Outlast 2
6.5
Outlast 2

Jeu de Red Barrels (2017PC)

Tu prendras ton meurtre d'enfant avant ou après ta douche de sang et de caca ?

Le premier Amnesia sorti en 2010 a entrainé la mode de ce que j'aime appeler les "Trains fantômes pour youtubeurs". A savoir des jeux-vidéo d'horreur FPS sans mécaniques de combat, où l'on enchaine les environnements fermés dans lesquels on doit effectuer diverses tâches tout en évitant un méchant monstre/psychopathe qui nous tue en 2/3 coups, et qu'on saupoudrera régulièrement de divers screamers aléatoires pour conserver l'attention du spectateur/joueur. Une formule simple, épurée, très facile à prendre en main pour n'importe quel joueur, et qui offre un divertissement immédiat pour les spectateurs puisque leur youtubeur préféré ponctuera allégrement de "AAAAAAH", de "MEEEERDE !" et autres "Mais j'en peux plus, y sont trop fous..." ses parties filmées. Si au départ, ce n'était qu'un cas isolé, c'est rapidement devenu une mode de créer des jeux dans ce style pour capitaliser sur le succès des Let's play et de Twitch.
J'ai l'air cynique, mais c'est simplement que ce type de jeu me semble bien souvent formaté pour Youtube, ce qui fait qu'ils sont moins pensés pour les joueurs en tant que tels, mais plus pour le divertissement des spectateurs des plate-formes de streaming, et je ne suis pas vraiment le genre à penser qu'un jeu-vidéo devrait être un spectacle devant lequel on resterait passif, encore moins un jeu d'horreur, qui implique que nous devions ne faire plus qu'un avec le personnage que nous contrôlons. La grande époque de Silent Hill, Project Zero, Dead Space et toute la bande est définitivement derrière nous...
Certains studios se sont fait une spécialité de ce type de contenu, comme Bloober Studio et ses Layers of Fear, Blair Witch, SOMA et autres Observer. Des jeux pas inintéressants, mais bien trop calibrés pour convaincre le public, car s'ils sont appréciés lors d'un visionnage de stream, manette en main le joueur se rendra bien souvent compte des limites de la formule. Il suffit de voir les succès Steam d'Amnesia pour se rendre compte qu'en fait personne n'a vraiment joué au jeu, et encore moins ne l'a fini. Moi-même j'avais les 2 premiers Amnesia dans ma bibliothèque Steam depuis plus de 5 ans avant de réellement y jouer, pour vous dire à quel point YouTube inhibe complétement notre motivation à jouer à ces jeux d'horreurs sur-représentés en vidéo.


Outlast premier du nom était un peu dans cette mouvance. S'étant fait remarquer pour son gameplay caméra qui n'apportait pas grand chose à la formule et sa violence graphique assez frontale, là où d'autres trains fantômes se contentaient bien souvent de la suggestion à la démonstration. Un jeu sympathique, mais dont le principe de cache-cache avec les ennemis ne se renouvelait jamais, créant un sentiment de répétitivité dès les premières heures de jeu.


Outlast, c'est un peu plus de tout. Un peu plus de caméra, qui se retrouve dotée d'un micro capable de capter les sons distants, inutile, sauf dans de très rares cas. Un peu plus de variété. Adios l'hopital psychiatrique et bonjour la campagne américaine. Les décors sont très variés et la direction artistique, si elle a ses limites (les mines de la dernière partie...), est efficace. Un peu plus de scénario, aussi, car nous avons un héros cette fois-ci caractérisé, qui réagit aux situations et a même un passé qui est développé lors de séquences hallucinatoires. Les transitions entre monde normal et souvenirs sont d'ailleurs bien fichues et arrivent à chaque fois à déboussoler. Quel dommage qu'au bout de la troisième, on ai compris ce que les développeurs cherchent à nous raconter, mais que les parties s'étirent en longueur pour rien. Et bien entendu, nous avons un peu plus d'horreur.


Un peu trop d'ailleurs. Le premier jeu avait quelques scènes assez graphiques (l'entrée dans une salle remplie de têtes décapitées avec un corps embroché en tout début de jeu, les doigts coupés), mais avait l'intelligence de les distiller par petites doses, afin de renforcer l'horreur des situations. Outlast 2 n'a pas cette retenue. Le jeu est un avalanche de violence, de gore très premier degré, de mutilations en tout genre, de scènes macabres et même de graveleux (seins et sexes apparents). Il y a même une scène d'accouchement en gros plan, où l'on voit bien l'enfant sortir ! Et je ne comprends pas cette surenchère. Je ne suis bien sûr pas contre le fait de mettre de la violence physique voire du gore dans un jeu (à choisir entre avoir plus d'horreur dans mon jeu d'horreur ou moins d'horreur, je pense que c'est vite décidé), mais il y a une différence entre mettre des cadavres découpés dans le coins d'une salle et en croiser une dizaine tous les 20 mètres ! Je pense que les développeurs ont souhaité se faire bien plus plaisir sur la violence dans leur œuvre pour renforcer l'atmosphère malsaine qui s'en dégage, et en soit c'est un choix que je respecte. En effet, les mutilations, les coups que se prend le personnage sont impactants (le fait d'ailleurs que le héros ait un corps que l'on peut voir directement en baissant la tête et qu'il crie lorsqu'il est blessé intensifie notre immersion), l'ambiance macabre fonctionne bien à certains moments. Mais je me demande si à force de vouloir trop en montrer, les développeurs ne sont pas tombés dans la complaisance, dans le simple besoin de mettre du gore pour faire parler du jeu. Et là où ça pêche, c'est qu'à la longue, accumuler les giclées de sang fait que le joueur ne les ressent plus du tout comme des moments marquants, mais juste comme une simple routine. Le personnage se prendra des coups, se fera transpercer, crucifier, un lépreux lui vomira dessus, il s'effondrera dans des flaques de sang et d'excréments et se fera presque violer sur la fin, mais au final tout cela paraitra de plus en plus artificiel. Red Barrels a cherché à se donner une image plus mature, traitant de sujets complexes comme le fanatisme religieux, l'infanticide, la pédophilie, le sectarisme, mais au final complétement effacés par une surenchère de violence gratuite et sensationnaliste, leur donnant une image de bad-boys de collège.


Outlast 2 est un jeu que j'aurais aimé aimer. Je l'ai d'ailleurs en partie découvert sur Youtube, car je considère que si on regarde un extrait d'un jeu en streaming ou vidéo et qu'on a directement envie d'y jouer, c'est qu'il doit posséder de vraies bonnes qualités (et inversement, si le jeu ne me donne aucune envie d'y jouer après visionnage de vidéo, c'est qu'il ne doit pas être si bien que ça). C'est un jeu qui n'est pas mauvais à proprement parler, mais qui s'enfonce dans un mauvais gout vite éreintant. Quand se donner l'image de la maturité ne fait que souligner sa propre immaturité.
Gageons que pour un hypothétique Outlast 3, les développeurs sachent trouver le juste équilibre entre l'expérience horrifique intense et le train fantôme sensationnaliste de cours d'école.

Arkeniax
6
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Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste La vie sociale ?? Bof... (2021)

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le 30 janv. 2021

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Arkeniax

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