Nés de la dernière pluie.

Pikmin a toujours été vu par ses fans comme un grand moment de la création Nintendienne. À une époque où la qualité de leurs jeux semble baisser face à l'impératif moderne de devoir tourner la manivelle de leurs licences majeures sur un rythme annuel; la qualité stagnante des aventures des petits êtres de chlorophylle rassure le fan de base de Big N. Car c'est surtout cela que leurs fans veulent de nos jours : être rassurés sur l'état de santé de la compagnie. Le joueur Nintendo - de moins en moins transporté par les œuvres proposées - se rabat sur l'idée qu'il doit faire sa part pour assurer la survie de ce qu'il perçoit de manière vague et confuse comme une tradition. Pourquoi? Comment? Impossible à savoir. Mais c'est aussi ça la force des traditions, nul n'est obligé de les comprendre pour les mettre en pratique.

Nous voici déjà au troisième opus de la série des "petites plantules cute destinées à crever sous les ordres d'un spationaute quelconque car ces bestioles pathétiques mais très serviables ont le malheur d'être dépourvues de libre-arbitre". Comme le temps passe vite. Parlons d'abord du mélange nauséabond de philosophies qui recouvre ce jeu à la jouabilité à peine pensé pour le GamePad. C'est l'histoire de joyeux colonisateurs aliens humanoïdes - vos héros - venus piller une planète de ses ressources naturelles pour assurer la survie d'une société sclérosée. (Toute ressemblance avec quoi que ce soit est purement fortuite, j'imagine). Et malgré le fait que ce jeu tourne sur une console qui nécessite de l'électricité et met en scène des cosmonautes; le tout se permet d'essayer de passer pour une fable écologiste. Tout cela en tuant des plantes sensibles par centaines, soulignons-le. Voilà donc votre jeu vert; il est rouge vif.

Revenons aux bases, vous incarnez un triumvirat de personnalités insupportables venues d'une autre planète. Vous avez un technicien maladroit, car la maladresse est vue comme drôle dans certaines sociétés. Un général à moustache doté d'un canard en plastique. Et une demoiselle à lunettes qui aime dormir et manger. C'est le personnage le mieux écrit du jeu; autant l'admettre. Aux commandes de vos trois fourmis en chef, vous devrez déjouer la maniabilité mi-tactile mi-GameCube de ce titre qui n'a bizarrement pas été plus que ça adapté à l'écran de la console qu'il est censé vendre. Diriger ses escouades au stylet est possible via une mini-map mais rien de bien avantageux; tout le reste doit être réalisé avec sticks et boutons. J'aurais pensé que le passage de la série vers une console dotée d'un écran tactile aurait été le bon moment pour permettre d'y jouer uniquement par ce biais, mais bon, je suis dans la minorité. Seul avantage de cet état de fait : les fans de la période GameCube ne seront pas dépaysés. Tout fonctionne comme à l'époque et quelques minutes suffisent à se remettre le tout en tête. Tout est très similaire aux précédents opus. Parfois trop. Adeptes du path-finding foireux où chaque tournant vous fait perdre des troupes et des unités attaquées qui ne se défendent jamais : vous allez adorer Pikmin 3, il est précisément comme ses ancêtres.

C'est d'ailleurs compréhensible. Le titre nous vient de la Wii. C'est devenu une tradition, d'ailleurs : si un jeu n'est pas terminé à temps pour sortir sur un format établi pour lequel il aurait été un hit, Nintendo le sort vite fait sur sa nouvelle console dans l'espoir fou que les gens passeront d'une machine à l'autre pour y jouer. (Certains appellent ce phénomène l'Effet Twilight Princess). Ses graphismes, sans être hideux, n'ont rien de spécial. Ils sont censés remplir avantageusement l'écran jaune de basse résolution que l'on trouve sur le GamePad et c'est ce qu'ils font. Sur un écran de télévision, par contre? Le pari devient plus osé, à l'image du jeu qu'il représente : un brin léger, antique par certains aspects, mais parti d'une bonne intention.
Il aurait été salutaire que ce titre soit un chef-d'œuvre, la capacité Nintendo démontrée sur un nouveau format. Or, ici, la compagnie prouve surtout son sens inné du recyclage. Diverses décisions étranges font de ce titre peu intuitif une gigantesque simulation de micro-management dont toute personne aisément agacée aura envie de se passer. Les fans adoreront l'idée de pouvoir rentrer à la maison. Après tout, ils sont tellement patients qu'ils sauront lui pardonner ses détails douteux. Tant mieux pour eux.