Avant de commencer "Le Dernier d'entre Nous", je craignais d’être encore victime de l’effet « La presse et les joueurs sont unanimes sur le fait que ce jeu est génial, par conséquent je vais encore avoir des attentes trop haute et je vais fatalement finir par me faire chier au milieu », mais finalement, promesses relativement tenues.

Au niveau de a narration, The Last of Us réussit relativement bien à ne pas trop tomber dans les nombreux écueils qu’implique un scénario se passant sur une apocalypse avec des zombies et avec deux personnages principaux. Hum. En fait j’ai écrit cette phrase, j’allais mettre des exemples de ficelles habituelles pour ces cadres narratifs, et je me suis rendu compte qu’ils étaient plus ou moins tous représentés dans le jeu. Je suppose que l’on peut dire que le jeu intègre ces ficelles sans créer des situations trop factices et artificielles. Ces ressorts scénaristiques sont plutôt bien amenés et pas trop lourds ni longs. Pas mal de moments m’ont fait penser à The Walking Dead, voir même à Malevil (notamment le côté un peu rare et précieux des armes à feux et la facilité avec laquelle Jean-Gérard de la compta peut tuer Christian du pôle marketing), ce qui est une bonne chose je suppose. Les textes que l’on trouve ici et là sont une bonne touche pour l’ambiance, cependant il est un peu dommage qu’il n’y en ait pas d’avantage et qu’ils soient si courts.

De plus, l’émotion des personnages et de l’histoire est relativement subtile et souvent bien amenée. Le jeu prenant son temps, les réactions ne sont pas excessives ni subites, elles sont diffuses et progressives. Grâce à cela le développement des personnages et de leur caractère est très intéressant car ils sont à la fois crédibles et réalistes.
Pour ce qui est de l’habituel découpage de cheveux en quatre qu’est l’analyse du gameplay, je trouve que c’est peut-être là que The Last of Us pêche le plus. Jouer avec des armes à feu est super galère. C’est peut-être pour montrer que les protagonistes ne sont pas des soldats du GIGN super entraînés, cela les rend plus humains, même si quand on a fini le jeu on a réduit la population des Etats-Unis d’un pourcentage significatif. Il faut quand même que les étoiles s’alignent pour caler une balle dans la tête d’ennemi et quand elles sont si rares cela reste surtout frustrant (ça n’est pas sans rappeler Picsou : « Tirer ? Vous êtes fou ! Au prix où sont les balles ! ». Surtout quand en plus se prendre des dégâts bouscule la visée. Cela renforce cela dit l’intérêt de la furtivité en comparaison l’approche plus frontale : vous économisez des balles, de la santé et de la frustration.

En rapport avec la furtivité, je trouve d’ailleurs pas mal qu’il n’y ait que très peu d’avantage de tuer un ennemi. Les occurrences d’un ennemi laissant quelque chose après sa mort étant tellement rares que ça n’est souvent pas rentable (quand on joue en hard du moins). Plus d’une fois j’ai trouvé plus intéressant d’esquiver les ennemis et de passer son chemin plutôt que de faire (encore) un génocide. C’est à l’opposé de ce que l’on peut voir dans certains jeux où l’on se voit récompenser de l’expérience (Deus Ex par exemple) lorsque l’on tue un ennemi.
L’IA est moyenne, je ne sais pas trop quoi penser du fait qu’elle ignore les partenaires pendant les phases de furtivité si ce n’est que sans cela ces phases seraient à s’arracher les cheveux. J’ai quand même eu un peu l’impression d’abuser du système en attendant en permanence derrière une porte qu’un ennemi passe, on le tue, son petit camarade voit le cadavre, arrive, on le strangule, et ce pendant un petit moment. Quand on voit plusieurs cadavres empilés sous une porte on ne la passe pas comme si on était à Disneyland. Mais bon.

Le level design est assez intéressant mais très représentatif de Naughty Dog et des jeux à la troisième personne. Comme dit autre part dès que l’on voit une salle avec des couvertures potentielles partout et une douzaine de bouteilles et briques qui traînent, on n’est pas vraiment surpris quand il commence à y avoir du bordel. Cependant l’architecture des niveaux permet aux capacités de la PS3 qui commencent à accuser de son âge de faire tourner le jeu tout en gardant une esthétique et un sentiment d’ampleur. Le fait de ne pas toujours savoir où l’on doit aller se révèle parfois assez frustrant cela dit, car outre le fait qu’on peut se perdre un peu, dans certaines situations l’on se fait surprendre par le script en passant une porte, ce qui empêche de revenir en arrière alors que l’on cherchait juste à explorer une zone. Certains niveaux très bien conçus permettent quand même la construction de tension assez importante, je pense notamment à un niveau à la lampe torche vers le début du jeu pendant lequel je ne faisais pas le fier (il faut noter les effets sonores de grande qualité pour aller avec ça).

Sinon il faudra m’expliquer comment on peut trouver un quart d’une paire de ciseaux. What. C’est aussi une denrée super rare et importante à stocker en prévision d’une apocalypse de zombies. Pensez à l’avenir.
Chez Naughty Dog ils font leurs juifs sur les trophées cette fois-ci. En finissant le jeu j’ai eu exactement quatre trophées, dont 3 à la fin du jeu parce que je jouais en difficile. Et d’ailleurs les objets que l’on peut collecter ici et là sont clairement inutiles (comics, et médailles) à part pour le sentiment d’accomplissement (et les trophées).

/ !\ Instant philo/spoilers. / !\

Après cette fin où le héros décide d’aller envoyer l’humanité se faire cuire un œuf, que lui il en a sa claque et qu’il laissera pas sa copine de 14 ans qui est immunisée contre le virus zombie servir de donneur d’organe vivant, j’ai médité pendant que je faisais griller mon pain vers 6h du matin. La première question qui m’est venue à l’esprit était de savoir, après toutes les mésaventures qui arrivent à nos chers protagonistes, si l’humanité aurait mérité d’être « sauvée ». Pour des personnages qui évoluent au sein de ces situations dans lesquelles l’on cherche perpétuellement à leur faire la peau, je peux comprendre qu’au bout d’un moment on ait un peu envie d’envoyer péter tous ces connards. Comme dans beaucoup de scénarios de catastrophes comme celui-là, la plus grande source de dangers est au final l’homme lui-même, les zombies ne sont finalement que peu importants.
L’histoire et certains dialogues du jeu reflètent la dissonance d’une génération/époque nourrie de catharsis composée d’héroïsme autocentré. Baigné en permanence dans la glorification de héros qui envoient chier le monde pour leur propre sens de justice, l’individu doit trouver un sens à sa vie, dans une époque sans conflits majeurs dans lesquels il pourrait s’engager (cassez-vous les écolos). Il se voit répéter perpétuellement qu’il a de la chance de vivre dans cette époque, alors que les personnages exemplaires qui lui sont présentés se créent dans la souffrance et l’adversité. Au moment où Ellie, jeune fille ayant toujours vécu dans ce monde désolé car étant née après le début de la catastrophe, discute avec le personnage principal et trouve ridicule le fait d’avoir à se « soucier » de ce que l’on veut faire dans sa vie, ainsi qu’une série de faits ou concepts de notre époque, tout en trouvant certains aspects merveilleux.

Il semblerait que l’humanité ne trouve de sens, d’exaltation et de force qu’au plus profond du conflit. Pour revenir à la question « L’humanité mérite-elle d’être sauvée ? », ça n’est donc pas tant dans le sens « Y’a la guerre et tout c’est affreux l’homme mérite pas d’exister », mais plus « Au vu du plaisir et de l’exaltation procurés à l’homme par le conflit et l’écrasement de l’altérité, a-t-il le droit d’exiger le sacrifice de cette même altérité pour son propre bien-être ? »

/ !\Fin de l’instant philo/spoilers/ !\

En bref The Last of Us n’innove pas vraiment (à part peut-être pour le système de craft au sein de l’action) mais vit avec son temps : Zombies, personnage qui accompagne le héros, vue à la troisième personne, système de couvertures, l’arc est trop bien, c’est extrêmement scripté, certains dialogues n’interrompent pas le gameplay et viennent le souligner, etc. Tout cela est très solide, avec une histoire et narration qui valent vraiment le coup. Je ne sais pas si c’est comme le disent certains le meilleurs jeux de cette génération de consoles, mais en tout cas c’est certainement un des plus représentatifs.
Flagadoss
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs jeux vidéo de 2013

Créée

le 20 juil. 2013

Modifiée

le 20 juil. 2013

Critique lue 801 fois

16 j'aime

10 commentaires

Flagadoss

Écrit par

Critique lue 801 fois

16
10

D'autres avis sur The Last of Us

The Last of Us
Lehane
10

Lettre à Ellie

Ça fait quatre jours, moins de quatre-vingt-seize heures, et je ne m'en suis toujours pas remise. Oui, j'ai peur, parce qu'il faut que j'écrive à quel point j'ai aimé The Last of Us. Je dois,...

le 26 août 2014

127 j'aime

41

The Last of Us
Vnr-Herzog
9

My first, my last, my everything.

Il y a parfois des jeux dont le statut dépasse le contenu et The Last of Us fait partie de ceux-là. Un studio réputé, une sortie sur les derniers mois d'une génération de console et surtout une...

le 13 févr. 2015

71 j'aime

10

The Last of Us
Erwan
10

« The Last of Us », il va y avoir des spores

Ellie n’a pas l’air dans son assiette. Il y a un truc qui cloche. Elle reste en retrait, un peu perdue. On aurait pu passer à côté, ne pas remarquer ce comportement étrange, mais après plus d’une...

le 4 juil. 2013

67 j'aime

7

Du même critique

Pokémon, le film
Flagadoss
10

There is more than meets the eye.

Non mais il faut mûrir un peu avant de dire "olol Pokémon C pourh lé gam1". Grandissez et apprenez à savourer les petits plaisirs de la vie. Allez chercher un travail, soyez payé, achetez le DvD (ou...

le 11 juin 2011

141 j'aime

62

Pokémon X
Flagadoss
9

Reprennez donc de ce Xérès avec votre Yaourt.

Apparemment quand on a un pseudo de Pokémon, il faut faire des critiques de la licence au lieu de faire le rentier du like sur des vieilles critiques et listes. Soit. Après avoir réalisé le rêve de...

le 17 oct. 2013

138 j'aime

22

Gurren Lagann
Flagadoss
9

L'anime qui divise littéralement par zéro.

Tengen Toppa Gurren-Lagann, c'est trop bien. La preuve : je viens de regarder les 27 épisodes d'affilé et j'ai fait qu'une pause sandwich au milieu. Ça commence en douceur genre Shônen dans un monde...

le 8 juil. 2011

135 j'aime

29