà présentes ont été améliorées.


La variété des lieux offerts est l’occasion de s’émerveiller devant une direction artistique toujours plus léchée, certains paysages sont simplement sublimes. Techniquement, le jeu n’est pas bluffant. On sent le changement de génération mais la différence avec Halo 4, qui poussait la 360 au bout de ses capacités, n’est pas énorme. A noter : la musique, très réussie. Kazuma Jinnouchi, impliqué sur la BO de Halo 4, est ici seul maître à bord et offre une partition inspirée, remplie de sommets émotionnels et relativement variée. Le compositeur n’hésite d’ailleurs pas à réutiliser certains des thèmes cultes de la saga, de manière intelligente et en les intégrant naturellement au reste de la bande sonore (càd plus subtilement que Halo 3 et son OST en forme de menu best of).


Quant à la trame, c’est peut-être l’un des points qui seront le plus sujets à débat. On peut apprécier son ambition, un choix relativement osé en ce qui concerne l’opposant principal, et sa non-linéarité. Comme Halo 2, l’aventure est l’occasion d’avoir une vision plus globale de l’univers. Les fans seront heureux d’enfin visiter le monde natal des Sangheilis (ou Elites) pour une série de missions constituant indéniablement le sommet de la campagne. Je louerai aussi le fait que, malgré un nombre assez important d’informations à assimiler, le tout est plus clair qu’un Halo 4 et n’attend pas forcément du joueur qu’il connaisse l’intégralité des romans dérivés sur le bout des doigts.


Mon principal problème viendrait plutôt de ce fameux choix de scinder l’aventure en deux points de vue. Je m’attendais, comme pour Halo 2, à ce que la trame soit divisée équitablement entre les deux protagonistes, mais on suivra finalement bien plus souvent Locke et l’Equipe Osiris que 117 et l’Equipe Bleue. Le choix n’est pas si idiot vu l’histoire racontée, et quelque part le fait de voir très peu le Chief alors qu’on est constamment à sa recherche permet d’iconiser encore davantage le personnage. Mais voilà : Locke n’a pas le charisme de celui qu’il traque, il n’est que l’observateur d’une histoire qui est avant tout celle de 117 et, surtout, il manque cruellement de personnalité. On est loin d’un Arbiter qui disposait d’un véritable background et dont le cheminement avait une certaine puissance dramatique [NB : je n’ai pas vu Nightfall, je me concentre sur la présence du personnage dans le jeu et uniquement dans celui-ci]. J’évoque Locke mais c’est l’entièreté des équipes Spartan qui me pose problème. Difficile de trouver quoi que ce soit de mémorable dans la Team Osiris, les équipiers s’envoient quelques piques mais trop peu de temps leur est consacré pour qu’une quelconque individualité ne ressorte (le syndrome des Nains dans Le Hobbit en somme). Le constat est un peu meilleur pour l’Equipe Bleue, le lecteur de La Chute de Reach sera heureux de retrouver Kelly, Fred et Linda, et certaines de leurs répliquent rappellent le lien très solide qui uni les 4 guerriers. Mais encore une fois, pas de véritable développement, les équipiers sont invisibles, leur présence est rassurante sur le champ de bataille mais leur implication dans l’histoire est inexistante. Bon je sais que Halo n’est pas un RPG et que je ne peux pas attendre du moindre PNJ anecdotique qu’il ait un background complet mais quand même. Notons aussi une fin en cliffhanger, parachevant ainsi le parallèle avec Halo 2. De nombreux éléments sont ainsi laissés en suspens et devraient logiquement être conclus dans l’ultime opus de la trilogie. Du coup, même si l’aventure est en elle-même assez dense, elle s’achève forcément avec un petit goût d’inachevé.


Ah oui et petit aparté sur la durée de vie. Bon inutile de vous le dire mais 343 s’est un peu payé la tête du monde en vendant une campagne deux fois plus longue que celle de Halo 4. Plus longue, elle l’est sans doute, avec plus de missions, mais en moyenne un peu plus courtes. Il faut quand même savoir que, sur les 15 missions proposées par le jeu, trois ne consistent qu’à se balader dans de petites zones ouvertes et aller taper la discu avec deux PNJ. C’est un peu malhonnête de vendre ça comme des missions, enfin ce n’est pas pire que les deux premières « missions » de Halo 2. Attention, je ne me plains pas, la durée du jeu est correcte et dans la bonne moyenne des Halo, mais encore une fois c’est une preuve qu’il faut aborder la comm autour d’un tel titre avec méfiance.


En ce qui concerne le multijoueur, il faudra sans doute un peu de temps pour en juger le plein potentiel. Pour l’heure, j’apprécie les améliorations de gameplay qui rendent le déplacement plus fluide que jamais, ça semble relativement fourni niveau modes de jeux, et en plus il y a la Warzone avec des maps bien grandes, des parties très longues avec variété d’objectifs, apparitions d’ennemis contrôlés par l’IA… A noter aussi un matchmaking très stable et des parties qui se lancent bien vite, on est loin des errances de la Master Chief Collection. Je dirais que le gros point noir pour l’instant se situerait du côté des maps (surtout en Arena), à la fois trop petites et assez peu marquantes, très orientées couloir urbain/industriel. Dommage, surtout vu la gueule des environnements de la campagne, il ne reste plus qu’à attendre l’arrivée du mode Forge avec possiblement un plus grand choix de maps. Ah oui et je déplore pour l’absence d’écran splitté, l’une des grandes forces de la licence jusqu’ici.


Halo 5 est donc la confirmation que la saga est entre de bonnes mains avec 343 Industries. Le jeu permet au studio d’enfin s’approprier pleinement la licence tout en faisant honneur à l’héritage de Bungie. Quelques soucis demeurent en campagne, et le temps nous dira si l’énième refonte du multi s’avèrera payante, mais dans l’ensemble le jeu est à la hauteur de ce qu’on pouvait en attendre.

Créée

le 1 nov. 2015

Critique lue 641 fois

4 j'aime

Yayap

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