Cover 2020, des saisons qui filent, des images plein les yeux

2020, des saisons qui filent, des images plein les yeux

L'image-mouvement, l'image-temps.

(des envies de Wang-Bing, de Fassbinder, de Jarmusch, de Godard ; de choses qui filment des petites choses et des personnes simples ; tout conseil est bienvenu comme toujours)

Et encore, merci infiniment au Cinématographe pour ses ...

Afficher plus

Liste de

72 films

créee il y a plus de 4 ans · modifiée il y a plus de 3 ans

Boy Meets Girl
6.8

Boy Meets Girl (1984)

1 h 40 min. Sortie : 21 novembre 1984 (France). Drame, Romance

Film de Leos Carax

Rainure a mis 8/10.

Annotation :

3 janvier 2020
---
Travail immense du son, personnages en natures mortes, tout casse tout, les personnages et leur voix, les chemins, les rencontres. On cherche ailleurs voir si on y est, on n'écoute pas les conseils, on chantonne Barbara, la nuit et le rêve viennent tout ravaler, ça et l'irritation, la perturbation de la télé - comme la veste d'Alex.
L'enfer tiède des flippers, des reflets, de ce qui sépare, ce qui observe et traîne, le gris qui écharpe et noie, les personnes qui ne vivent plus autour de nous, le réconfort tenté dans les yeux de biches, dans le répondeur.
Et puis ce monologue de quoi ? Même pas vraiment d'Amour, de douleur peut-être, de mal-vivre, qui serait presque du Gaston Miron :
https://www.senscritique.com/activity/120220/419115

« Moi je suis cinéaste. - Dans le cinéma ou la vidéo ? - Non… Si tu veux, pour l’instant, j’invente les titres des films que je vais faire. »

« Et dire que quand Mozart avait mon âge, il était mort depuis 2 ans ! Mais je vais m’en tirer… M’en tirer une dans la tête ! »

Les Chansons d'amour
6.6

Les Chansons d'amour (2007)

1 h 40 min. Sortie : 23 mai 2007 (France). Drame, Musique, Romance

Film de Christophe Honoré

Rainure a mis 3/10.

Annotation :

12 janvier 2020
---
Gène immense et crispations pendant peu ou prou tout le film. Les quelques chansons d'Alex Beaupain que je pouvais aimer sont reprises dans des versions d'un fadasse - et la pauvreté du tout souligne la pauvreté de certains couplets, de quoi tirer des fous rires involontaires parfois, avant de m'en attrister l'instant d'après ("je suis jeune, breton, et je sens bon la crêpe au citron", sérieusement).
Aucun sens, aucune idée de réalisation, n'est pas Demy qui veut, et la mollesse du jeu global, sans aucune énergie, sans effort, n'aide pas. On résumerait plus simplement : j'ai détesté, enfin (on finit sur du Barbara, "Ce matin-là", c'est bien tout à sauver).

Stranger Than Paradise
7.2

Stranger Than Paradise (1984)

1 h 29 min. Sortie : 9 janvier 1985 (France). Comédie dramatique

Film de Jim Jarmusch

Rainure a mis 7/10.

Annotation :

14 janvier 2020 (cycle Jim Jarmusch)
---
Les transitions noires de plusieurs secondes, qui tendent au relâchement de l'attention, comme ces scènes qui traînent un peu, qui se laissent à durer, où l'on finirait par rire pour rien devant les personnages qui s'agitent à peine, boivent leur bière face à face sans mot dire.
Billie et Willie : on croirait Vladimir et Estragon, sur la nappe de neige devant les carcasses de train de l'Ohio (je reforme la scène dans ma tête, les chapeaux élimés, l'immobilité, même une réplique qui me faisait penser à Beckett). On est à Cleveland, après New York, et on s'y emmerde tout autant (pourtant on ne veut pas retourner à New York, pour quoi ? on s'y emmerderait tout de même). Cleveland, la morne, pas loin du lac Erie que chantait Jason Molina dans un morceau (U.M.W. Pension), si c'est ici que traînait le jeune Molina, pas étonnant qu'il ait fait de telles chansons. Sauf qu'il y a la routine de la vie - draguer au cinéma, dans la séquence la plus drôle du film, manger et jouer avec la grand-mère pittoresque. Repartir pour espérer autre chose dans des contrées dont le nom évoque le dépaysement, l'aventure : la Floride. Mais là-bas non plus on n'y est pas à sa place, on se confine, fume et s'ennuie. On y répète les choses déjà faites plus tôt, à New York, on mise, on vivote puis on file.
Aussi, forcément, tout le côté hommage à Wim Wenders, un noir et blanc d'usines et d'intérieurs de voitures, je revois le voyage retour dans l'Etat des Choses, ou justement l'ennui des personnages laissés à eux-mêmes de ce même film.

Blow-Up
7.3

Blow-Up (1966)

1 h 51 min. Sortie : 24 mai 1967 (France). Drame, Thriller

Film de Michelangelo Antonioni

Rainure a mis 8/10.

Annotation :

22 janvier 2020
---
Redire ce qui a été dit ? - le silence et la disparition, le temps figé, l'imaginaire et le réel. Ce sont des antiquités et des couleurs modernes, pimpantes, des étonnements sur la vraisemblance, le vrai, des jeux d'enquêtes et de zooms - quelque part entre l'égarement et la vie.

(et cette dernière séquence, évidemment...)

Irina Palm
6.8

Irina Palm (2007)

1 h 43 min. Sortie : 9 mai 2007 (France). Comédie dramatique

Film de Sam Garbarski

Rainure a mis 3/10.

Annotation :

23 janvier 2020
---
Impressions de sous-Ken Loach, sans aucune idée vraiment de réalisation - à la limite les néons du club qui finissent par faire une ambiance - et sans grand enjeu non plus (tout est tiède, sans saveur, sans poids) ; inoffensif et parfois un brin ridicule, bref, de l'ennui.

Mystery Train
7.4

Mystery Train (1989)

1 h 50 min. Sortie : 6 septembre 1989 (France). Comédie, Policier, Drame

Film de Jim Jarmusch

Rainure a mis 7/10.

Annotation :

24 janvier 2020 (cycle Jim Jarmusch)
---
Des traces de fantômes, des déceptions devant la vie trop simple, trop peu, pas plus que des cigarettes et de l'ennui, des reflets dans les vitres et des trains qui passent au loin. Là on y écoute la radio, réinventer des gloires parties depuis longtemps, là on y marche de long en large pour tenter d'apprivoiser Memphis, là on croise des inconnus et on prend le temps de quelques mots.
L'humour dans l'entre-mots, dans les regards en silence, dans quelques gestes pour repousser du dos de la main l'ennui justement.

Down by Law - Sous le coup de la loi
7.7

Down by Law - Sous le coup de la loi (1986)

Down by Law

1 h 46 min. Sortie : 12 novembre 1986 (France). Comédie, Policier, Drame

Film de Jim Jarmusch

Rainure a mis 8/10.

Annotation :

29 janvier 2020 (cycle Jim Jarmusch)
---
Des glissements : en un rien, cinq minutes, Jim Jarmusch vient dessiner la ville de Louisiane où commencent nos paumés : la caméra qui file comme une voiture, sans trop s'arrêter sur les policiers affairés, les fenêtres allumées, des carrefours et des carrefours. Pareil, un rien pour les personnages : l'apathie à ce qui leur arrive, ou à peine Roberto qui sort de la nuit pour y retourner, à peine.
Il faut vraiment la cellule de prison pour s'envoler. Alors, on a Roberto et son incompréhension, ses dialogues à plat, la langue qui ne se partage pas et donne une fouillerie hilarante de gags kaufmaniens, de paroles suspendues pour laisser la gêne venir, et la surprise. Des choses et des choses de la tendresse, des gueules qui s'en veulent et s'engueulent, se refont alors que Roberto s'acharne en amitié, en tentatives de bonté : tout le passage comme dans un paysage lunaire inconnu, dans ce noir et blanc des marais, les arbres comme des rayons glacés, et l'enlisement jusqu'à la taille.
Bref, pataugeage et pataugeage qui gagne par les choses qu'il distille sur le côté, par les tronches de Waits, Lurie et Roberto, par les soupirs et les vagues.

Chungking Express
7.7

Chungking Express (1994)

Chung Hing sam lam

1 h 42 min. Sortie : 22 mars 1995 (France). Comédie dramatique, Romance

Film de Wong Kar-Wai

Rainure a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

04 février 2020 (revu)
---
Revu, pas de changement, toujours mon Wong Kar-Wai préféré, l'attention au flou, aux fragilités, au jeu, à la navigation. Exacerber les riens d'une vie, la petite chose, ce qui poigne et touche.

Night on Earth
7.5

Night on Earth (1991)

2 h 03 min. Sortie : 18 décembre 1991 (France). Comédie, Drame, Sketches

Film de Jim Jarmusch

Rainure a mis 7/10.

Annotation :

08 février 2020 (cycle Jim Jarmusch)
---
Fresques inégales - le passage à Paris surtout, le plus insipide.
Le film est beau en dessinant des amitiés fortes qui naissent des riens (le premier portrait d'empathie fille-mère), drôle quand il ose aller dans le plus grotesque (Helmut, clown allemand conducteur de taxi ; Roberto Benigni délirant dans son propre rôle à Rome), froid quand il laisse monologuer des personnages sur leur pas-grand-chose (Helsinki).
Trop délié pour que je m'y attache toujours, malgré Tom Waits qui beugle ses chants toujours, malgré la nostalgie que met Jarmusch dans les banlieues tristes, les ruelles parcourues, malgré les effets de caméras ou les expressions exacerbées des réactions, des personnages ; des clopes et des klaxons, partout minuit-néons, l'argent qui passe de main en main, des sournoiseries ou des affections.

Porco Rosso
7.7

Porco Rosso (1992)

Kurenai no Buta

1 h 34 min. Sortie : 21 juin 1995 (France). Animation, Aventure, Fantastique

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki

Rainure a mis 7/10.

Annotation :

10 février 2020 (revu)
---
Je retiens surtout le centre du film - tout le passage à l'atelier de Milan, l'évolution des désirs et confiances, les essais et l'amour de la mécanique, de l'ingénierie de l'avion, et bien sûr la voie lactée d'avions, le deuil et le reste.
Ici, on chante élégamment le temps des cerises pour un Amour qui ne viendra jamais, on fait réagir et dessine les personnages comme ces films italiens des années 50, 60, on rend grâce à la beauté des ciels et de la mer, du soir au matin, et on pastiche un peu Ravel pour la bande-son (ou Isao Tomita un peu, pour le passage plus fantastique, la mer de nuages). Un film de plaisir sans doute pour Hayao, qui n'empêche pas de dessiner au plus correct des humains (doutes, angoisses à demi-mots, naissance des tendresses, tentative de s'accorder avec ses valeurs malgré les pressions extérieures, quelle place pour l'héroïsme).

La Chasse
7.9

La Chasse (2012)

Jagten

1 h 55 min. Sortie : 14 novembre 2012 (France). Drame

Film de Thomas Vinterberg

Rainure a mis 5/10.

Annotation :

21 février 2020
---
Quelques choses sur le mensonge qui nous dépasse, le silence qui amplifie ce qui tonne, les non-dits qui laissent planer le doute, les instincts. Quelques jeux de regards qui fonctionnent, se retourner d'un coup pour parler des yeux. A part ça, beaucoup d'exagération et de choses qui vont très vites pour donner du catastrophisme, du jeu de massacre dans les règles de l'art, avec une mise en scène net + ultra, très danoise en fait, propret et "chaleureux" dans le lisse, et la tête de Mads qui se retourne et regarde droit dans la caméra très sûr d'être dans son rôle à fond. Bref, ça me laisse froid.

Le Roi et l'Oiseau
7.8

Le Roi et l'Oiseau (1980)

1 h 23 min. Sortie : 19 mars 1980. Fantastique, Animation, Romance

Long-métrage d'animation de Paul Grimault

Rainure a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

22 février 2020 (revu)
---
Je dirai bien : à quoi bon, à quoi bon ! - mais à vrai dire, chaque fois que je le revois sautent aux yeux de nouvelles surprises ou points de vue ; cette fois m'aura frappé la descente dans les bas-fonds cauchemars, avec une bande-son extrêmement angoissante de battements, grondements, crissements ; l'étale des toiles et statues dans une foule de styles pour représenter le roi bien sûr, le lâcher-prise qu'il faut accepter pour certaines faiblesses de l'animation (les personnages assez laid au demeurant pour beaucoup), la foultitude des réactions, des détails, et surtout les fonds peints, les ruines du château au crépuscule vraiment magnifique. Bref, pas pour rien qu'il a inspiré et inspiré, celui-ci.

Le Départ
6.9

Le Départ (1967)

1 h 29 min. Sortie : 6 décembre 1967 (France). Comédie dramatique

Film de Jerzy Skolimowski

Rainure a mis 7/10.

Annotation :

26 février 2020 (cycle Jerzy Skolimowski)
---
Plaisir de la vitesse et de l'accélération, du gag, du visuel et de l'auditif avant tout : j'ai vécu "Le Départ" comme un grand manège, vacarme, où les myriades d'événements ne seraient que du détail, du rêve même (pellicules brûlées, rembobinages, scènes réminiscentes), où les personnages ne serviraient plus que de pantins valsant pour le bon plaisir de Bruxelles, des pions chahutés et chahutant qui multiplient les inactions (toutes les voitures volées pour être rendues, ou simplement la dernière scène), les fiascos tout en multipliant les bons mots, les fantaisies, dans une sorte de grande galerie des glaces noir et blanc, un Bruxelles de vitres et de reflets, de lumières et d'ombres, où on prétexte sur ce qui passe devant ou derrière la trame (défilés incessants de chevaux blancs, de voitures), sur les farces, les faux (se blesser pour rien, saigner pour de rire, faire le mort ou le génie volant au-dessus du sol).
Le tout dans l'embrouillamini des mots, des phrases de Jean-Pierre Léaud façon Nouvelle Vague, des choses mâchées, noyées dans l'excellente bande-son (tout aussi folle, déroulement de vagues jazz ou chanson), de la moquerie, de l'étonnement.

Souvenirs goutte à goutte
6.9

Souvenirs goutte à goutte (1991)

Omoide poro poro

1 h 58 min. Sortie : 31 octobre 2007 (France). Drame, Romance, Animation

Long-métrage d'animation de Isao Takahata

Rainure a mis 8/10.

Annotation :

01 mars 2020
---
D'un autre point de vue.
Chez Miyazaki, il y a beaucoup de mécanismes, de rouages, de dessins techniques et autres connaissances et dessins d'ingénieur, là où Takahata approche plus du travail d'artisanat paysan, des cultures irriguées, sarclées, des cueillettes (même si bien sûr on le voit aussi chez Hayao, ça reste une même passion d'un travail bien fait, avec cœur).
Omoide Poro Poro parlera de cette paysanerie, ce retour à la terre, ce besoin de trouver un sens à ce qu'on fait - bien sûr ce n'est pas tout le propos, mais il y a de ça.
Plus largement, j'aurai été surpris de la finesse du traitement des personnages, d'abord toute une première partie majoritairement tournée vers les dix ans (les caprices, les tabous des règles, l'envie et la peur de se mettre en avant ou pas, pas tellement d'idée sur ce qu'on deviendra, en dehors des rêves éventuels, devenir une star de théâtre, se produire à la télé), ces dix ans regardés sous le prisme de l'âge, avec toute la tendresse nécessaire, le kitch, l'embellissement et la gentille moquerie de qui on pouvait alors être. Isao Takahata n'a pas peur de laisser respirer, vivre ses personnages, les remplir de gaffes, de doutes, de mouvements.
En ce sens, l'arrivée à la campagne proprement dite, qui amorce le deuxième grand mouvement du film, tourné plutôt vers les temps présents du jeune adulte - avec toujours parfois les souvenirs qui resurgissent - est un moment merveilleux ; l’œil de la jeune adulte qui essaie d'épouser ce qu'aurait pu être la joie de l'enfant de passer des vacances ici, loin de Tokyo, à se fatiguer d'une belle fatigue de journées de travail, les ongles pleins de terre, avec le fruit de son effort à renifler, tâter, utiliser. Et bien entendu, toujours les remords, le tord qu'on se dit irréparable, la question de ce qui nous attend maintenant, comment parvenir à vivre tel qu'on le souhaiterait, faire l'équilibre, faire le point. Tout un cheminement, de la pente douce, des pluies, des réponses qu'on trouve sans y penser, et beaucoup, beaucoup de sourires attrapés à la volée.

Toute la nodule :
https://www.senscritique.com/activity/120220/1350148

Deep End
7.6

Deep End (1970)

1 h 32 min. Sortie : 15 décembre 1971 (France). Comédie, Drame, Romance

Film de Jerzy Skolimowski

Rainure a mis 7/10.

Annotation :

04 mars 2020 (cycle Jerzy Skolimowski)
---
Bouleverser un monde avec la chair offerte. Ici, c'est l'émoi pour une femme idéalisée, Susan, qui va cruellement perdre Mike (ridiculisé, perdu), qui d'innocent va devenir obsédé pervers et manipulateur, ne va plus que se vouer à une chose jusqu'à la noirceur, à la perte de repères moraux, ne va plus qu'à chercher à réaliser ce qui n'est plus que son seul objectif, son fantasme prenant le pas sur sa vie autrefois mesurée et banale d'étudiant.
Enfin, je reste en partie extérieur à tout ça, je ne sais pas trop s'il faut en rire ou en pleurer - je retiens surtout la séance absurde des hot-dogs sur fond de Can, sorte de filature inutile et maladroite pour tenter de s'assurer de posséder Susan - elle, montrée dans ses bottes, maîtresse de ce qu'elle entreprend, décidée et correcte.

Ghost Dog - La Voie du samouraï
7.5

Ghost Dog - La Voie du samouraï (1999)

Ghost Dog: The Way of the Samurai

1 h 56 min. Sortie : 6 octobre 1999 (France). Drame, Thriller, Policier

Film de Jim Jarmusch

Rainure a mis 9/10.

Annotation :

16 mars 2020
---
Histoire de trouver sa voie. Ou comment épouser l'esthétique du samouraï et du plus simple tout en trouvant les détours comiques ou tragiques quand il faut. Une partie d'échec poursuivie sur les jours, les livres prêtés et impressions partagées, tout en accrochant à son éthique désespéramment, face aux temps qui changent de toute manière, les traditions qui se perdent et meurent, l'usage des choses démodées et des savoirs, des trucs ancestraux.
Redire donc les vieilles histoires bien connues (le samouraï de Melville, ou The Killer) à la sauce Jarmusch, avec ses paumés, ses villes parcourues au-milieu des pigeons, des crasses, sa douce violence qui arrive comme une évidence vers laquelle on ne se pressera pas.
Bref, encore une observation de hors-cadre, de personnes qui ne se fondent pas dans le décor, "the outcast", le français qui n'arrive pas à apprendre l'anglais, l'étranger aux pigeons, l'exubérante aux dessins animés incessants, un rien pour dessiner un attachement aux choses (le lecteur CD, la glace chocolat, le zen, bref).

Portrait de la jeune fille en feu
7.4

Portrait de la jeune fille en feu (2019)

1 h 59 min. Sortie : 18 septembre 2019. Drame, Historique, Romance

Film de Céline Sciamma

Rainure a mis 8/10.

Annotation :

18 mars 2020
---
Redonner la confiance, donner les éléments pour croire, les bras pour s'y jeter. Il y a dans Portrait de la jeune fille en feu quelque chose du cadre confortable : les tissus, soies moirées à souhait, oreillers, les compositions du sable et de la roche, la toile bien sûr - la chaleur des coins de bûche, le bois qui craque de manière générale - et la chair, les bras, les seins, les ventres. Les couleurs sont un peu pâlies, un peu surfaites et adoucies, reposantes.
Quelque chose de la sororité, dans cette île sans homme : on partage les secrets, confesses de femme en femme, tabous qu'il faudrait honteux devant d'autres, il y a l'entraide, les recettes, les apaisements.
Surtout surtout, oui, quel réconfort, tout trouver dans les bras, les regards de l'autre, jusque dans la trahison, jusque les larmes - quelles actrices, quelles démarches.
(pour ma part, je serai poète dans le conte d'Eurydice : je me serai retourné, je n'aurai eu que le souvenir)

Délivrance
7.6

Délivrance (1972)

Deliverance

1 h 50 min. Sortie : 20 septembre 1972 (France). Drame, Aventure, Thriller

Film de John Boorman

Rainure a mis 4/10.

Annotation :

20 mars 2020
---
L'impression de voir toujours souffrir et souffrir, fatigué de ces escalades du pire où il faut montrer encore plus et détruire, en laissant présager encore plus bas après, le tout n'est pas aidé par des montages de gros plans de visages incessants, de soupirs et cris de souffrances, et des fondus douteux, bref. Ronflant.

Mon voisin Totoro
7.8

Mon voisin Totoro (1988)

Tonari no Totoro

1 h 26 min. Sortie : 8 décembre 1999 (France). Animation, Fantastique

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki

Rainure a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

22 mars 2020 (revu)
---
Revoir, pour le bain d'innocence. Tout n'est pas sans gravité dans Totoro ; tout se passe plutôt comme si la pureté, la joie de vivre des enfants pouvait racheter le monde des adultes. Bien sûr, il y a l'aspect d'un conte, on n'est pas loin de Peter Pan ou d'Alice aux Pays des Merveilles - comme toujours on retourne surtout aux cultes et croyances nippones, on croise des jizo, des toris, autres fantômes et créatures jamais méchantes toujours mignonnes pour les yeux des petits. Alors il y a au moins deux mondes ici, celle de la campagne invisible aux humains, pleine de fantaisie et de rires, des légendes ; celle d'une vie qui se poursuit (hôpital, pleurs, craintes et travaux, vieillards et adultes) de l'autre côté ; entre les deux, les enfants comme frontière, et le merveilleux père des filles, joué pour la voix par Shigesato Itoi (mais si, la série des Mother !) dont on imagine qu'il est exactement ce père dans la vie réelle, naïf et perdu, qui ne fait pas toujours attention à tout, mais qui semble avoir laissé de côté les ombres, accueille sans douter les récits de ses filles, pourrait presque encore voir les créatures s'il n'était pas si adulte tout à fait, pris au travail et à la ville lointaine.

(et puis comme tout le monde, je voudrai me reposer sur le ventre d'un grand Totoro parfois, le câliner)

Roulette chinoise
6.9

Roulette chinoise (1977)

Chinesisches Roulette

1 h 36 min. Sortie : 16 novembre 1976 (France). Drame

Film de Rainer Werner Fassbinder

Rainure a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.

Annotation :

24 mars 2020
---
Cruauté d'une enfance, cruauté de la vengeance : ici les apparences, les faux-semblants viennent à être massacrés uns à uns - mis en évidence par le faux aveugle qu'on aperçoit rapidement. Et les nerfs mauvais se contaminent les uns les autres, comme les spores du malaise qui s'écoulent. Les mauvaises blagues d'un temps deviennent la réalité d'après, les portes closes et l'intime sont bafoués devant tant de ressentiment, de violence ; sourdement traînent des secrets sous le tapis, de l'immonde qu'on espère secrètement rejeter à jamais sous le tapis.
Mais non, tout le sale fait surface, tandis que dans le château sont réunis toutes celles, tous ceux voulant s'éviter, acceptant tacitement la cordialité - le muet des plastiques, des vitres plastifiées, du jeu d'échec, des infirmités.
Et toute les dernières vingt minutes, le jeu de la roulette chinoise proprement dit, toute la montée en tension parfaitement maîtrisée... Très facilement un des meilleurs Fassbinder que j'ai pu voir jusque là.

Uncut Gems
6.9

Uncut Gems (2019)

2 h 15 min. Sortie : 31 janvier 2020 (France). Thriller, Drame

Film de Josh Safdie et Benny Safdie

Rainure a mis 7/10.

Annotation :

26 mars 2020
---
Surabondance d'énergie qui devient aussi bien le défaut que la force du film - tout est maîtrisé et incessant, explosif, surtout dans la première moitié qui laisse à peine le temps de reprendre ses esprits ; c'est de l'exploration de gemmes, de miroitements, tout en escalade des paris impossibles d'Adam Sandler ; la deuxième moitié calme un peu le ton et tant mieux, jusqu'à une dernière séquence parfaitement tendue, qui nous prend au jeu et nous berne complètement : de la grande illusion, du fatras chaotique, de l'exubérance et du vulgaire.
Mention spéciale à la très bonne BO de Daniel Lopatin aussi, enveloppé du début à la fin.

L'Atalante
7.4

L'Atalante (1934)

1 h 29 min. Sortie : 24 avril 1934. Comédie, Drame, Romance

Film de Jean Vigo

Rainure a mis 7/10.

Annotation :

30 mars 2020
---
Filmer l'étale des fumées et des eaux, contempler la foule des objets et des caractères qui s'exubèrent à Paris, les chansons populaires, les remontées de fleuves, les poings et les cris, la dèche et le reste.
(plus sensible à l'image formidable, les allers-retours des pieds sur le pont, la tête plongée soudain dans l'eau, les assiettes cassées et plateaux d'échec renversés, qu'au propos, enfin)

Le Congrès
7

Le Congrès (2013)

The Congress

2 h 02 min. Sortie : 3 juillet 2013 (France). Science-fiction, Drame, Animation

Film de Ari Folman

Rainure a mis 6/10.

Annotation :

03 avril 2020
---
Effervescence et multiplication des idées, des bidouillages visuels, des illusions - du rêve dans du rêve dans une réalité modifiée dans des bonds temporels - pour le meilleur et le pire.
Le meilleur, donc, il y a la scène du scan qui vient relever un peu le goût des premières quarante minutes un peu fades tout de même sinon ; il y a Max Richter qui signe ma foi une BO pas trop mal, puis l'explosion non-cadenassée de formes, d'inspirations pops, de choses très vieux Mickey ou Tezuka dans les formes, les animations, du trip qui a le don de parfois étonner. Quelques enjeux sur le personnage, le paraître, sans doute. La fin assez conventionnelle et pourtant plutôt belle : s'il restait une chose à faire, ce serait revivre sa vie, donc.
Le pire, un peu le reste, continuellement le film semble vouloir faire un tour de force, présenter encore un repli dans un scénario pas si compliqué qu'il veut paraître, jamais très fin, outrancier souvent, et pas grand chose semble pouvoir se raccrocher au final ; de grandes espérances et peu de résultat, enfin.

Harvey Milk
7

Harvey Milk (2009)

Milk

2 h 08 min. Sortie : 4 mars 2009 (France). Biopic, Drame, Historique

Film de Gus Van Sant

Rainure a mis 5/10.

Annotation :

05 avril 2020
---
Très bon Sean Penn, mais enfin en dehors de ça, c'est de la biographie recopiée et filmée (joliment, quelques images d'émeutes, prises de paroles qui marchent), ni plus ni moins, lisse. Enfin, pour la représentation, pour l'espoir, on dira.

Oslo, 31 août
7.3

Oslo, 31 août (2011)

Oslo, 31. august

1 h 35 min. Sortie : 29 février 2012 (France). Drame

Film de Joachim Trier

Rainure a mis 8/10.

Annotation :

11 avril 2020
---
Plus rien que le malheur sur la face. De la douleur de voir un corps qui ne sait plus rien saisir aux mains tendus, plus que s'abîmer fasciné dans son propre malheur ; enfoncement promis, su, deviné. Rien n'est achevé, aucune énergie pour flotter, persister, plus rien que s'effondrer. Pourtant on cherche autour ce qui cloche, ce qui marche - on cherche pour mieux voir que rien ne nous va, ne nous ira, et c'est le plus terrible. Fâché de soi, trop faible pour rien que faire semblant...
Gorge tendue, scènes soutenues par leurs travellings flous, épousant la perte de repère, d'intérêt pour ce qui se passe d'autre, tout est délaissé, inachevé, sans stabilité.
Puis, la fin sur The White Birch... Tristement élégant, spleen de la ville qui nous restera silencieuse.

Lamentation :
https://www.youtube.com/watch?v=h-Ba7pbbp_Y

Soleil
6.5

Soleil (1988)

16 min. Expérimental

Court-métrage de Pierre Clémenti

Rainure a mis 5/10.

Annotation :

15 avril 2020
---
Disponible ici :
https://www.cinematheque.fr/henri/film/76293-soleil-pierre-clementi-1988/

Poème-filmé, aux très très belles images de Paris, superpositions de couleurs, miroirs, reflets, teintes ; je reste très en surface du texte malheureusement, très lointain aux douleurs et aux essais surréalistes, malgré la belle voix du conteur (un ami disait des accents bouaziziens). Bande-son étrange, à la fois hors-sujet et pourtant belle, puis tout à coup raccord, je ne sais pas ; un cinéma-expérience vague et qui flotte, qui m'échappe noyé dans ce temps-là.

Naissance des pieuvres
6.6

Naissance des pieuvres (2007)

1 h 25 min. Sortie : 15 août 2007. Drame, Romance

Film de Céline Sciamma

Rainure a mis 5/10.

Annotation :

15 avril 2020
---
Beaucoup moins convaincu que pour la Jeune Fille en Feu, dont on dirait un brouillon, une esquisse, pas grand chose. Je garde la très chouette bande-son de Para-One (oui), les touchantes maladresses, les retombées dans des soirées adolescentes, un peu "d'espaces pour soi", de défense de l'amie, d'entrée petit à petit dans un monde qu'on croyait tout à fait extérieur à soi.

Tomboy
7

Tomboy (2011)

1 h 22 min. Sortie : 20 avril 2011. Drame

Film de Céline Sciamma

Rainure a mis 7/10.

Annotation :

22 avril 2020
---
Des jeux et de l'imaginaire d'enfant, des apparences et des mensonges.
Il est ici questions de doutes, de plein de doutes sur le soi, ce qu'on prétend être, ce qu'on est, ce qu'on voudrait être ; il est question de carcans, de rôles forcés et épousés, de confrontations et de pardons. Tout est tendu par l'angoisse permanente du double-jeu et conventions, et soulagé par l'innocence des enfants, jeux d'eau, courses, bagarres. C'est surtout deux duos qui captivent, justes : Laure et sa soeur, Mickaël et Lisa ; scènes touchantes de confidences, de désavoeux et aveux, et surtout la dernière très très belle scène, de possibilité de repartir malgré le sentiment de Lisa d'avoir été trahie, de comprendre que ces choses arrivent.

Pompoko
7.2

Pompoko (1994)

Heisei tanuki gassen pompoko

1 h 59 min. Sortie : 18 janvier 2006 (France). Animation, Fantastique, Comédie dramatique

Long-métrage d'animation de Isao Takahata

Rainure a mis 7/10.

Annotation :

28 avril 2020
---
Peut-être le film le plus ouvertement "anticapitaliste" (gros guillemets) de Takahata - au programme, militantisme écologique sous toute ses formes (actions violentes comme non-violentes, réunions et assemblées houleuses, proto-zads et occupations, le tout regardé avec beaucoup de tristesse et d'amertume tout de même devant les échecs et l'inutilité répétée), récupération médiatique par de gros bonnets (le propriétaire du parc d'attraction), enfin en tout cas c'est un conte cruel sur l'avancée des villes, purulences urbaines qui arrivent pourtant, dont témoigne notamment le passage magnifique de la "dernière illusion" où les tanukis donnent une dernière fois à voir ce qu'était la montagne (on penserait à la montagne Limousine qui se défend) aux humains, avant de perdre cette illusion devant l'inéluctable des travaux qui ont gagné.
Takahata est toujours autant passionné de la campagne et des traditions : croyances bouddhistes, shintoïstes, animismes et imaginaire japonais de yōkai et autres monstruosités : ça donne notamment une scène magnifique de défilé, de très très drôles de transformations de roubignoles, de l'imaginaire en veux-tu en voilà.
Entre deux scènes de transformations, parfois quelques blancs, quelques passages à vide qui cassent un peu du rythme, pas le meilleur Takahata mais ça reste plus intelligent qu'on peut croire, dissimule beaucoup en arrière-plans et fulmine souvent.

La musique de la plus belle scène, très Eno dans l'esprit :
https://www.youtube.com/watch?v=Uz4OLOpXKCo

Room
7.5

Room (2015)

1 h 58 min. Sortie : 9 mars 2016 (France). Drame, Thriller

Film de Lenny Abrahamson

Rainure a mis 6/10.

Annotation :

30 avril 2020
---
Quelques pistes sur l'impact de l'enfermement, surtout un film en fable sur la reconstruction, dont la partie de ladite reconstruction fait un peu bâclé finalement, sans grand enjeu, sans grand impact - filmé comme une pub Ikea, rien qui ne retienne trop l'attention enfin (le gamin peut-être, la femme, leurs crises).

Rainure

Liste de

Liste vue 621 fois

8