Il y a bien des manières pour présenter un RPG. Certains d'entre eux tels que The Witcher ou Deus Ex mettent en avant un personnage unique imposé, sans customisation de l'apparence, et mettent en place une histoire passionnante dans un monde semi-ouvert. Oblivion est complètement à l'opposé de ces 2 jeux : il nous propose un personnage principal anonyme, entièrement customisable, et on ère dans un monde ouvert à la recherche de quêtes éparpillées par-ci par-là. Un peu comme un MMORPG, mais en solo.

Ainsi, Oblivion part d'un concept très ambitieux. Un monde où on est libre de discuter ou tuer n'importe quel personnage qu'on croise, et d'explorer chaque bâtiment pour y trouver des items rares... En gros, sur papier, Oblivion proposait l'expérience ultime du Role Play.
Il faut avouer que cette sensation de liberté y est assez bien retranscrite. Cyrodiil est un vaste terrain qui contient son lot de villes, villages, donjons et grottes à découvrir, et habité par des personnages plus ou moins hostiles envers vous. Malheureusement, comme tous les jeux bac-à-sable au monde, Oblivion souffre des défauts plus ou moins gros causés par ce choix de game design.

Tout d'abord, le jeu a du mal à nous mettre en place une vraie histoire. A cause de sa trop grande liberté, le scénario part dans tous les sens et on oublie rapidement pourquoi on était parti en aventure. Le trame principal qui n'est ni très original ni très passionnant depuis le départ se perd complètement au fil des quêtes.

Un autre problème est l'aspect "Role Play" qui est dans Oblivion paradoxalement très secondaire voire absent. Les choix de dialogues sont quasi-inexistants. Un petit mini-jeu permet de mieux s'entendre avec les PNJ afin de leur soutirer des informations, mais au final, la plupart d'entre eux n'ont rien à nous raconter, qu'on ait la barre d'amitié remplie ou non. On n'a jamais vraiment l'impression de faire des choix qui bouleversent l'avancement du jeu. Les discutions avec les PNJ ne sont là que pour trouver éventuellement de nouvelles quêtes. Au final, j'ai plus éprouvé l'impression d'un GTA médiévale, plutôt qu'un véritable RPG en jouant à Oblivion.

Heureusement, les quêtes sont très nombreuses et variées. A plusieurs reprises, le jeu nous surprend par des situations, certes déjà-vu dans des films et livres, mais assez originales pour un jeu vidéo. Par exemple, un peintre disparaît dans son atelier, et on se retrouve enfermé à l'intérieur d'un tableau qu'il a peint en partant à sa recherche. Dans une autre quête, pour rejoindre le guilde des voleurs, on doit aller voler un journal chez un habitant de la cité impériale en demandant des informations à des clochards, et on doit le faire avant les 2 autres candidats du guilde. Et encore dans une autre quête, on doit assassiner discrètement un par un les invités d'une fête : ces derniers deviennent paranos et finissent par accuser tout le monde avant de s'entre-tuer...
Même s'il existe des quêtes très basiques et ennuyeuses (aller-retours, suivre un PNJ, aller parler à bidule, retourner parler à machin...), on salue quand même leur variété et l'effort de mise en scène.

Le gameplay est très riche. On peut acheter des maisons et des chevaux, fabriquer des potions, participer à des tournois de combats, réparer nous-même les armes, crocheter, voler, négocier avec les marchands, tomber malade, gérer une équipe de pirate, se faire sucer le sang par un vampire pour en devenir un... Dommage que les combats sont assez bordéliques et sont souvent réduits à un martèlement de clics.

Maintenant que j'ai parlé du gameplay, je peux enfin aborder ce qui est le plus gros défaut du jeu pour moi : son univers.
Bethesda s'efforce de nous prouver via des livres qu'on peut consulter dans le décor et de nombreux dialogues que leur univers est riche. Mais au final, Oblivion est un melting-pot de tous les clichés possibles et imaginables du heroic fantasy des plus basiques, avec une touche de pirates, samouraïs, zombies... Un véritable foure-tout. Des blancs, des noirs, des elfes et des types aux têtes de lion ou de lézards vivent ensemble sans aucun problème (alors que The Witcher mettait en place un véritable problème de racisme lié à la cohabitation des différentes races). On a droits à des personnages au nom ridicule tels que "Antoinetta Marie" (mais... pourquoi ?) ou encore "Gaiden Shinji". Donc il y a aussi des japonais dans ce monde ? L'univers perd en crédibilité, on a plus l'impression de visiter une grosse orgie bien maquillée des stéréotypes de l'heroic fantasy dans la tête d'un geek, plutôt qu'un monde pensé pour être cohérent.

Mais si on pouvait encore pardonner cela, il y a une chose que jamais personne pourrait pardonner sans faire part d'une immense mauvaise foi, c'est le design des PNJ. Sans troller, les personnages de ce jeu font sûrement parti des plus hilarants que je n'ai jamais rencontrés dans un jeu AAA. Bethesda nous a beau présenté un éditeur de personnages riche, si c'est pour qu'à la fin on se retrouve avec des têtes à claque, à quoi bon ? Ce n'est pas le but de faire le plus beau et le plus fort des héros dans ce genre de jeu ? Ce jeu est sorti en 2006, Half Life 2 sorti en 2004 nous proposait des personnages bien plus réussis (et qu'on ne me sorte pas l'excuse du "c'est un open-world", ça n'a rien à voir avec).
Les stuffs qu'on récupère ne sont guère mieux. Leur design est kitsch et stéréotypé. On survit dans un donjon pour se retrouver avec une armure et une arme que même les chevaliers du Zodiaques auraient la honte de les porter.
Le désastre des designs ridicules touchent également les ennemis. Le palme revient quand même aux lutins : créature résultant d'une orgie entre une gargouille et un gremlins, dont on leur a colé des ailes et qui poussent des petits cris de poussins quand on leur frappe... Mais, WTF? Ils étaient sérieux ou c'était un personal joke entre développeurs ?
Ce jeu manque vraiment d'une direction artistique digne de ce nom. Seuls les décors sortent un peu du lot même si dans l'ensemble ça reste peu inspirés et répétitifs.

Oblivion aurait pu être l'ultime RPG, comme annoncé. Malheureusement, toutes les bonnes idées de gameplay et de mise en scène sont gâchées par des designs ridicules et l'absence d'une vraie histoire. Peut-être que Skyrim corrigera cela ?

Mise à jour : Oh que oui, Skyrim a corrigé tout ça.

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le 21 août 2011

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ThoRCX

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