Sleeping Dogs
7.1
Sleeping Dogs

Jeu de United Front Games et Square Enix (2012PlayStation 3)

La première chose qui frappe lorsqu'on joue à Sleeping Dogs est l'ambiance qui se dégage du jeu. Pour une fois, ce ne sont ni les États-Unis ni le Japon qui nous sont présentés, il ne s'agit pas non plus d'une Eurasie antique ou moyenâgeuse mythifiée, mais bien de la Chine contemporaine - et plus particulièrement Hong Kong. Ce cadre exotique dans l'univers vidéoludique constitue un véritable rafraîchissement. Mais passé ce constat somme toute superficiel, ce jeu a-t-il réellement quelque chose à proposer ou n'est-il qu'une piètre repompe exotique de GTA ?


Bien entendu, si l'influence de GTA4 se fera sentir tout au long du jeu, Sleeping Dogs établit son identité bien au-delà de Hong Kong. La ville est dépaysante, mais plus animée que Liberty City : les gens entrent et sortent des magasins, jettent des seaux d'eau par la fenêtre, se liguent contre vous (sans témérité toutefois) lorsque vous êtes poursuivis par la police, s'arrêtent pour regarder des danseuses de rue ou des combats, tiennent des sacs, des valises, des parapluies – qu'ils ouvrent lorsqu'il pleut – etc. Tout cela pourrait être encore poussé, voire les gens prendre les transports en commun, s'asseoir pour lire, discuter, s'interpeller, et bien d'autres choses encore, mais il faut aussi jouer avec les limites de la console... Un point noir toutefois : la densité du trafic fait parfois davantage penser à Pyongyang un dimanche après-midi qu'à une mégalopole grouillante, dynamique et surpeuplée. Graphiquement, le jeu n'est pas nécessairement une révolution, mais certains effets de lumière sont particulièrement soignés (la réflexion des lumières sur le bitume humide est particulièrement saisissant).


Si l'ambiance générale de Sleeping Dogs est prenante, la reproduction de la ville laisse parfois à désirer. N'ayant jamais visité Hong-Kong, il me serait difficile d'affirmer que la ville est mal reproduite, mais puisqu'Internet existe, un rapide coup d’œil sur Google Street View fait apparaître une ville beaucoup plus dense, pleine de ruelles bondées, parfois très étroites. Par ailleurs, si les gratte-ciels de la ville sont bien présents, la géographie générale de la ville n'est absolument pas respectée. La comparaison avec GTA4 est alors étrange : là où ce dernier se déroule dans une ville imaginaire en copiant des quartiers entiers de New York, Sleeping Dogs se déroule dans le Hong-Kong réel en réinventant sa géographie et son aspect...


D'une manière générale, se déplacer dans le Hong Kong de Sleeping Dogs est plus agréable que dans GTA4. En effet, dans ce dernier, une fois les véhicules motorisés mis de côtés, les déplacements à pieds sont particulièrement ennuyeux : on saute un coup, on trotte et... c'est à peu près tout. Or ici, l'intégration du parkour rend les choses beaucoup plus dynamiques, notamment pour les missions qui gagnent en variété. On n'échappe toutefois pas aux absurdes obstacles invisibles ou aux incohérences classiques (sauter un mur de 3 mètres parce que ça sert le scénario, ok, mais enjamber la touffe d'herbe à côté, faut pas déconner non plus!). De même, le système de combat de GTA4 est d'une incroyable mollesse lorsqu'on ne se bat pas avec une arme à feu, alors que Sleeping Dogs propose une grande diversité de coups (très bien animés, par ailleurs) qui rendent les combats jouissifs et rende – une fois encore – les missions plus intéressantes (et parfois plus difficiles). En dehors de la trame principale, les armes à feu sont d'ailleurs rares et l'impossibilité de conserver un arsenal militaire sur son dos oblige fréquemment à recourir au combat à mains nues.


Concernant les autres modes de déplacement, rouler en voiture ou à moto n'a rien de compliqué et l'essentiel des courses que le jeu propose sont loin d'être des défis. Certains y verront une faiblesse, d'autres seront soulagés à l'idée de ne pas perdre 50 fois la même mission à cause d'une moto récalcitrante. Globalement, le plaisir de rouler demeure et les quelques petits défis que le jeu propose (rouler sans accrochage ou accident, piquer des pointes de vitesse, etc.), bien que gadgets, sont un ajout agréable. Toutefois, si on appréciera que les véhicules ne prennent pas feu à la moindre éraflure comme dans GTA4, leur extrême résistance est un peu ridicule et facilite (pour le coup) un peu trop le jeu à certains moments. Par ailleurs, si la capacité de « projeter » le véhicule sur ses poursuivants ajoute en dynamisme dans les courses poursuites, la facilité à se débarrasser des véhicules adverses par ce biais est parfois trop grande. Pour ce qui est des transports, on regrettera l'impossibilité de jouer au taxi ou au chauffeur de bus, de même, on regrettera de ne pas pouvoir prendre le tram (dont le trajet est ridiculement court..) et l'absence de métro est d'ailleurs regrettable.


Le scénario du jeu est soigné et ferait un film très correct de gangster hongkongais. Les personnages n'échappent pas à certains clichés, mais sont relativement bien écrits et cohérents. On s'identifie bien davantage à Wei Shen qu'à un Niko Bellic dont les motivations troubles et la moralité variable sont vite lassantes. Les missions sont relativement variées et l'histoire est bien rythmée quoiqu'un peu courte. Les quelques missions optionnelles compensent toutefois partiellement ce problème. Certaines réalités hongkongaises sont toutefois absentes du scénario, notamment les problèmes politiques avec la Chine. Certes, il ne s'agit pas d'une œuvre militantes, mais en comparaison, GTA4 se permettait quelques commentaires (parfois très critiques) sur la société américaine. Ici, le crime, l'immoralité ou les problèmes sociaux sont le seul fait de la criminalité et de la malhonnêteté de quelques-uns. Les pouvoirs publics, à l'inverse, absents ou relativement bienveillants.


Enfin, le mélomane que je suis ne peut faire l'impasse sur les musiques du jeu. Les radios de Sleeping Dogs sont bien moins variées que dans GTA4, leurs playlist sont relativement peu fournies et la programmation des radios (qui redémarrent très régulièrement) fait qu'on écoute souvent les mêmes chansons indéfiniment – malgré les heures que j'ai passé sur ce jeu, je n'ai découvert certains titre qu'en écoutant l'OST. Toutefois, certains morceaux sont excellents et renforcent l'ambiance dépaysante du jeu.


Sleeping Dogs est donc un excellent jeu qui, certes, a ses défaut, mais laisse aussi espérer le meilleur si Square Enix décide d'en produire une suite. En attendant, peut-être recommencerai-je le jeu une quatrième fois... (et oui, quand je dis que j'aime...)

Ezechielle
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le 30 oct. 2016

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Ezechielle

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