Thimbleweed Park
7.1
Thimbleweed Park

Jeu de Terrible Toybox (2017PC)

En anglais, "red herring" ("hareng rouge") désigne une fausse piste, un indice placé ici pour vous induire en erreur. Thimbleweed Park en contient beaucoup. Mais présentons rapidement ce jeu.


Un meurtre est commis dans la ville de Thimbleweed Park, ou plutôt près de la rivière, sous le pont de chemin de fer. Deux agents enquêtent : l'agent Ray, une rousse entre deux âges à qui on ne la fait pas, et Reyes, un jeunot attaché au manuel du bon flic, qui prétend être envoyé par le bureau d'Albuquerque. Ils interrogent les habitants. Le shériff, le légiste et le gardien de l'hôtel se ressemblent étrangement. La ville a des boutiques abandonnées depuis l'incendie de l'usine de Pillowtronics, fondée par Chuck Edmund. Les gens utilisent des machines à tube à vide. L'usine, qui a brûlé il y a plusieurs années, semble receler un secret. Au gré de l'aventure, divisée en plusieurs chapitres, vous allez contrôler 5 personnages différents : outre les deux fédéraux, Delores Edmund, la nièce de Chuck douée pour l'informatique, et Ransome, le clown insulteur, ainsi que le fantôme du père de Delores, qui n'a donc pas de consistance physique.


Les énigmes sont faisables, même si vous bloquerez sur quelques-unes. Elles sont du niveau de celles de Maniac Mansion, donc ne vous inquiétez pas. Si vous bloquez, revenez sur vos pas, fouillez bien les décors et pensez à parler avec les PNJ, ils répondent différemment selon le personnage utilisé. Le jeu évite le point noir de Monkey Island 2 : la trop grande profusion d'objets dans l'inventaire, d'autant que certains objets sont propre à un personnage. A noter que vers la fin, vous devrez faire une recherche sur internet.


L'univers est loufoque, avec des influences très diverses. La plus visible est celle des autres point-clicks de Ron Giblert : vous aurez des références à Maniac Mansion (y compris certaines pièces et objets d'inventaire), à Monkey Island ou même à d'autres jeux Lucasart comme les *Indiana Jone*s (les piquets de file d'attente de la banque). Si vous n'avez pas de culture concernant les point-clicks, allez faire tous ces classiques.


Parmi les autres influences, la plus évidente est Twin Peaks, avec des allusions à la tarte à la cerise chère à Dale Cooper.


Au niveau narratif, le jeu ne fait pas de sens. Les personnages ont tous un background, avec des motivations cachées, mais ils coopèrent sans se connaître, comme s'ils étaient doués de télépathies, ou comme s'ils recevaient des ordres d'une entité supérieure. ^^


Il y a beaucoup d'humour. Les vannes métaludiques sont un peu lourdingues ("cet objet a l'air de servir surtout à la fin du jeu"), mais il y a une option pour les désactiver (tout comme une option pour inverser le sens d'enroulement du papier toilette !). Le dénouement est malin est émouvant, pour peu que l'on soit sensible à la nostalgie des vieux jeux.


Il y a quelques scènes d'anthologie, comme celle du couloir des lasers, l'énigme de la tour radio, celle de la société secrète ou celle des appels anonymes.


J'ai eu un bug très troublant, dans lequel le légiste apparaissait dans la cage d'escalier de la morgue. J'imagine que c'était fait exprès. C'est très bien vu, j'ai cru halluciner et j'ai cherché en vain un passage secret pendant plusieurs minutes.


Et visuellement ? Le jeu est en pixels, mais il y a énormément de nouveautés comme devait en rêver Gilbert à l'époque : des animations pour monter aux échelles, un très bel éclairage dynamique, une bande-son agréable dans l'ensemble, beaucoup d'actions gratuites, comme regarder l'hôtel Edmund dans son entièreté. De même, les backers ont enregistré des centaines de messageries différentes, pas forcément drôles mais par curiosité, vous pourrez en lire quelques-uns, tout comme les milliers de "livres" présents dans la bibliothèque du manoir. Un peu artificiel comme easter egg, mais pas désagréable.


Il y a quelques éléments frustrants, principalement liés aux déplacements : ce très long passage dans le cimetière ou le long de la route, était-ce bien nécessaire ? De même, dommage que l'on ne puisse se téléporter directement à la sortie d'une salle en double-cliquant dessus.


Et je clos sur par là où j'avais commencé : Thimbleweed Park est un peu la fête au hareng rouge. Vous verrez que si le jeu n'est pas excessivement dur, les fausses pistes sont nombreuses, et l'on se prend à rêver à un autre jeu, dans lequel elles auraient existé : de l'utilité d'une cassette Betamax, d'un serpent-surprise, etc... C'est un peu frustrant, mais ça fait partie de la poésie des jeux de Ron Gilbert.


Au final, Thimbleweed Park est un bon point-click. Ses énigmes ne sont pas révolutionnaires (pour cela, allez plutôt voir les productions de Wadjet Eye, notamment la série des Blackwell), mais il fait le taf. Ôtez deux points si vous n'avez jamais joué à un jeu de Ron Gilbert (les références vous passeront au-dessus). Même ainsi, je vous le recommande vivement.

zardoz6704
8
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le 28 juin 2017

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zardoz6704

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