Rakuen
7.2
Rakuen

Jeu de Emmy Toyonaga et Laura Shigihara (2017PC)

Rakuen est un jeu difficile à cerner.


Après quelques minutes de jeu on pourrait être tenté de le mettre dans la case « jeu RPG Maker cheapos », arrêter et ne jamais y revenir. Graphiquement terne, il vous offre 2/3 quêtes basiques mais c’est surtout l’ambiance bizarre qui va vous interpeller. Le jeu distille une atmosphère qui oscille entre le réaliste mystérieux et l’angoisse tellement subtile qu’on se demande elle est voulue ou non par le développeur. On se demande dès le début si le jeu va tendre vers quelque chose de sombre, mais sans vraiment en être sûr.


Et alors qu’on en est encore à se demander « mais c’est quoi ce jeu ? », on atterrit à Rakuen, un monde parallèle chatoyant de milles couleurs et qui prend vie grâce à à un pixel-art des plus réussis. Et là le jeu se met à ressembler à un Zelda-like dépourvu de combats, avec un donjon dans lequel on va progresser énigme après énigme. Mais Rakuen ne peut pas non plus se résumer à ça, car le jeu continuera à modifier régulièrement sa proposition, tout en gravitant autour de ce concept de mini-quêtes/énigmes à résoudre. Avec comme principe central la modification d’éléments dans un monde qui aura des répercutions dans l’autre monde.


Et finalement tout ceci importe peu puisque la véritable qualité du jeu c’est son écriture. Son histoire, qui avance tout en subtilité, ses protagonistes, dont on découvre le passé au fur et à mesure de l’aventure. Et son cadre, mystérieux et intrigant, qui n’oublie jamais de semer des petites graines d’inquiétude. Une affiche par-là, un article de journal par-ci, et on a le cerveau débordant de questions dont on redoute les réponses.


Car je trouve que le jeu a clairement été influencé par Silent Hill. Tout d’abord on retrouve l’alternance entre monde réel et épisodes cauchemardesques, même si ici une troisième variable est présente avec le monde parallèle façon Zelda. Cette alternance entre monde réel et monde imaginaire donne parfois lieu à des scènes bien surréalistes, mais dont la folie ne fait jamais réellement décrocher le joueur.


Ensuite on est en présence du même onirisme inquiétant qui avait fait les grandes heures de la série d’horreur, avec le symbolisme complexe d’une réalité parallèle qui sert à illustrer les démons qui habitent les occupants d’un monde bien réel. Il sera question de colère, de pardon, de culpabilité, de mort, bref de sonder les tréfonds de l’âme humaine. Alors certes l’approche est beaucoup moins horrifique et frontale que dans les opus de la Team Silent, mais certains passages sauront tout de même faire frissonner grâce à une musique subtilement angoissante ou à des évènements mystérieux façon maison hantée.


Bon du côté des défauts on peut noter des contrôles pas follement agréables (même si l’utilisation d’un pad améliore un peu le ressenti général), une rigidité dans les déplacements plutôt désagréable, et un gameplay qui reste plutôt basique. Disons que ça sent bel et bien le jeu RPG Maker de ce côté-là.


Mais globalement j’ai quand même pris beaucoup de plaisir à jouer à Rakuen. Je sais bien que la qualité d’écriture que l’on prête à un jeu est un concept extrêmement subjectif, ayant moi-même été laissé de marbre par des jeux dont tout le monde vante la capacité à émouvoir. Mais Rakuen m’a paru drôlement réussi sur ce plan-là, avec des personnages suffisamment bien écrits pour que leur sort nous touche et que de vraies émotions soient transmises au joueur.


Une très belle découverte.


16/20

Jopopoe
8
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Créée

le 10 nov. 2019

Critique lue 306 fois

4 j'aime

Jopopoe

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