Déstabilisant sur bien des points, MGS V peut très vite se faire détester si on est pas sensible aux nombreux messages que Kojima veut nous faire passer avec cette aventure qui prend à contre-pied tout ce à quoi nous avons été habitué. Voyons un peu le tableau :
MGS 1, 2, 3, 4 , c'est une narration hyper maîtrisée, un gameplay
dense mais pas très souple, beaucoup d'intérieurs et des éclairs de génies dans les phases
de jeux qui ont marquées des générations de joueurs.
MGS V, c'est une narration très en retrait, laborieuse à parcourir au
travers des cassettes notamment, un gameplay aux petits oignons dans
un monde ouvert et très peu de grand moments de jeux (mission 43,
on pense à toi, la Maison du Diable aussi on ne t'oublie pas). C'est
un jeu sandbox ou le joueur génère sa propre aventure. C'est un jeu
qui offre à celui qui demande.
Et tout ça ne pose aucun soucis au fond, même dans un jeu tronqué. C'est là le coup de génie de Kojima selon moi. Le message du jeu ne concerne pas les quelques trous de scénarios qui pouvaient encore exister dans la vaste saga MGS, ni l'obsession de nous balancer une ribambelle de nouveaux personnages. La conclusion qu'avait besoin d'apporter MGS V n'était pas pour l'histoire de la saga, MGS IV, la conclusion chronologique, fait très très bien cela.
La conclusion qu'avait besoin d'apporter MGS V était pour le joueur. Et en ce sens, lui laisser incarner réellement Big Boss est un clin d'oeil assez génial. Réellement car on aura jamais été aussi proche d'incarner ses choix et ses actions que part la création de notre avatar qui deviendra Big Boss Phantom. Après tout, c'est ce que Big Boss nous dit à nous, joueur, directement. Big Boss n'est qu'un titre que l'on accepte de porter est d'honorer. Le Big Boss que le joueur incarne est tout aussi valable que "l'original" et définit tout aussi sa légende. Est-ce que c'est sa génétique, ce qui le prédispose, qui définit un homme, ou ses actions ? Comme pour faire écho à toute l'histoire de Solid Snake.
Et d'un coup la construction en missions à la carte du jeu prend enfin tout son sens pour laisser réellement les commandes au joueur et ne pas lui imposer un déroulé prédéfinit. Pourtant Dieu sait que j'ai détesté ce coupage des missions dans Peace Walker. Même les quelques missions principales qui reviennent à la fin du jeu prennent sens quand on réfléchit au message derrière. En effet pourquoi Kojima nous ferait rejouer 5-6 missions que l'on a déjà parcourue dans un jeu déjà aussi long ? Ce n'est pas la volonté de rallonger la durée de vie, mais plus celle de trahir la boucle dans laquelle est enfermée Big Boss, une boucle de violence, dont il n'a peut-être plus conscience ou qu'il n'arrive pas à stopper.
Une conclusion parfaite pour le joueur. Un adieu en bonne et due forme. La mission 51 aurait permis de conclure sur un affrontement, mais ce n'est franchement pas ce qui va nuire au jeu. Un aurevoir en douceur, c'est bien aussi.
Reste à tirer mon chapeau à Kojima qui a réussi à créer un bloc de jeux-vidéo cohérent d'un bout à l'autre sans laisser d'inconnus majeurs dans l'histoire. MGS V se met en danger et ne reste pas sur ses acquis, et il le fait pour le mieux. Dans le cadre d'un Konami hostile qui force le rush du développement, c'est tout simplement un petit miracle.