Globalement réussi

Je ne vais pas jouer l'hypocrite : je n'ai pas acheté ce jeu à sa sortie - lassé et démotivé par cette franchise s'enfonçant dans la généricité et/ou les contextes peu immersifs pour un joueur "RP" -, sans doute un an après de mémoire et je n'ai même plus le souvenir de ce qui différait par rapport à ma dernière partie débutée il y a quelques semaines. Je vais donc juger le jeu en l'état.

Concernant les défauts autant le dire tout de suite : il y en a des majeurs.
Le premier défaut est le versant négatif d'une des qualités du titre : la limitation du nombre d'armées. Si ce mécanisme présente un intérêt certain en termes de modélisation de la logistique et de tactique de terrain, elle entraîne néanmoins deux problèmes majeurs. Premièrement, la fonction de seuil qui sépare deux montées en capacité est beaucoup trop large. Ainsi, rester avec 4 armées alors que notre territoire est à la limite d'en autoriser "beaucoup" plus rend ces passages assez pénibles et délicats. Une fonction plus lisse aurait été plus juste. Deuxièmement, ces limites impliquent aussi une certaine monotonie du jeu une fois que notre empire a atteint une taille critique : incapables de lever des armées en plus grand nombre, les autres factions deviennent de fait impuissantes et trop faciles à soumettre.
D'un certain point de vue, cela reste plus réaliste mais voilà...c'est quand même un jeu.
La deuxième série de défauts est la même que celle de tous les Total War modernes : généricité de sunités, copier-coller, plus d’événements/informations historiques (sauf sans les DLCs...et encore), contenus annexes payants (ceci dit le jeu de base se suffit à lui-même bien que la sélection initiale de factions me paraît misérable), ... le topo habituel sur lequel je ne vais pas revenir.

Malgré cela, Rome II demeure tout de même une proposition solide.
J'ai parlé de taille critique tout à l'heure mais justement : un grand empire est beaucoup plus sujet à la corruption, aux guerres civiles, aux séparations, etc. et cet aspect là existe dans le jeu. Un aspect extrêmement rageant mais renforcé dans la mise à jour. Si vous ne prenez pas gare aux partis politiques/familles de votre nation, elles pourront créer une guerre civile et il faudra subjuguer cette nouvelle faction qui peut prendre beaucoup de vos terres.
De ce point de vue là, je trouve l'évolution du jeu assez intéressante en termes de modélisation : au début, on est petit et agile, on peut taper partout. Ensuite, il faut gérer les différents fronts, les alliés dangereux, penser à bien placer ses armées pour ne pas avoir à prendre 4 tours à revenir, etc.
Même si ce point est sujet à quelques soucis du point de vue de la difficulté (finalement CA a un peu foiré en voulant bien faire !) , cela montre au moins qu'il y a eu des tentatives de changements qui vont vers une meilleure voie que ceux complètement inadaptés au moteur des TW (par exemple les mini-villes dans Empire qui étaient une purge). Un peu de calibration et on y arrivera.

Au niveau des graphismes, je trouve ce Total War magnifique, bien plus qu'Attila qui a une UI horrible et une carte bâclée. On prend vraiment plaisir à parcourir le globe et voir les différents types de paysages, surtout en hiver où le contraste est saisissant.
Les batailles sont assez déséquilibrées sur certains points mais j'avoue ne pas trop y faire attention, étant avant tout un joueur "RP". Quoi qu'il en soit, l'ensemble est plutôt jouissif et il est possible de mettre en place des stratégies intéressantes.

Mais si ce Total War me plaît c'est surtout qu'il constitue la sandbox TW historique "indo-européenne" ultime. Certes Empire était plus vaste mais les provinces n'étaient ni aussi détaillées en termes de découpage, ni aussi belles. Ici, on a vraiment la carte iconique de l'antiquité avec la zone Perse, le nord de l'Afrique, l'Europe, la Scythie, ... : il y a de quoi se régaler et se livrer à plein d'épopées romantisées : jouer le nouvel Alexandre, imaginer les plans des scythes, ... De ce point de vue, il y a tous les éléments : ambiance graphique, musique, factions, théâtre parlant (le Japon pour ma part, ça ne m'immerge pas du tout ne voyant aucune différence entre telle ou telle province en termes de symbolique/de culture), tentative de modélisation "réaliste" des conditions de gestion militaire, ...

En conclusion, malgré ses défauts inhérents à la nouvelle école de la licence et aux qualités pas toujours bien maîtrisées, Rome II tire son épingle du jeu par son exécution, son contenu, son "ergonomie" (de fait, Rome II est assez simple à approcher et s'avère épuré dans ses mécanismes même si l'on peut creuser certains points, un peu comme Medieval II) et sa finition générale qui font oublier ce que l'on a perdu par le passé. Il conviendra parfaitement aux joueurs qui aiment se projeter dans l'histoire de leur faction, conquérir, etc. , sans doute moins à ceux qui préfèrent les batailles et détail des mécanismes (Attila sera un meilleur choix).