Mass Effect est typiquement le jeu qui attire l'attention, au-delà de ses qualités intrinsèques, grâce aux promesses qu'il laisse entrevoir. Un jeu de rôle/action dans un univers SF, un space opéra avec un vrai scénario et un univers riche, une lueur d'exploration de mondes inconnus... tout cela ne fait que former un pouvoir d'attraction entretenu par l'inévitable "hype" d'Internet. Mais le plus dur avec les promesses c'est de les tenir ; le plus frustrant avec les espoirs c'est d'être déçu. Qu'en est-il des promesses et des espoirs portés par Mass Effect ?

Le jeu de Bioware se démarque du commun des autres produits vidéo ludiques par son univers fouillé, dense, crée de toute pièce mais avec une rigueur encyclopédique et un talent indéniable. Chaque race extra-terrestre voit son histoire développée, à ses caractéristiques propres, voir un langage propre et c'est un réel plaisir pour le joueur de les côtoyer et d'évoluer à leur côté.
Cette richesse est bien entendu toute aussi présente dans les décors, les termes employés, les situations politiques et sociétaires... et le scénario. Celui-ci est parfaitement amené et développé au fil du jeu, il sait réserver son lot de surprises sans pour autant verser dans le ridicule et le grandiloquent et, bien qu'assez convenu dans le fond (place des humains dans la galaxie, plan de destruction de peuples, asservissement, équilibre entre diplomatie et force militaire...), il n'en demeure pas moins un modèle pour tout jeu vidéo qui se voudrait scénarisé un tant soit peu.
Mais un bon univers et un bon scénario ne sont que secondaires si l'immersion n'est pas présente. Heureusement Mass Effect tire là encore son épingle du jeu grâce un système de dialogue ludique, qui certes reste un peu binaire (ou plutôt trinaire), mais qui permet d'en apprendre plus sur l'univers du jeu. Et d'afficher sa personnalité (plutôt pragmatique ou charmeur) !
L'atout principal servant l'immersion du joueur est la découverte et le parcours au sein de la citadelle pendant la première partie du jeu. C'est un doux rêve qui se réalise, que de parcourir une ville de bonne taille, d'interagir avec ses habitants, humanoïdes ou non, d'y réaliser des quêtes annexes... avant de grimper dans son vaisseau pour partir à l'aventure, lâché dans la galaxie.

Et là sans aller jusqu'à dire que c'est le drame, la déception prédomine. En ouvrant la carte l'on découvre des destinations nombreuses qui se découpent en secteurs et sur lesquels l'on trouve plusieurs planètes. Triste masque...
La majorité des endroits sont inabordables, beaucoup de planètes n'ont droit qu'à un descriptif (détaillé certes !), d'autres sont justes analysables (pour en retirer des matières servant l'accomplissement d'une banale quête annexe). Et celles qui sont à la portée du joueur se divisent encore en deux catégories : celles que l'on peut parcourir en véhicule et celles où notre vaisseau vient s'amarrer et que l'on découvrira à pied.
Les premières susnommées sont... désertes ! On y circule dans un buggy à la physique déplorable, buggée qui agace prodigieusement au bout d'un certain temps. Il n'y a rien à y faire d'autre que de chercher un chemin praticable pour notre Mako parmi des chaines de montagne difficilement franchissables. Et de temps en temps l'on tombe sur des débris ou des gisements à analyser, souvent après s'être prêté à un petit jeu de décryptage qui devient vite répétitif tant il sert à ouvrir toutes les choses du monde de Mass Effect (casiers, containers, ordinateurs...). Et puis l'on découvre l'unique bâtiment de la planète, repaire qui servira l'accomplissement de notre mission secondaire.
Et là c'est vraiment le drame ! La structure du complexe ("lol" diraient certains) est identique d'une planète à l'autre, elle est ridiculement petite (même lorsque l'on vous annonce que c'est un poste avancé Gethe qui annonce la préparation d'une possible invasion... en fait c'est un bunker minable avec une dizaine de robots dedans !) et il n'y a rien à faire d'original à part tuer tout le monde et récupérer des armes et objets de customisation.
Cette partie équipement est par contre assez satisfaisante avec le choix d'armes dans quatre catégories (pompe, assaut, pistolet et snipe), de grenades, d'armure et d'ampli biotique (pour les pouvoirs). A ces armes/armures l'on peut adjoindre des mods qui augmenteront/diminueront les capacités des équipements. Un bon point donc qui se retrouve dans le développement des capacités du personnage, auquel l'on distribue des points obtenus au fil de la montée en niveau. Ces points peuvent servir à l'amélioration des statistiques globales de notre avatar (sa santé, sa défense, sa précision au tir...) et lui faire acquérir des nouvelles habilités au gré des paliers franchis.

Les planètes importantes pour le déroulement du scénario ont droit, elles, à des phases plus longues et intéressantes, où l'on peut déambuler... mais guère plus librement. Une fois notre vaisseau à bon port, l'on est en effet cloisonné dans un niveau au level design insipide. Heureusement l'on retrouve des phases de dialogues aux doublages très réussies et quelques idées bienvenus pour apporter un peu de variété à l'aventure (comme ce passage où l'on ne doit pas tuer de civils mais les neutraliser à l'aide de grenades spéciales). Car les combats soufflent le chaud et le froid. Pour certains moments intéressants où l'on se cache derrière le moindre obstacle, où l'on contourne l'adversaire pour l'ajuster, où l'on explose des containers pour les brûler... combien de moments lourds de répétitivité où l'on tir sur les ennemis à bout portant, gêné devant leur intelligence artificielle déplorable (sans parler de celle de nos alliés !), combien de frustrations devant l'absence de boss alors que la situation le laissait présager ? Et quand il y a bien un boss... le combat est ridicule et peu intéressant en termes de sensations (cf. le boss final) ! Ce manque d'impact dans les combats n'est pas dû qu'à l'I.A. mais bien aussi aux coups de feu en eux-même qui donnent l'impression de manipuler des jouets, aux effets ratés des pouvoirs et l'animation foireuse des ennemis.

Au rayon technique le constat est tout aussi mitigé. Les textures parfois bluffantes sur les personnages, les décors joliment mis en valeur par moment, l'immensité (trompeuse) qui se dégage parfois de certains, contrastent avec le manque d'expressivité des visages, les retards d'affichage et... le trop plein de bugs. Cela touche principalement le côtés sonore du jeu qui est de ce point de vue là mal fini. Beaucoup trop de passages sont gangrénés par des altérations ou des disparitions de sons/voix. Dommage car leur qualité est remarquable. Mention spéciale aux musiques !

Mass Effect ne tient donc pas toutes ces promesses, loin de là, et bride les possibilités du joueur à coup de couloirs et d'objectifs redondants. Quant aux espoirs suscités, ils se trouvent moyennement comblés, la faute à un système de combat banal et ne procurant que trop peu de sensations fortes, et à une exploration galactique limitée.
Pourtant, à certains moments, le jeu de Bioware atteint le grandiose (Virmir, la fin), porté à bouts de bras par une histoire passionnante (qui "oblige" à découvrir sa suite), des dialogues interactifs et immersifs, un côté RPG satisfaisant et surtout ces choix moraux et/ou stratégiques qui confèrent un côté mémorable à certaines scènes.

Rien que pour ces derniers éléments Mass Effect à l'esprit d'un grand jeu. Dommage qu'il n'en ait pas la carrure.
ngc111
6
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le 28 avr. 2011

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ngc111

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