Octopath Traveler
6.9
Octopath Traveler

Jeu de Square Enix, Acquire et Nintendo (2018Nintendo Switch)

S'il y a bien une tendance indéniable depuis quelques années c'est celle de la nostalgie. Cinéma, Jeux vidéo, musique... Tout y passe ou presque. Comme si chaque produit culturel devait fleurer bon l'enfance et le doux fumé des cookies sortant du four préparé par mamie.
Square Enix, pas plus bête que les autres surtout lorsqu'il s'agit de vouloir faire du cash, l'ont bien compris. Ils ont alors mis en chantier quelques titres ayant pour vocation de caresser cette fibre et notamment les JRPG des années 90. Apres un I Am Satsuna(ze) et un Lost Sphear plus que moyen, le moment était venu de redresser la barre. Ainsi c'est Acquire qui s'y colle et notamment l'équipe de Bravely Default. Et ce petit rejeton arrivera sur Switch sous son nom de code "Octopath Traveler" tel qu'annoncé début 2017.

Une promesse : Celle d'un JRPG a l'ancienne, en 2D, inspiré directement du sacro saint Final Fantasy VI. Rien que ça.


OCTOPUS


Une histoire tentaculaire : 8 personnages. Chacun ayant sa propre destinée.


Le jeu se découpe en 32 chapitres soit 4 par personnages. (Les mathématiques sont implacables.) Vous choisissez votre personnage principal en début de partie ce qui aura pour conséquence de devoir le garder dans votre équipe de 4 pour la quasi totalité du jeu (jusqu'à accomplissement de ses 4 chapitres exactement). Vous commencez le chapitre 1 de ce personnage, le bouclez, puis ensuite vous partez jusqu'à la prochaine bourgade rejoindre l'un des autres héros (dans l'ordre que vous souhaitez). Il vous raconte alors son histoire à lui et vous l'aidez à accomplir son premier chapitre également. Et ainsi de suite.


Le jeu donne l'illusion de pouvoir faire les chapitres dans l'ordre voulu cependant dans les faits, l'écart de niveau entre un chapitre 1 et un chapitre 2 vous "suggère très lourdement à juste titre" d'accomplir tout les chapitres 1 puis tout les chapitres 2 etc...


8 histoires et donc forcément, on pourra constater une inégalité qualitative selon les personnages. Selon votre affect vous serez obligatoirement charmés par certains et dubitatifs face à d'autres. Mais s'il y a bien un point sur lequel on ne peut faire de reproches à cet Octopath Traveler, c'est bien sur la variétés de nos héros. Olberic, Cyrus, Tressa, Ophilia, Primrose, Alfyn, Thérion, H'aanit forment via la première lettre de leurs prénoms OCTOPATH.
Ténébreux, Enjouée, Torturée, Erudit, Taciturne, ou encore Volontaire, chacun d'entre eux incarne un trait de caractère majeur. Et la ou le jeu se démarque et dévie de la sacro sainte tradition, c'est dans l'individualisme qui caractérise ces tranches de vies.


La composition d'une équipe de 4 est ici présente à des fins mécaniques, systémique. La trame narrative vous racontera 8 voyages solitaire. Point de grand bavardage d'une équipe qui apprend à se connaitre, ni d'interactions entre les personnages (hormis quelques brèves scénettes facultatives comme le propose la série des Tales of notamment...), ni même encore de liens entre leurs quêtes respectives. C'est un sentiment un peu déboussolant quand on est habitué au JRPG traditionnel et ses codes. D'autant plus quand la communication du titre vante un retour aux sources salvateur.


La vrai question est de savoir si cela constitue un réel problème ? Concrètement je serai tenté de dire non. Il faut percevoir cet Octopath Traveler comme une ode au voyage. Et l'aspect "quête solitaire" de l'ensemble confère au jeu son identité propre, sa philosophie. Mais cette réponse est la mienne et il est bien difficile de l'affirmer ou l'infirmer de façon radicale tant ce point est subjectif.
Si pour vous un JRPG c'est forcement une bande d'ados qui vont sauver le monde d'un grand méchant caricatural alors cette brochette d'aventures éparses pourrait vous laisser un arrière gout et une impression de "manque d'enjeux". Les quêtes personnelles d'Octopath Traveler relèvent plus de l'évolution d'un individu au travers de son voyage. Les enjeux sont intérieurs et propre à chaque protagoniste.


Enfin au delà d'une éventuelle vision d'auteur sur ce choix narratif il faut aussi prendre en compte le support choisi pour sa création. La machine hybride de Nintendo invite à alterner des sessions courtes (en portable) et d'autres plus longues (sur écran) et c'est probablement dans cette optique que le jeu a été conçu via un fractionnement de sa trame en chapitres. De l'aveu même des développeurs , le jeu vise un public qui jouais déjà aux JRPG dans les années 90 et donc trentenaire aujourd'hui. Un public qui par conséquent peut avoir du mal à trouver du temps pour jouer et qui pourra ainsi le faire le temps d'un chapitre sans perdre le fil d'une trame narrative trop dense.


FINAL MEGAMI SACS A PV


Au niveau du système de combat le jeu offre un tour par tour à la fois classique, efficace et addictif.
Il est une sorte de fusion de celui de Final Fantasy X et celui des Shin Megami Tensei.


Explications :


Les combats interviennent de façon aléatoire et votre équipe affrontera les créatures hostiles chacun son tour. En haut de l'écran apparaît une timeline qui vous indiquera l'ordre des tours (héritée de FFX donc). Chaque ennemi aura un logo avec un bouclier comportant un chiffre ainsi que des cases (masquées dans un premier temps) comportant un point d'interrogation. Ces cases masquées correspondent aux faiblesses des ennemis qu'il vous faudra trouver. Une fois cela fait, la faiblesse restera apparente et cela, à chaque fois que vous rencontrerez une créature du même type. Chaque coup porté exploitant une faiblesse fera descendre le chiffre du bouclier qui, une fois arrivé à zéro, cassera le tour de l'ennemi l'exposant ainsi à de gros dégâts (hérité de Shin Megami Tensei).


Exemple : Une créature apparaît avec un bouclier de 3 points. Vous tentez une attaque à la lance et il se trouve qu'ils s'agit la d'une de ses faiblesses. Le bouclier passe ainsi à 2 points. Vous choisissez soit d'exploiter cette faiblesse ou d'en trouver une autre et une fois le bouclier à 0 l'ennemi est vulnérable et ne jouera pas au tour suivant.
Ce système comporte l'avantage d'être à la fois intuitif et grisant.


Chaque protagoniste a sa classe par défaut, il sera possible au fur et à mesure du jeu de lui en attribuer une deuxième afin de les rendre plus polyvalent et créer sa team sur mesure via compétences actives et passives. Cela est possible en s'éloignant des chemins et en visitant des temples optionnels qui débloqueront les classes en question.


Sachez que si les ennemis lambda ne manqueront pas de trépasser rapidement, les combats de Boss eux, demanderont à la fois préparation et maîtrise du système. En effet ces derniers sont de véritables sacs à Pv ambulant étirant ainsi les joutes jusqu'au point de rupture. Véritable morceau de bravoure, il ne sera pas rare de les terrasser in-extremis en jetant quelques jurons pour relâcher la pression. D'ailleurs méfiance quant au niveau recommandé de chaque chapitre. Visez quelques niveaux au delà pour réellement être de taille.


Cette difficulté à l'ancienne est à mon sens un point positif tant la satisfaction de terrasser un boss est un bonheur. Mais ce point est également tout à fait subjectif et pourrai au contraire rebuter les aventuriers les moins aguerris/motivés.


VENEZ COMME VOUS ETES


Chaque personnage possède une compétence qui lui est propre. Elles vous seront bien souvent utile dans les villes et villages. Par exemple les capacités voler et acheter vous permettront d'obtenir des objets auprès du moindre villageois croisé (le vol via un % de réussite, l'achat permettant par exemple de monnayé les objets difficile à subtiliser...). Vous pourrez également recruter des personnages temporaires, en provoquer d'autres en duel pour gagner de l'expérience ou encore obtenir des infos cruciales.... ou inutiles ! Ni gadget, ni vitales, ces compétences pourront vous permettre d'étoffer votre jeu si vous en prenez le temps (acquisition d'équipements, ristournes etc.)


LE GUIDE DU VOYAGE AUDITIF ET AUTRES DÉLICES VISUELS


Graphiquement le jeu est plus qu'agréable mêlant une 2D fouillée à des effets 3D implantés avec subtilités. C'est un véritable plaisir d'avoir ce genre de jeu sur la Switch. Mention spéciale aux designs des Boss contribuant à les rendre encore plus redoutable. On pourra en revanche être déçu des villes et villages sans véritable personnalités et finissant par toutes se ressembler.


Du coté audio nous sommes face à une des plus jolie OST de 2018. Une véritable lettre d'amour aux ténors du genre. Nombre de thèmes sont marquants, mélodique. De plus le jeu se paie le luxe de proposer des musiques de combats différentes à chaque chapitre évitant ainsi la répétitivité musicale du genre.


LA MAGIE TANT QUE LES FICELLES SONT INVISIBLES


Alors que reprocher à cet Octopath Traveler devant une plume aussi enjouée que la mienne ?
En dépit de ses nombreuses qualités, on pourra tiquer sur la composition de l'ensemble en terme de rythme et aussi de répétitivité. Car si des séances de jeu allant de 45 minutes à 1h30 sont digestes, il sera peut être plus difficile de garder cette enthousiasme au delà. C'est dans de longues sessions que les ficelles deviennent trop voyante et casse ainsi la magie. Comme si le tout devenait très schématique, mathématique. Cette sensation me renforce dans l'idée que le jeu est conçu pour les "fans de JRPG à l'ancienne n'ayant plus le temps".


Egalement un gros bémol sur le Endgame pas du tout convainquant, essayant de raccrocher les wagons et de lier les personnages avec maladresse via un donjon ultime nécessitant des heures de levellings. Je trouve que cet ajout a la forme d'un gros doigt d'honneur à la philosophie du titre et est superflu. Le jeu se suffit amplement à lui même.


AU BONHEUR DES SENS



  • Il flatte la rétine.

  • Sa partition musicale est d'une propreté et d'un respect de ses pères
    admirable.

  • Il sent la nostalgie à plein nez.

  • Il effleure du doigt l'excellence de ses ainés

  • Il laisse un tout petit gout d'inachevé.


Mais quand même... qu'il est difficile de donner un avis sur cet Octopath Traveler. Beaucoup de ses caractéristiques et la réception qu'elles auront chez vous dépendront de votre bagage culturel dans le JRPG et ce que vous y cherchez exactement.
Les développeurs l'avaient annoncés et ils n'ont pas mentis, le jeu respecte bon nombre des pré requis de ce que fut le genre dans les années 90. Une 2D riche et séduisante, un système de combat à l'ancienne, une OST très mélodique, une difficulté qui demande de grinder (du moins sur la première moitié de l'aventure)...

S'il était sorti sur Snes ou Psone il aurait fait partie des jeux marquants de l'époque lui aussi sans nul doute. Aujourd'hui face à une offre toujours plus large et un public ultra informé, Octopath divise. C'est le rookie qui regarde ses aînés dans les yeux sans baisser le regard. Il est à l'image de ses personnages face à un de ses monstrueux Boss. Il aurait presque pu le vaincre ce boss. Mais il lui faudra revenir mieux préparé dans un potentiel Octopath Traveler 2 avec ce petit truc en plus cette fois... Moins schématique, plus homogène. Et mon 8 de cœur prendra le dessus sur le 7 de la raison...


Le JRPG où le voyage compte plus que la destination.

Joo-Hwan
7
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Journal d'un dévoreur de J-RPG

Créée

le 17 sept. 2018

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8 j'aime

6 commentaires

Joo-Hwan

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8
6

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