Hitman 3
7.8
Hitman 3

Jeu de Io Interactive (2021PC)


  • Précision utile : ceci est une note globale sur le jeu et la trilogie World of Assassination entamée en 2016.

  • Précision utile 2 : j'ai retrouvé la boule à Z de l'assassinat avec le deuxième opus de cette trilogie. Puis j'ai ensuite fait l'acquisition du premier dans l'édition Game of the Year, j'ai donc eu droit à une version améliorée, exempte de certains bugs, affinée dans ses textures et sensiblement plus belle dans sa colorimétrie. Enfin, je me suis procuré ce chapitre final qui apporte également de légères modifications aux missions passées (notamment sur les reflets).


Après son collègue Snake qui a raccroché en 2015 (avec The Phantom Pain), c'est au tour de l'agent 47 de remiser la corde à piano aujourd'hui. L'occasion pour moi de me pencher sur le parcours du tueur au code barre, au détour d'une rétro sur mon expérience de joueur à son endroit. Je ne m'étendrai pas trop sur l'historique du chauve mortel et me contenterai de l'essentiel. La première vraie et grosse claque fut Blood Money en 2006. Si la chronologie situe la naissance de 47 à l'orée du deuxième millénaire, c'est sa quatrième aventure qui marqua ma mémoire au fer rouge. Le gameplay en gestation dans les précédents arrivait à maturité, le style était plus aiguisé que jamais, les terrains de jeux aussi variés que marquants, l'humour noir, la bande originale inoubliable. Dans mon imaginaire, l'infiltration avait maintenant deux univers. Le premier, celui de Metal Gear Solid : une approche cinématographique, sensorielle, fantastique, sauvage et philosophique. Hitman représente l'autre versant, plus ouvert, plus méthodique, plus élégant, plus macabre.
En 2012, IO Interactive tente un pas de côté avec Hitman Absolution, à bien des égards le volet le plus expérimental de la saga. Aux cartes imposantes et à la liberté de mouvements se substituaient une progression linéaire ainsi qu'une place plus importante consacrée à l'action (une optique plus en phase chez ses concurrents). Une évolution qui pouvait autant se vivre comme une régression, puisque beaucoup d'éléments constitutifs de la franchise pouvaient être perçus comme détournés à défaut d'être réinventés. Si la manœuvre était légitime, respectable dans sa singularité et ses tentatives, Absolution naviguait entre les fulgurances et la frustration. En dépit d'une réception critique globalement positive, ce volet de rupture a grandement - et à raison - divisé les fans. Il a voulu se démarquer et ironiquement on peut dire qu'il a rempli son contrat puisqu'on y fera plus référence dans les suites (ou plutôt le reboot). Le système de visée et le fameux instinct seront les seuls éléments repris (et retravaillés) de cet essai non-transformé.


L'année 2016 marque l'arrivée d'un agent 47 nouvelle génération mais de retour sur les bases qui ont fait son succès. Puis deux séquelles sorties à 2 et 4 ans d'intervalles, selon les mêmes règles. Nouvelles destinations, nouveaux terrains de jeu, nouvelles cibles, à vous de jouer. Les trois ensemble formeront ce World of Assassination.
À la rigueur, je serai tenté de mettre la mission d'entrainement à part puisqu'elle sert avant tout à se familiariser avec le gameplay. Vous me direz que le deuxième volet y va aussi de ce temps d'imprégnation tout en introduisant le récit avec l'infiltration d'une maison en bord de mer, le tout lové dans une ambiance nocturne et menaçante. Il est vrai que le numéro 3 optera également pour cette double-phase d'acclimatation du petit au grand bain avec Dubaï. Bref, en dehors de la toute première sortie dans les locaux de l'ICA, sûrement la moins intéressante (quoiqu'on s'amuse beaucoup à découvrir le nouveau brushing de Hitman), les cartes proposées sont incroyablement jouissives.
Disons le d'emblée, j'ai pris un plaisir monstrueux à jouer, re-jouer, re-re-jouer toutes les missions parce que tout a été pensé pour me le permettre. D'un côté, les développeurs vous mettent certains éléments à disposition (des intrigues, précisément), que vous pouvez choisir d'accepter ou non afin de vous mettre en jambes. De l'autre, vous pouvez décider d'explorer, d'écouter, de regarder et de monter des plans pour parvenir à vos fins. De prime abord, j'ai entamé le jeu avec le guide narratif laissé à mon attention par peur de me faire dépasser par les évènements. Progressivement, j'ai décidé de m'en émanciper. Vu la taille considérable de chaque carte, pour peu qu'on se prenne au jeu de les arpenter de long et en large, on repère tel ou tel objet apparemment laissé là innocemment ou en jouant les oreilles indiscrètes pour capter une information cruciale. C'est un peu la même sensation qu'effectuer un puzzle. La taille pourrait décourager, car en plus du décor vous avez aussi des défis (optionnels). Mais plus on y retourne, plus on obtient de pièces. L'air de rien, on en imbrique de plus en plus jusqu'à recomposer le tableau final. Prise séparément, je dirais que chaque étape demandera au moins 4-5 heures pour être complétée à 100 %.
Ce qui pourrait passer pour une gageure chez certains est depuis longtemps un sacerdoce chez les fans du croque-mort jamais décoiffé. Un meurtre parfait, ça se travaille. Et si on peut l'obtenir avec différentes contraintes (pas de déguisement, pas d'alarme, pas de preuve, pas de victime innocente, pas d'arme à feu, etc...), je vous laisse imaginer la jubilation à l'arrivée. D'autant plus que vous avez un réservoir quasi-inépuisable de possibilités. Vous pourrez tirer, pousser, noyer, poignarder,empoisonner, électrocuter, empaler, briser, faire sauter, etc... Sans oublier les savoureux "accidents" dont l'agent 47 s'est fait une spécialité avec les années. Croyez-moi, les stratagèmes insolites employés dans World of Assassination n'ont rien à envier à Blood Money en termes d'ironie, de violence ou d'absurde. IOI a eu bien assez des 4 coins du monde pour imaginer les mises à mort les plus abracadabrantes de la série.
Les destinations de notre Terminator tirés à 4 épingles sont d'ailleurs l'autre élément qui concourt à faire de cette trilogie un chef-d'œuvre. Chacune à sa propre topographie, sa propre marque et sa propre ambiance. Bien sûr, on aura toujours ses préférences mais on oubliera aucun des endroits visités. Sur ce point, j'estime que le plus réussi est le troisième. Il est à la fois la synthèse et la correction de certains éléments qui pouvaient désarçonner à quelques passages des deux premiers volets. Attention, en disant ça je ne minimise pas les qualités immenses des prédécesseurs. Je les considère d'un niveau égal dans leur conception. Si le dernier opus n'a plus grand chose à proposer question gameplay (en dehors de son appareil photo/scanner) il prend un léger avantage en poussant le concept dans ses retranchements. Dans une mission vous ferez la chasse aux indices, dans l'autre c'est vous qui choisirez vos cibles parmi une ribambelle, et même le grand final casse la routine avec une linéarité bien vue même si plus classique. Cette conclusion est la partie la plus aboutie artistiquement. Si vous aimez le cinéma vous allez être servi entre Mission : Impossible, À couteaux tirés ou Blade Runner, c'est un vrai régal pour les yeux et les oreilles (les reflets ou effets de réverbération sont hallucinants), sans oublier les nombreux clins d'œils ou rappels à TOUS les anciens volets. Après, sachez je considère la cuvée Hitman 2016 et 2018 comme d'un très haut niveau, c'est dire. En dernier lieu, sachez que la musique composée par Nils Bye Nielsen est de très bonne tenue. Passer derrière la bande originale iconique de Jesper Kyd qui faisait littéralement fusion avec le personnage principal et l'esprit Blood Money, bonjour le cadeau. Si elle n'est pas aussi entêtante que son ainée, la direction musicale se fond bien avec la trilogie. Ce qui est déjà très bien.
Je ne trouve que trois défauts, et l'un n'en est pas réellement un à mes yeux. Le premier tient à cette gestion des fusillades pas forcément très adroite. Mais d'un autre côté, je doute qu'on vous recommande Hitman si votre but c'est d'y aller comme un fou de la gâchette. Absolution était plus orienté pétoires et explosions, mais l'ADN de la licence c'est en premier lieu l'infiltration, la discrétion, les costumes (du plus évident au plus décalé) puis j'ajouterai la pincée d'humour. Le deuxième point noir concerne la narration qui dans le premier mettait longtemps à démarrer, puis était légèrement desservi par des cinématiques en images figées dans le deuxième (surprenant, puisque celles du premier étaient de grande qualité). Dans le dernier, la boucle est bouclée mais force est de constater que l'histoire n'occupera pas les esprits bien longtemps (à la différence d'un MGS). Enfin, je dénote un peu plus de bugs dans troisième (disparition d'items, interactions parfois bizarroïdes d'un PNJ avec l'environnement). IOI envoie des correctifs dans les mois suivants la sortie, donc on peut s'attendre à des améliorations mais bon, c'est parfois surprenant. Dans l'absolu, ces réserves sont minimales tant le potentiel de "rejouabilité" est immense et qu'on se surprend souvent à retourner au feu rien que pour mettre une nouvelle idée en application. Je n'oublierai pas non plus les défis sniper ou les "escalades" (pour les versions deluxe), qui proposent quelques petits contrats/histoires indépendantes bien corsées : Patient Zéro (énorme), l'Icône (hilarant), le Politicien, Collectionneur de Noël, etc...


Dans ce versant de l'infiltration, l'agent 47 préside le genre. Il s'offre un ride en trois parties parfaitement synchrones, toujours plus impressionnantes. Ce fut un privilège de l'accompagner, une joie monstrueuse de le diriger et un petit déchirement de le regarder partir. Pour en finir, je ne résiste pas à l'envie de livrer mes notations sur les destinations.



  • Mes préférées : Paris, Sapienza, Hokkaido, Miami, Dublin, Chongqing, Mendoza

  • Mention très bien : Whittleton Creek, Île de Sgàil, Dubai, Dartmoor, Ambrose Island

  • Mention bien : Marrakech, Bangkok, Santa Fortuna, Bombay

  • Pas mal : New York, Ile Haven, Colorado
    Je mets Hawkes Bay à part. Moins fourni comme niveau mais une superbe introduction pour quelqu'un qui n'avait plus joué à un Hitman depuis 2012/2013 avec Absolution.

ConFuCkamuS
9
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le 17 mars 2021

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