Metal Gear Solid. Ces quelques mots représentent pour une portion de l'humanité le souvenir attendri des tentatives répétées d'Hideo Kojima de croiser cinéma et jeu vidéo de manière inédite. Une démarche qui l'aura occupé près d'une vingtaine d'année et nous amène par ses derniers échos… à devoir nous payer une démo.

La démarche fait pourtant sens d'un pur point de vue capitaliste : Konami a consenti des investissement gargantuesques sur ce projet et compte bien en tirer chaque centime. De plus, tout le monde sait que dans l'univers des fans les plus vaillants sont ceux de Snake. Cela va sans dire, voyez leur physique ravageur et leur fascination presque maladive pour les tanks atomiques. Leur capacité innée a survivre à l'impossible tout en n'ayant pour seule protection qu'une caisse en carton. Même leurs tentatives répétées d'expliquer de manière maladroite - pendant des heures, à qui veut l'entendre - pourquoi Kojima est un génie laissent pantois. (Certains en ont d'ailleurs tiré une carrière parfois lucrative dans le domaine du "journalisme" de jeu vidéo). C'est simple : ces soldats de l'esprit n'attendent qu'un signe de leur charismatique leader à lunettes pour se lancer dans la brèche. C'est pas magnifique tant de ferveur?

Tel est d'ailleurs le sentiment qui a persisté dans le fief des médias autour de cette introduction payée un pont. Certains se sont empressés de ridiculiser l'effort pour sa brièveté. D'autres ont sainement souligné que décidément le jeu était fort bien réalisé; aussi bref soit-il. Tous ont raté le point crucial : cela fait des années que l'on paye des démos et tout ceci ne devrait surprendre personne. Beaucoup d'entre nous n'ont acheté Zone of the Enders que pour la promesse de quelques instants révélateurs susceptibles de nous apprendre ce qui allait se passer dans ce mystérieux Tanker. Fut un temps, nous achetions des magazines discutables pour avoir accès à ces amuse-gueules par le truchement magique d'un disque laser. Or, à notre époque, la guerre a changé. Le consommateur a envie d'avoir accès immédiatement à ce qu'il aime et cela quitte à devoir payer le prix fort pour qu'on aiguise sa faim.

Nous retrouvons le Big Boss à quelques encablures des aventures vécues lors de Peace Walker. Borgne, avisé, entrainé a sonder si décidément l'amour est en train d'éclore sur le champ de bataille; ce Snake originel sait qu'il donnera a ses clones du fil à retordre. Il est bien loin de leur look taillé à la serpe; de leurs effets cinématographiques où nul ne bouge la moindre lèvre. Ici vous devrez infiltrer le Camp Oméga - surprise, surprise - une minuscule île où se trouvent des prisonniers qui tombent sous votre responsabilité. C'est à vous de les ramener au bercail afin qu'ils puissent vous délivrer des informations inédites qui vous mèneront à l'énigmatique Cipher. Un nom dont on ignore même s'il désigne quelqu'un. Pour ce faire, vous aurez accès à un hélicoptère, des armes et le soutien inconditionnel des votre petite troupe de mercenaires… les Militaires Sans Frontières.

Cette aventure est une dose minuscule d'un alcool phénoménal. Elle se vit d'une traite, cul sec. Son but est simple : vous apprendre à jouer au MGS nouveau modèle. Et elle s'acquitte de cette tâche avec une aisance désarmante. L'on se prend à rechigner au début certain d'être floué par la brièveté de l'échange. Pourtant, pad en main, l'on sent la puissance canalisée de Kojima. Ce n'est pas pour rien qu'il est spécialiste des jeux, Hideo. Il sait ce qu'il fait. Des scories de sa jeunesse il tire l'un des systèmes de jeux les plus prometteurs de cette génération. Son approche semble plus mesurée, plus délibérée. Il aura par exemple été jusqu'à se passer de codecs; si c'est pas un changement de fréquence. L'ouverture de l'action traditionnelle de la série aux nouveaux tics modernes de l'open-world offre au joueur habitué à manier Snake une expérience singulièrement nouvelle : celle d'être sur un champ de bataille. Jamais l'on ne se sent dirigé. Jamais l'on ne sent perdu. Mais à chaque instant l'on se sent vivant, pris dans un univers hostile contre lequel vos techniques d'antan ne suffiront pas. On nous l'avait promis, mais cette fois-ci, c'est fait : la guerre a changé. Pour le mieux.

Après toutes ces années cette série reste la plus polarisante de l'histoire vidéoludique. Jamais produit de haute qualité n'aura été simultanément autant aimé et conspué pour ses qualités intrinsèques. Il est évident que cette première tranche de l'aventure Metal Gear Solid V ne se fait aucun cadeau en arborant un prix aussi élevé. Mais qu'importe le prix, pour peu qu'on ait l'ivresse?
MaSQuEdePuSTA
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le 28 mars 2014

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