Shin Megami Tensei II
8.3
Shin Megami Tensei II

Jeu de Atlus (1994Super Nintendo)

Petit disclaimer : je serais obligée, dans cette critique, de spoiler certains éléments de l'intrigue de Shin Megami Tensei 1. Au-delà de ça, j'essayerai de parler le moins possible de celle de SMT II, cette critique sera donc relativement spoil free.
Je tenais également à préciser un point assez important : Shin Megami Tensei II, tout comme son prédécesseur, n'est pas une entrée idéale dans la série. Entre ses thèmes assez singuliers, son avarice en bavardages inutiles pourtant si chers aux JRPG et (surtout) son gameplay laborieux et impitoyable, il pourrait donner une mauvaise image de la série aux néophytes. Je conseille plutôt SMT 3 ou 4 à ceux qui voudraient un opus pour se familiariser avec la série, ils sont beaucoup plus accessibles et surtout deux très bons jeux !

Shin Megami Tensei II est un RPG japonais de la série des Megaten, 2e opus de la série principale des Shin Megami Tensei. Tout comme le premier jeu, le principe est d'incarner un héros dans un monde où humains et démons se côtoient, divisé entre les forces du chaos et de l'ordre (Law pour les anglophones). Là où le gameplay d'un SMT trouve sa particularité, c'est avec sa mécanique de recrutement de démons. En effet, en croisant des démons au fur et à mesure du jeu, vous pourrez essayer de les recruter dans votre équipe. Bien sûr, vous pouvez aussi leur demander d'autres services (comme vous offrir l'argent), ou faire foirer les négociations ce qui entraînera la fuite ou la colère du démon. Vous pourrez également les fusionner, vous permettant d'obtenir des démons encore plus puissants et avec de la chance ou une bonne connaissance du jeu, de passer d'un démon à l'autre des capacités. Certains démons ne sont d'ailleurs disponibles que par la fusion.

Cependant, on aborde direct le gameplay qui est la première chose qui peut rebuter un nouveau-venu. En effet, Shin Megami Tensei II a des mécaniques complexes, et en plus de ça il est horriblement dur et parfois très frustrant. Il est essentiel de toujours avoir les meilleurs démons possible, cependant les invoquer coûte de l'argent et les garder dans votre équipe vous coûtera des Magnetite, que vous ramasserez dans des coffres ou en tuant des ennemis. De plus, les combats peuvent vite se révéler assez frustrants, surtout vers la fin de jeu : entre les ennemis qui ont des attaques qui pétrifient/one-shot, ceux qui résistent aux attaques physiques et ceux qui sont trop puissant pour votre niveau actuel, certaines rencontres aléatoires peuvent vous provoquer un game over immédiat. Au niveau des boss, la difficulté est bien mieux dosée (et moins cheap) que sur SMT I, mais plus on avance dans le jeu, plus ceux-ci se révèlent compliqués à vaincre, à tel point que le donjon final contient nombre de boss aux stats beaucoup trop hautes, aux HP très élevés et aux attaques dévastatrices qui ne seront pas faisable sans une bonne stratégie et de très bons démons.

En plus de tout cela, il faut compter sur le fait que SMT II est un jeu assez labyrinthique et qui laisse parfois le joueur trouver tout seul où aller pour faire avancer l'histoire. On se retrouve très souvent à faire du backtracking en boucle, ou à refaire les mêmes étages de donjons à cause des pièges comme des trous qui font tomber quelques étages en dessous ou, mes préférés, les téléporteurs qui mènent à des culs de sacs. Dans ce brouillard ambiant, il faut compter qu'il faudra payer dans des magasins spécialisés (ou attendre que Steven vous donne gracieusement son amélioration du COMP vers les 3/4 du jeu) pour apprendre à quoi correspondent les objets et les sorts/capacités de vos coéquipiers. Les habitués de la série reconnaîtront les noms des magies sans trop de problèmes et certains sorts ont un nom assez explicite (Paraladi qui guérit la paralysie, pareil pour Posumudi avec le poison), mais savoir à quoi correspond Agirama ou Media quand c'est le premier SMT qu'on fait, c'est compliqué. Au moins, cette fois-ci, le jeu propose un moyen de connaître leur utilité, mais on regrettera de ne pas avoir le descriptif comme dans Nocturne par exemple.

On peut cependant noter une nette amélioration par rapport au premier jeu niveau gameplay et level-design. Déjà, on est en face d'un jeu mieux équilibré, plus complet et avec de nouvelles mécaniques pour la fusion des démons notamment. On retrouve aussi plus facilement son chemin ; malgré des donjons finaux labyrinthiques, rien n'arrive au niveau de la Cathédrale de SMT I. Les donjons sont aussi plus diversifiés, contrairement au 1 qui reposait majoritairement sur des grottes, des centres commerciaux ou des sous-sols. Et la cerise sur le gâteau, on n'est plus obligé d'aller chercher la carte dans le COMP, celle-ci s'affiche avec une simple pression de la gâchette ! C'est, sans rire, l'une des meilleures innovations de gameplay de SMT II.

Néanmoins, on peut se demander : pourquoi 8 à un jeu avec un gameplay aussi pénible ? J'y viens. Mais pour cela, il me faut poser les bases de Shin Megami Tensei II.

L'histoire commence quelques décennies après la fin Neutre du premier jeu. En 20XX, suite à la destruction du monde par Thor et la défaite de Michel et Asura, généraux des forces Law et Chaos, l'humanité se retrouve livrée à elle-même. Mais, contrairement à ce que la fin Neutre avait prévu, celle-ci se retrouva dominée par l'obscurantisme religieux et rapidement, l'Eglise des Messians reprit le contrôle et pourchassa les Gaians, adeptes du Chaos. Sur les ruines de Tokyo est construite une nouvelle cité, Millenium. Celle-ci est constituée du Centre, où se trouve l'élite dont les 4 Evêques qui gouvernent la ville, Holytown qui abrite la population "aisée", et Valhalla qui sert de bas-quartiers. C'est ici que commence notre héros, Aleph, amnésique et déterminé à devenir le nouveau champion du Colisée. Celui-ci se retrouvera pris dans un nouveau combat entre les Law et les Chaos, accompagné d'Hiroko, une jeune femme qui veut sauver son père, et de Zayn, un Law qui se rebelle contre l'ordre établi.

On arrive là sur ce que j'estime être le point fort de Shin Megami Tensei II. L'histoire commence assez doucement, mais finit par prendre tout son sens lorsqu'on se rend compte de la vraie nature du pouvoir oppressif des Evêques. Sans trop en dire, les thèmes abordés sont très bien traités, et c'est un des rares jeux où on sent l'impact des décisions que l'on prend. En effet, il faudra choisir son camp : sera-t-on un soutien de Zayn dans sa quête contre l'oppression du Centre afin de rétablir la véritable parole divine ? Choisira-t-on d'aider les Gaians et démons devenus marginaux, guidés par le mystérieux Louis Cyphre (vraiment je me demande qui c'est) ? Ou bien, décidera-t-on de poursuivre dans les traces du Héros du premier jeu et de faire confiance à l'humanité, bien que cela n'ait pas marché la première fois ? Et surtout, quelles seront les répercussions de chacun de ces choix ?

Mais au-delà des thèmes abordés, le setting de Shin Megami Tensei II est une autre raison qui m'a fait l'adorer. On ressent une mélancolie omniprésente, une profonde injustice dans ce monde futuriste. Bien qu'une partie du jeu se passe dans les quartiers propres du Centre, il est rapidement évident que la vraie maison d'Aleph n'est pas là. Que ce soit le Valhalla, l'Eden choisi pour héberger les élus de YHVH ou les souterrains où sont reclus les marginaux de la société, les environnements que l'on parcourt montrent bien que contrairement aux apparences, on est en face d'un univers dystopique. Des années de conflits étouffés ont donné lieu à un monde partiellement détruit où démons, clercs, mutants ou simple habitant des bas-quartiers ne demandent qu'à en découdre pour reprendre ce qui leur est dû. Et cette étincelle qui met le feu aux poudres, c'est Aleph.

Ce monde sur le point de tomber en morceaux est d'ailleurs porté par une OST qui, si elle aurait gagné à être plus diversifiée, comporte de bonnes pistes comme le thème du Chaos ou le chant de la sirène (qui aurait pu être le thème du jeu tant il y colle bien). Mais la place que ce jeu a dans mon coeur, il l'a aussi grâce à ses personnages. On retrouve certes les personnages "représentants" de leur alignement, à la manière des Law et Chaos Hero de SMT 1 ou Jonathan et Walter de SMT IV. Cependant, ici, ils sont bien plus nuancés et mieux écrits que dans le premier jeu, au point où je me suis retrouvé à envisager de passer du côté des Law (alors que c'est un alignement que je ne choisis jamais, #teamchaos). C'est cependant dommage qu'aucun personnage ne vienne réellement porter les couleurs de l'alignement Neutre.

même si de toute façon la fin Neutre se termine sur l'extermination de l'humanité par Satan et Lucifer donc c'est pas très worth it lol

Les autres personnages ne sont cependant pas en reste. On retrouve certaines figures connues comme Steven, Louis Cyphre (qui est devenu plus nuancé) ou Pascal le chien mais aussi de nouveaux personnages qui sont souvent bien mieux écrits et moins impersonnels que ceux du premier opus. Le bestiaire, lui aussi, a le droit à de nombreux ajouts plus inspirés que dans le premier opus. On a des références populaires comme à Jack l'Eventreur ou Frankenstein, mais aussi à certaines créatures de fiction plus occultes, comme Cthulhu ou Nyarlatothep. On a aussi l'apparition de démons assez emblématiques de la série, comme Metatron ou Satan (qui était déjà dans Megaten II mais ça compte pas). C'est aussi là où Mara gagne son design actuel, purement chibresque.dans son chariot doré.

Pour conclure, je conseillerait Shin Megami Tensei II aux fans hardcore d'univers dystopiques et de JRPG sur SNES seulement. Malgré son univers qui m'a séduit et son scénario intéressant, il ne faut pas oublier que ça reste un jeu très daté, particulièrement au niveau du gameplay. Sans guide, cheat codes ou save state, le jeu peut être très difficile et il n'est pas rare de se retrouvé bloqué parce qu'on ne sait pas comment avancer. Mais si tout cela ne vous gêne pas, vous pouvez découvrir ce que je considère comme une des pépites des RPG de la console.

Créée

le 5 juin 2022

Critique lue 570 fois

7 j'aime

Helo Nomy

Écrit par

Critique lue 570 fois

7

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