Bon, allez. Il y a trop longtemps que ce profil SensCritique est vide de nouveau contenu. Il est temps. Temps de reprendre la plume, quitte à faire d'une pierre deux coups : rendre justice à un deuxième opus d'une jeune mais prometteuse franchise du jeu vidéo moderne ; et également pousser un franc coup de gueule face à toute cette diarrhée verbale de réactions qualifiées par les plus spécialistes que moi de review bombing significatives d'une part conséquente de "joueurs" prêts à réclamer aux développeurs un nouveau jouet comme des sales gamins pourris gâtés parce que celui qu'on leur a pondu ne leur convenait pas. Pour quelles raisons ?
Un spoil plus ou moins malencontreux d'un ex-employé mécontent de Naughty Dog peu avant la sortie du jeu, entraînant un report de cette dernière et une controverse de plus au catalogue bien chargé de la boîte au chien fou ? Qu'il y ait des conditions de travail déplorables dans le milieu du concept vidéoludique, c'est une réalité. Bien triste, j'en conviens. Assez justificatif pour mettre le produit final au pilori sans même y avoir touché ? Mouais.. Pas simple de lancer un jeu dans un tel contexte, surtout au milieu d'un océan de mentalités discutables.
Un scénario qui promettait des thèmes osés : identité sexuelle, religion, scènes de sexes ou de violence poussées dans leurs derniers retranchements à un point rarement atteint dans un média pourtant très souvent conspué pour sa soi-disant banalisation de la violence ? Actuellement, une pétition circule sur le Net réclamant purement et simplement un remake du jeu modifiant son scénario.
Morceaux choisis : "On a besoin d'un remake du jeu, car celui-ci a manqué de respect à tous les fans qui ont attendu 7 ans pour la suite." "Tout ce que l'on voulait, c'était une suite à propos de Joel et Ellie ; pas une histoire de lesbiennes." "Je trouve amusant que tout le monde déteste ce jeu et je souhaite voir les développeurs souffrir." (sic)
Voilà. On en est à ce niveau. Passé le constat de votre serviteur sur son scénar (bon dans l'ensemble, même si les deux dernières heures sur la trentaine proposée par la campagne solo sentent un chouia le rallonge-tapis) ou ses thèmes "osés" (beaucoup de partis pris culottés, qui même s'ils ne sont pas tous payants gagent à donner au jeu son cachet si particulier dans le paysage vidéoludique), la communauté de joueurs s'octroie désormais le droit au caca nerveux parce que ce jeu ne lui plait pas. Parce que le personnage principal a le malheur d'être une lesbienne (avec un backgroung scénaristique béton, mais on s'en fout : c'est une gougnotte, on boycotte !), un transgenre et une fille hétéro au physique digne d'une armoire normande font (hélas) partie des autres personnages. C'est sûr, si elle avait moins de muscles, plus de poitrine et des porte-flingues en jarretières, ça passerait mieux, non ? Et ça se dit progressistes..
Posons la question : en quoi un casting comprenant des personnes LGBT serait problématique ? Dans le premier jeu, déjà, qu'est-ce que ça changeait ? La relation gay entre Ellie et Riley dans le DLC Left Behind ou le personnage de Bill ouvertement homosexuel donnaient-ils déjà aux joueurs l'envie de rager face au scénario ? Parce que le jeu ne faisait jamais l'erreur d'insister lourdement sur de tels aspects, qui suivaient paisiblement le déroulement de la trame scénaristique. Certes, pour The Last of Us Part II certains marketeux maladroits ont un chouia survendu l'aspect femme forte et progressiste, mais ce qui compte c'est le jeu. Pas comment on le vend. Et le jeu est également très discret en lui-même sur l'identité sexuelle de certains de ses protagonistes (quelques détails au détour d'un document papier, ou des mots échangés le temps d'une conversation d'à peine deux minutes).
Et quand deux d'entre eux ont (pourtant très fugacement) un rapport sexuel hétéro et consenti à l'écran, cela arrive naturellement. Rien de choquant ou d'exceptionnel ; et quitte à reconnaître une qualité à cette scène de trente secondes, elle est beaucoup mieux amenée et moins maladroitement exécutée que la dernière à laquelle j'avais assisté un pad à la main (n'est-ce pas, Heavy Rain ?)
The Last of Us premier du nom, déjà, prônait via son histoire et son scénario un message fort d'empathie et de tolérance. Il est illogique de se prétendre fan du premier jeu quand on lapide sa suite pour de pareilles raisons. C'est précisément le genre d'individus qui essayent de rendre honteux et de stigmatiser le fait d'aborder des sujets comme la violence, la religion, ou l'identité sexuelle. Alors que c'est leur propre hypocrisie qu'ils essayent de noyer dans ce tonneau. De là à dire qu'ils ont réussis à ruiner une licence, ahem... Le jeu est à l'heure actuelle au niveau de ses ventes l'un des meilleurs démarrages pour une exclusivité Playstation.
Et mon petit lot de consolation, après l'avoir terminé, c'est que j'ai la conviction que même si tout ce pandémonium de réaction a pu faire de la publicité au jeu (mauvaise, soit ; mais de la publicité quand même), ses qualités réelles et avérées faisant de lui l'une des meilleures expériences de la Playstation 4 en matière de survival horror n'ont pas été inventées par une cohorte d'imbéciles haineux pas foutus d'apprécier ce que sept ans de travaux acharnés d'un studio leur ont donné.