Cover 100 grands chefs opérateurs et histoire de l'éclairage au cinéma ...

100 grands chefs opérateurs et histoire de l'éclairage au cinéma ...

*EN CONSTRUCTION*
Des pionniers aux modernes ... 120 années d'un parcours fait de lumière ...

PARTIE A : LE CINEMA DES PIONNIERS (1-14)
1. Thomas Edison et la "Black Maria" - 2. Tournage en lumière naturelle - 3. Les premiers studios - 4. Les premiers chefs opérateurs

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Liste de

141 films

créee il y a environ 8 ans · modifiée il y a 5 mois

Eugen Sandow
5.2
1.

Eugen Sandow (1894)

1 min. Sortie : 1894 (France). Muet

Court-métrage de William Kennedy Laurie Dickson

PiotrAakoun a mis 5/10.

Annotation :

A . LE CINEMA DES PIONNIERS

A.1 - THOMAS EDISON ET LA "BLACK MARIA"

Thomas Alva Edison (1847-1931) construisit le premier studio de prise de vue, avant même la naissance officielle du spectacle cinématographique, en 1893 dans le New Jersey, à proximité de son laboratoire de West Orange.

Il appela ce prototype "The Black Maria", ses employés le surnommèrent "le fourgon cellulaire". C'était un petit bâtiment, aussi grand qu'un garage de 6/7 mètres. Construit en bois, il était tapissé, à l'intérieur comme à l'extérieur, de papier goudronné de façon à empêcher les indésirables fuites de lumière. Le toit incliné s'ouvrait afin de laisser pénétrer la lumière du soleil jusqu'à la minuscule scène. Le studio était monté sur un plateau tournant (rails circulaires) afin d'orienter la scène à tout moment, en fonction de l'emplacement du soleil.
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/c/c5/Black_Maria_exterior_Meeker.jpg (dessin)

Devant une toile noire servant de décor, se succédaient les employés de la maison, et en particulier Dickson, des acteurs, des sportifs, les artistes du cirque Barnum ou de la troupe de Buffalo Bill et des compagnies théâtrales pour enregistrer leurs derniers succès. Les acteurs étaient vêtus de clair de façon à se détacher du fond.
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/7/70/Black_Maria_Meeker.jpg (dessin)

"C'est un bâtiment de forme oblongue, plus élevé au milieu, le toit a un pan mobile qu'un seul opérateur peut à volonté lever ou abaisser. La construction tout entière est d'un noir lugubre et inquiétant, enjolivé cependant d'une multitude de points métalliques. Les parois de l'édifice sont en papier goudronné, cloué. Avec son toit qui ressemble à une voile et sa couleur d'ébène, le bâtiment fait songer à un étrange navire, à une sorte de vaisseau pirate du Moyen Age, à l'embarcation d'un génie de la nuit ..." (W.K.L. Dickson, History of Kinetograph)
http://www.edisonfordwinterestatesblog.com/wp-content/uploads/2012/08/black-maria1.gif (photo)

Film "Eugen Sandow" :
https://www.youtube.com/watch?v=agvQxm_nPIw

La sortie de l'usine Lumière à Lyon
7.1
2.

La sortie de l'usine Lumière à Lyon (1895)

1 min. Sortie : 28 décembre 1895 (France). Muet

film de Louis Lumière

PiotrAakoun a mis 5/10.

Annotation :

A.2 - TOURNAGE EN LUMIERE NATURELLE

Avant le cinéma, le théâtre et la peinture avaient mis en place une codification de la lumière.

Les premiers opérateurs furent formés par les frères Lumière. Cependant, ils tournaient en lumière naturelle sans utiliser ses possibilités esthétiques ou dramatiques. A cette époque c'est la même personne qui écrit l'histoire, construit les décors, dirige les acteurs, assure la prise de vue, le développement, le tirage, le montage et la projection.

La projection d'images photographiques en mouvement était à l'époque l'aboutissement d'une quête de reproduction du réel.

L'utilisation de la lumière naturelle s'explique par cette fascination première du réalisme suscité par les images animées. De plus, les premiers films étaient tournés en extérieur, les spectateurs se contentaient de voir un train arriver en gare, les vagues sur des rochers, une parade de policiers ... Les images documentaires, qu'il s'agisse de celles des frères Lumière ou de celles qu'iront collecter partout dans le monde les opérateurs de Pathé, de Gaumont ou de la Biograph and Mutoscope Company, se satisfaisaient nécessairement de la lumière naturelle, même si cela interdisait pratiquement tout tournage en intérieur.

On ne peut pas séparer l'utilisation de la lumière naturelle des conditions techniques de prise de vue de l'époque :
- D'une part, les premières pellicules (noir et blanc) étaient "orthochromatiques" : cela signifie qu'elles étaient uniquement sensibles aux radiations bleues et UV.
- D'autre part, elles étaient très peu sensibles (6-8 Asa) et ne dépassaient pas les 10 ISO actuels (La norme ISO photographique ne fit son apparition qu'en 1987).
- Finalement, les éclairages artificiels de l'époque (bougie, gaz, pétrole) n'impressionnaient pas la pellicule, seule la lumière du jour était assez puissante.

La pellicule nécessitait une lumière intense, les tournages se déroulaient durant la journée, les jours ensoleillés, soit en plein air, soit en décors ouverts, ou même sur les toits d'immeuble pour gagner en luminosité.

Film "La sortie de l'usine Lumière à Lyon" :
https://www.youtube.com/watch?gl=BE&v=EXhtq01E6JI

Le Manoir du Diable
6.5
3.

Le Manoir du Diable (1896)

03 min. Sortie : 1896 (France). Fantastique, Épouvante-Horreur

Court-métrage de Georges Méliès

PiotrAakoun a mis 5/10.

Annotation :

A.3 - LES PREMIERS STUDIOS

A.3.1 - Star Film studio (Méliès)

Méliès, pionnier du cinéma artistique, utilisa les techniques scèniques du théâtre dès 1896. Images théâtrales qui se remanifesteront durant l'expressionnisme allemand.

Les fictions primitives requérant des installations spécifiques, des studios se construisirent progressivement pour faciliter les tournages.

En 1897, en France, George Mélies édifia à Montreuil-sous-Bois le premier véritable studio de cinéma, "La Star-film". Au terme de ses extensions successives, il avoisinera 200 m². A la façon des ateleiers de photographes de la fin du 19ème siècle, il était vitré sur toute sa toiture et trois de ses côtés, la lumière solaire était modulée par des rideaux coulissants et des volets mobiles. De plus, il profitait des techniques scèniques du théâtre d'illusion classique, la scène mesurait 60 m². La présence de coulisses, de trappes et cintres permettaient aux acteurs d'entrer, de sortir, de disparaître dans les dessous de la scène ou d'évoluer dans les airs. Des ateliers, coulisses, réserves de décors et d'accessoires complétaient l'ensemble.
http://94.citoyens.com/files/2013/12/Meliess_Montreuil_studio.jpg

L'axe de la caméra était perpendiculaire à la scène, cette position centrale etait celle d'un spectateur idéal.

"Cette unicité de point de vue de la caméra justifie le recours aux effets décoratifs du théâtre populaire de l'époque : toiles peintes où l'illusion de relief est principalement créée par des trompes l'oeil, éléments découpés qui rythment la profondeur, accessoires peints sur les murs, comme aussi les ombres qu'on ne saurait demander à l'éclairage naturel. Méliès, en effet n'a pas opté pour la lumière électrique, pourtant favorisée par les photographes depuis une dizaine d'années, et ses tournages dépendent entièrement des aléas du temps. Il lui faut tenir compte de surcroît, des caprices des pellicules encore très primitives, et aussi des couleurs qui seront ajoutées à la main sur les films et qui exigent que les éléments décoratifs qu'elles viendront rehausser conservent la transparence nécessaire." (J.P. Berthomé)

Film "Les Illusions Fantaisistes, 1909) :
https://www.youtube.com/watch?v=pwTlHPlQRKU

Les premiers films étaient anonymes, sans générique. Les seuls codes picturaux utilisés étaient des colorations de la pellicule : bleu pour symboliser la nuit et parfois orange pour le jour.

Film "Le Manoir du Diable" :
https://www.youtube.com/watch?v=mw8bzC33CGY

Alice au pays des merveilles
6.1
4.

Alice au pays des merveilles (1903)

Alice in Wonderland

08 min. Sortie : mai 1903 (Royaume-Uni). Fantastique

Court-métrage de Cecil Hepworth et Percy Stow

PiotrAakoun a mis 5/10.

Annotation :

A.3.2 - Biograph Company (New York)

La même année (1897), sur le même principe de poursuite de la lumière naturelle, l' "American Mutoscope and Biograph Company", installa sur le toit d'un immeuble New-Yorkais, un curieux dispositif : une cabine de prise de vues solidarisée avec une scène ouverte d'une dizaine de m², située à quelques mètres d'elle et capable de pivoter sur un cercle complet afin que la scène demeure toujours idéalement éclairée.
http://cinecollage.net/images/mutoscope_b.jpg

L' "American Mutoscope and Biograph Company", aussi appelée "Biograph company", fondée en 1895 était une compagnie cinématographique américaine très active dans la production de films jusqu'en 1916.

Elle fut la première compagnie entièrement vouée à la production et à la diffusion de films aux États-Unis. Durant deux décennies, ce fut l'une des plus prolifiques du secteur, produisant plus de trois cents courts métrages et douze longs métrages.

Le réalisateur David Wark Griffith rejoignit la Biograph en 1908 à la fois en tant que scénariste et acteur. Au bout de quelques mois, il devint cependant le principal réalisateur de la compagnie. Beaucoup des premières stars américaines du cinéma tournèrent pour la Biograph : Mary Pickford, Lionel Barrymore, Lillian Gish, Dorothy Gish, Robert Harron, Robert G. Vignola, Florence Auer, Carol Dempster, Alan Hale, Sr., Blanche Sweet, Harry Carey, Mabel Normand, Henry B. Walthall, Henry Lehrman et Dorothy Davenport. Mack Sennett a parfait son métier en tant qu'acteur et réalisateur de comédie pour la compagnie.

C'est à la suite d'un tournage d'une troupe menée par Griffith que fut « découvert » le site de Hollywood qui connaîtra rapidement une renommée mondiale.

"Alice in Wonderland", tourné en 1903, est notable par son utilisation d'effets spéciaux élaborés, comme la chute dans le terrier du lapin, les changements de taille d'Alice ou la transformation d'un bébé en cochon.

Film "Alice in Wonderland" :
https://www.youtube.com/watch?v=zeIXfdogJbA

Humourous Phases of Funny Faces
6.4
5.

Humourous Phases of Funny Faces (1906)

07 min. Sortie : 1906 (France). Animation

Court-métrage d'animation de James Stuart Blackton

PiotrAakoun a mis 5/10.

Annotation :

A.3.3 - Vitagraph studio (New York)

A la même époque, la Vitagraph fit construire le premier "Vitagraph studio" sur le toit d'un immeuble à New York. Durant les journées ensoleillées, l'équipe plaçait des toiles, et filmait rapidement avant que le soleil ne disparaisse.
https://farm4.staticflickr.com/3368/3419557092_d86ba8bc63.jpg

La société "Vitagraph" fut fondée à New York en 1896 par James Stuart Blackton et Albert E. Smith. La société fut vendue à la Warner Bros en 1925.

Jusqu'en 1906, James Stuart Blackton parait avoir été le seul réalisateur de la firme.
Film "Hooligan assists the Magician" (1900) :
https://www.youtube.com/watch?v=ryGonV01AMg

Les principaux réalisateurs furent George D. Baker, James Stuart Blackton, Van Dyke Brooke, William V. Ranous et Laurence Trimble.

James Stuart Blackton est l'auteur du premier dessin animé du cinéma sur support argentique (le Français Émile Reynaud étant le créateur du premier dessin animé du cinéma sur support non argentique en 1892), qu'il projette en 1906 et dans lequel on le voit dessiner à la craie un bonhomme qui se met à bouger, puis sa future épouse qui lui sourit. Le couple charmant vieillit en accéléré, prend des rides, s'enlaidit, le mari souffle avec muflerie la fumée de son cigare en direction de son épouse grimaçante, qui disparaît dans un nuage de fumée. L'animateur efface alors son dessin.

Film "Humorous Phases of Funny Faces" :
https://www.youtube.com/watch?v=8dRe85cNXwg

Uncle Tom's Cabin
6.

Uncle Tom's Cabin (1903)

13 min. Drame

Court-métrage de Edwin S. Porter

Annotation :

A.3.4 - Lubin studio (Philadelphie)

Siegmund Lubszynski, connu sous le diminutif Siegmund Lubin est un producteur de cinéma et un homme d'affaires américain, pionnier du cinéma.

En 1876 il ouvre un magasin d'optique dans la ville de Philadelphie. En 1896, il distribue les films de Thomas Edison, puis il achète la caméra de Charles Jenkins et tourne à partir de 1897 plusieurs films dans la ville où il construira la même année son studio sur un toit.
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f0/Lubin_openair_large.jpg

Il construit ensuite ses propres appareils, fonde la "Lubin Manufacturing Company" en 1902 et ouvre les premières salles de cinéma de Philadelphie jusqu'à la dissolution de son entreprise en 1917.

En juin 1914, un incendie dans son studio détruit malheureusement la plupart de ses négatifs.

Charlot Vagabond
7.2
7.

Charlot Vagabond (1915)

The Tramp

26 min. Sortie : 1915 (France). Comédie

Court-métrage de Charlie Chaplin

PiotrAakoun a mis 9/10.

Annotation :

A.3.5 - New York Picture Company / Keystone studio (Hollywood, LA)

La "NY Picture Company" construit son premier studio à ciel ouvert sur le Boulevard Edendale. Le baraquement fut repris par Bennett et devint le "Keystone Studio".
http://dl9fvu4r30qs1.cloudfront.net/d8/73e180f4b011e1baf122000a1d0930/file/Keystone-1917---courtesy-of-Steve-Rydzewski-678.jpg

Le studio est surtout célèbre pour ses comédies brutales (slapstick) qui reprenaient le jeu physique du vaudeville de l'époque. Les Keystone Cops, cette bande de policiers loufoques à qui arrivaient les pires malheurs. Avec 120 comédies burlesques tournées entre avril 1913 et juillet 1916 (il est réalisateur de plus de la moitié) Roscoe 'Fatty' Arbuckle est le principal artisan de la Keystone.

Film "Keystone Cops : Love, loot and Crash" (1915) :
https://www.youtube.com/watch?v=U1i1R4418Ys

Charlie Chaplin, y fait ses débuts en 1914, partageant les hauts faits d'armes du studio avec les fameuses beautés en maillot que Sennet aimait intégrer à ses productions (Sennett Bathing Beauties).

Parmi les comédiens qui ont lancé leur carrière avec la Keystone mentionnons : Gloria Swanson, Louise Fazenda, Raymond Griffith, Ford Sterling, Marie Dressler, Mabel Normand, Ben Turpin, Harry Langdon et Chester Conklin. Harold Lloyd y fit un bref passage en 1916 mais Mack Sennett qui ne l'appréciait pas, ne renouvela pas son contrat.

Film "Charlot Vagabond" :
https://www.youtube.com/watch?v=wCIVOSMzbw8

Intolérance
7.4
8.

Intolérance (1916)

Intolerance: Love's Struggle Throughout the Ages

2 h 43 min. Sortie : 12 mai 1919 (France). Drame, Historique, Péplum

Film de David Wark Griffith

PiotrAakoun a mis 10/10.

Annotation :

A.3.6 - Triangle Film Corporation / Goldwyn Pictures (Hollywood, LA)

Celle-çi est une importante société de production et de distribution de cinéma fondée en 1915 par Harry et Roy Aitken à Culver City en Californie. Elle fut imaginée comme une compagnie de prestige basée sur les capacités de production des réalisateurs D. W. Griffith, Thomas Ince et Mack Sennett.
http://www.historiasdecinema.com/wp-content/uploads/2011/07/cias-triangle-satudio.jpg

Associant production, distribution et autres opérations dramaturgiques sous l'étiquette Triangle Film Corporation, les jeunes stars montantes ont fait naître le studio le plus dynamique d'Hollywood. Ce qui eut pour effet d'attirer les plus grands réalisateurs et stars de l'époque comme Mary Pickford, Lillian Gish, Roscoe « Fatty » Arbuckle et Douglas Fairbanks. Le studio produisit ainsi les films les plus durables de l'ère du cinéma muet, depuis "Keystone Cops" à "Naissance d'une nation".

Finalement, la compagnie s'essouffla. En 1917, elle perdit trois de ses principaux producteurs. La Triangle Film Corporation déclina lentement, et en 1918 fit faillite, les studios furent vendus, engloutis par les compagnies émergentes. Le producteur Samuel Goldwyn racheta les studios pour le compte de Goldwyn Pictures Corporation.

Film "Intolerance :
https://www.youtube.com/watch?v=SoaF8_dlqQA

Le Magicien d'Oz
6.3
9.

Le Magicien d'Oz (1910)

The Wonderful Wizard of Oz

13 min. Aventure, Fantastique

Court-métrage de Otis Turner

Annotation :

A.3.7 - Selig studios (Chicago)

Les studios de prise de vues se multiplièrent. Beaucoup de studios furent construit qui étaient avant tout des pièges à lumière permettant aux cinéastes de bénéficier à la fois du confort d'un espace clos, de la machinerie nécessaire et d'un ensoleillement maximal. C'étaient principalement des studios à verrières, et étaient surnommés "maisons de verre".

Ils étaient tous conçus sur le même principe de verrières, mais ne tarderont pas à supprimer les trappes et cintres, techniques de machineries théâtrales surpassées par les possibilités du cinéma.

La "Selig Polyscope Company" fût créée en 1896 à Chicago par William Selig.
https://chicagology.com/wp-content/themes/revolution-20/chicagoimages/seligchicagobirdseye.jpg

En 1908, elle rejoint le trust créé et dirigé par Thomas Edison, la puissante "Motion Picture Patents Company", regroupant de nombreux producteurs américains : Edison, Biograph, Vitagraph, Essanay, Lubin, Selig, Kalem, et deux producteurs français implantés aux U.S.A. : Pathé Frères et Star Film. Elle a produit son dernier film en 1923.

Film "Le Magicien d'Oz" :
https://www.youtube.com/watch?v=t75WURwIfv8

Germinal
7.4
10.

Germinal (1913)

2 h 30 min. Sortie : 3 octobre 1913. Drame, Muet

Film de Albert Capellani

Annotation :

A.3.8 - Studios Pathé (Vincennes)

En 1898, les deux frères Pathé construisirent une usine phonographique à Chatou, ainsi que deux studios de cinéma à Vincennes.

"Le studio est un simple hangar vitré dont l'ensoleillement peut être tamisé par des vélums mobiles. Une charte de couleur permet au cinéaste de connaître la traduction de celle-çi en noir et blanc. A gauche du décor se dresse un témoin dont la règle mobile délimite le cadre utile (et donc l'air de jeu) en fonction de l'éloignement de la caméra. Au-dessus des lampes à arc fournissent un éclairage d'appoint." (Le décor au cinéma)
http://www.tourisme93.com/Local/tourisme93/dir_img/patrimoine/industriel/studio-pathe-montreuil-schoon.jpg (Montreuil)

Film "Histoire d'un crime" (1901) :
https://www.youtube.com/watch?v=4fzObxlvOC8

Les installations ne parvinrent rapidement plus à satisfaire les exigences nouvelles, autant en quantité de films à produire qu'en moyens techniques requis pour y parvenir. Après avoir aménagé plusieurs théâtres de prise de vues en région parisienne, Pathé inaugurera à Vincennes, en 1904, un plateau équipé de deux scènes, situé au deuxième étage d'un immeuble, il rassemblait l'administration et les ateliers de la société. Mais ce ne fut pas suffisant et la production construisit un nouveau studio à Montreuil.

En 1918, les frères Pathé se sont convaincus de la suprématie de l'industrie cinématographique américaine et qu'il est illusoire de vouloir s'y opposer. Il s'agit alors de céder dans les meilleures conditions les différentes branches de leur trust.

À cet effet, la branche phonographique et l'usine de Chatou sont détachées de l'ensemble et continueront à fonctionner sous la direction d'Émile Pathé, qui abandonne ainsi toute activité dans la branche cinéma. En 1924, Émile Pathé prendra sa retraite et cédera ses intérêts à Marconi : la société s'appellera désormais « Pathé Marconi » bien que Pathé n'ait plus de participation dans l'affaire.

La branche cinématographique deviendra « Société Pathé Cinéma » et sera animée par Charles Pathé exclusivement.

https://www.youtube.com/watch?v=FMm2jlCOP6Q (annotations en anglais sur le film "Germinal")

Fantômas : À l'ombre de la guillotine
7
11.

Fantômas : À l'ombre de la guillotine (1913)

54 min. Sortie : 9 mai 1913 (France). Fantastique, Muet

Film de Louis Feuillade

Annotation :

A.3.9 - Gaumont (Buttes Chaumont)

Dès 1897, Gaumont réalise des documents d’actualités. C’est en 1910 qu’apparaissent les célèbres « Actualités Gaumont », projetées chaque semaine dans les salles avant le film.
http://www.dailymotion.com/video/x1g7fi5_les-actualites-francaises-1900-1950-60-ans-de-presse-filmee_webcam

En 1905, Gaumont, grand rival de Pathé, fit construire le plus grand studio de l'époque, aux Buttes Chaumont dans le vaste ensemble de la Cité Elgé.

"La longueur de la salle est de 45 m, la longueur de la scène est de 20 m et sa hauteur dépasse 34 m. Le plancher est établi pour pour soutenir même une troupe d'éléphants : une rampe facilite l'accès aux voitures attelées ; des dispositions spéciales permettent tous les trucs nécessaires aux féeries. Le toit est couvert par des dalles de verre armées pesant chacune 60 kg ; la surface vitrée dépasse 1.800 m et le poids de l'ossature métallique est supérieur à 180.000 kg. Un ventilateur de 2m50 de diamètre assure en été une température normale dans cet immense atelier." (extrait de "les établissements Gaumont" dans Phono-cinéma-revue écrit en 1908 par E. Lafuye.)
http://2.bp.blogspot.com/--3-Cw6B6Q6E/UEkKr2oJ7KI/AAAAAAAAANc/vuVsujQbG-I/s1600/gaumont001.jpg

L'expansion de Gaumont s'arrêta avec la Première Guerre mondiale et dans les années qui suivirent, elle perdit des parts de marché face aux concurrents américains, Hollywood, avec Griffith, DeMille, Sennett et Chaplin. À la mort du principal réalisateur et directeur artistique, Louis Feuillade, en 1925, la production de film s'arrêta et la compagnie se concentra sur l'aspect technique. Gaumont signe un accord de distribution avec Metro-Goldwyn-Mayer et les salles passent sous le contrôle de la Gaumont Metro Goldwyn qui en résulte.

Film "Fantomas : A l'ombre de la guillotine" :
http://www.dailymotion.com/video/xteoi7_fantomas-al-ombre-dela-guillotine_shortfilms

Le Mari de l'Indienne
5.2
12.

Le Mari de l'Indienne (1914)

The Squaw Man

1 h 14 min. Sortie : 15 février 1914 (États-Unis). Western, Muet

Film de Cecil B. DeMille et Oscar Apfel

Annotation :

A.3.10 - Standardisation des studios

On fit construire des locaux larges et vides dans lesquels on intégrait le plateau de tournage. Une structure en acier et des murs en verre permettait d'utiliser le maximum de lumière du soleil tout en restant protégé des intempéries.

Puis, les techniques ont évoluées, un système de velums (toiles blanches et noires coulissant le long des verrières) permettait de doser la quantité de lumière. On utilisait aussi des panneaux d'étoffe blanche ou noire, sur chevalets mobiles, pour moduler l'éclairement d'une zone du plateau. Des réflecteurs permettaient de rediriger la lumière ou de donner du niveau dans les ombres.

Ces 1ers studios étaient appelés "atelier théâtre" ou "théâtre pose", car ils ont emprunté aux ateliers photographiques les grandes verrières équipées de vélums et rideaux noirs afin de filtrer, contrôler ou obstruer la lumière solaire ; et au théâtre les décors, trappes, toiles peintes, et la machinerie.

"A l'intérieur de ces studios, les dispositifs de prise de vues sont restés longtemps immuables : plusieurs films sont tournés en même temps et côte à côte, de simples panneaux en guise d'éléments de décor faisant par la même occasion office de séparation, filmage frontal à hauteur d'homme, le champ étant délimité au sol par deux ficelles tendues en "V" à partir de la caméra donnant la limite pour garder les acteurs en pied" (Sculpteurs de lumières)

Au début, la demande était simple, mais tout s'est compliqué avec l'apparition des films dramatiques, composés de plus en plus de plans à partir de 1903. La nécessité d'un spécialiste de la prise de vue s'imposa. De plus, le "boom" du cinéma en 1906 exigeait de plus en plus de films pour remplir les Nickelodéons. Les studios de prises de vues se multiplièrent, toujours plus grands et mieux équipés, souvent accompagnés de terrains extérieurs où pourront être construits les décors trop importants pour les plateaux.
http://cache1.asset-cache.net/gc/88045698-the-backlot-at-universal-studios-california-gettyimages.jpg?v=1&c=IWSAsset&k=2&d=X7WJLa88Cweo9HktRLaNXgWe%2FeWRlG3qzhrAsruOTxZ0lN8wUN5tRZUtMIiqncP222fdPzNO4AB%2BPpOINf739g%3D%3D

Cependant, le soleil, capricieux, engendrait beaucoup de variations de la lumière. C'est d'ailleurs à la poursuite du soleil que le cinéma américain émigra de la côte Est, peu ensoleillée, vers la côte californienne ... où s'édifiera Hollywood en 1908.

"Le mari de l'Indienne" est le 1er long métrage tourné à Hollywood.

Le Vol du grand rapide
7.2
13.

Le Vol du grand rapide (1903)

The Great Train Robbery

09 min. Sortie : 7 décembre 1903 (États-Unis). Muet, Western

Court-métrage de Edwin S. Porter

PiotrAakoun a mis 5/10.

Annotation :

A.4 - LES PREMIERS CHEF OPERATEURS

Le métier de chef opérateur est le plus vieux métier du cinéma.

"Il fut pendant une longue période à lui seul le cinéma" (Louis Page, chef opérateur français des années 30 aux années 60).

Le metteur en scène fera son apparition plus tard, il dirigera les acteurs afin de soulager l'opérateur.

En 1903, les films commencent à se composer de plusieurs plans, et la nécessité d'un opérateur spécialisé est normalisée.

Le chef opérateur restait très limité, il voulait pouvoir choisir entre un éclairage doux ou dirigé afin non seulement de pouvoir exposer suffisamment la scène, mais aussi augmenter son pouvoir dramatique. Clairement, une méthode plus précise pour contrôler et travailler avec la lumière était nécessaire.

Dès 1910, les opérateurs explorèrent des nouvelles techniques d'éclairages : la lumière latérale, puis la lumière en contre ("back lighting") pour les scènes d'extérieur. Le soleil éclairait en direction de la caméra, sur le dos des acteurs et non en face d'eux. Le soleil de Californie étant très dur, la lumière était renvoyée par un réflecteur blanc afin d'éclairer le visage des acteurs.
http://old.bfi.org.uk/sightandsound/images/issue/420/broken-blossoms_420.jpg

Film "The Great Train Robbery" :
https://www.youtube.com/watch?v=fjRkHjIxz5Y

Naissance d'une nation
6.3
14.

Naissance d'une nation (1915)

The Birth of a Nation

3 h 10 min. Sortie : 22 octobre 1920 (France). Drame, Historique, Romance

Film de David Wark Griffith

PiotrAakoun a mis 5/10.

Annotation :

A.5 - LES ECRANS REFLECTEURS

Avant 1915, la théâtralisation des éclairages demeurait fort limitée, même si Griffith et son opérateur, Billy Bitzer, recherchèrent très tôt des effets signifiants : "Nous prenions notre travail très au sérieux à cette époque. Nous étions sans cesse en train d'innover, chahutant, jouant avec les objectifs et la lumière, non pas parce que nous n'avions aucune idée de ce que nous cherchions, mais parce que nous avions le vague espoir de trouver quelque chose" déclare Billy Bitzer.
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/b/b6/Billy_Bitzer_D_W_Griffith_1920.jpg/400px-Billy_Bitzer_D_W_Griffith_1920.jpg
(photo de Billy Bitzer et D.W. Griffith)

Ce dernier utilisait une variété d'innovations techniques, il tournait des scènes entières avec la lumière artificielle à une période à une époque où les studios étaient entièrement vitrés. Il utilisait souvent les fondus au noir, ou des transitions avec ouverture en cercle. Ses trouvailles étaient souvent le résultat d'un pur hasard. Par exemple, durant une pause d'un tournage pour la "Biograph", Mary Pickford et Owen Moore marchaient sur un chemin de graviers, soleil dans le dos. Bitzer remarqua que les graviers reflétaient une lumière douce sur les visages et illuminaient les ombres. Il aurait ainsi découvert les vertus de l'éclairage à contre-jour avec réverbération sur le visage. Il improvisa rapidement l'utilisation de la lumière réfléchie. Il fit alors fabriquer des écrans réflecteurs pour pouvoir reproduire et contrôler à volonté un tel effet. Cette technique devint alors un standard jusqu'à aujourd'hui.
http://www.broncolor.fr/articles/sm_gd.jpg (écran réflecteur portable)

Film "Naissance d'une Nation" :
https://www.youtube.com/watch?v=AzJLFQwpQTI

Docteur Jekyll et M. Hyde
6.3
15.

Docteur Jekyll et M. Hyde (1920)

Dr. Jekyll and Mr. Hyde

1 h 19 min. Sortie : 18 mars 1920 (États-Unis). Drame, Épouvante-Horreur, Science-fiction

Film de John S. Robertson

Annotation :

B. LES PREMIERS PROJECTEURS DE CINEMA

B.1 - LUMIERE NATURELLE + LUMIERE ARTIFICIELLE

Dès 1907, les studios à verrières s'équipèrent progressivement en moyens d'éclairage artificiel, en commençant par les régions sujettes à météo instable : Côte Est des Etats-Unis et Philadelphie , Allemagne, Angleterre, France.
http://3.bp.blogspot.com/--bz55WiL9pw/UGXxuhRjfGI/AAAAAAAAAig/s_-8lcHfTto/s1600/phonoscene.jpg

A Hollywood, la lumière naturelle étant plus favorable, les premiers projecteurs furent installés en 1912.

"En hiver, un groupe electrogène à vapeur d'une puissance de 16.500 W alimente, en dehors des lampes à vapeur de mercure, les arcs des chariots de lumière et de puissants projecteurs pour permettre la prise de vues même par temps couvert. La vapeur d'échappement s'écoule dans un aérocondenseur et l'air qui le travers, chassée par le ventilateur, est utilisée et aucune trace de buée ne peut intercepter la lumière." (extrait de "Les établissements Gaumont" dans Photo-cinéma-revue écrit en 1908 par E. Lafuye)

Ces installations électriques demeuraient cependant complémentaires à la lumière naturelle provenant des verrières. Elles permettaient de la renforcer et de compenser ses variations afin d'assurer un éclairage constant durant toute la journée. Malgré les inconvénients de dépendance du soleil, et le souci de productivité grandissant, les studios à verrière persistaient. Cela s'explique par le fait que les projecteurs généraient une lumière très inconfortable pour les comédiens, et n'étaient pensés que comme appoint.

Les éclairagistes se rendirent ensuite compte qu'ils pouvaient obtenir de meilleurs résultats en ajoutant des petits projecteurs en face et en utilisant la lumière du soleil en douche.

A la vue de la flexibilité et des avantages de la lumière artificielle, les studios vitrés étaient de plus en plus perçus comme un obstacle plutôt qu'une aide. La lumière du soleil disparut progressivement des plateaux, laissant la place à la lumière artificielle. Les plateaux furent alors couverts avec des toiles, les vitres furent peintes en noir pour éviter que la lumière du soleil n'interfère sur les effets de lumière créés par la lumière artificielle dès le début de 1920.

Les opérateurs ne "jouaient" pas encore avec la lumière pour donner des intentions à l'image. Ils cherchaient simplement à recréer en studio la lumière extérieure sans ses variations.

Le Golem
6.7
16.

Le Golem (1920)

Der Golem

1 h 16 min. Sortie : 29 octobre 1920 (Allemagne). Fantastique, Épouvante-Horreur

Film de Paul Wegener et Carl Boese

Annotation :

B.2 - LUMIERE NATURELLE = LUMIERE ARTIFICIELLE

La pellicule orthochromatique étant quasiment insensible aux tons chauds (orangés rouges), on ne pouvait pas éclairer avec des lampes à incandescence, on devait recourir à des lampes qui émettaient une lumière froide (bleue verte). On utilisait donc des lampes à vapeur de mercure et des lampes à arc voltaïque.

LES LAMPES A VAPEUR DE MERCURE

L'invention du tube à vapeur de mercure par Peter Cooper Hewitt date de 1901.

Techniquement ... lointains ancêtres de nos fluos actuels, ils dispensaient une lumière bleue-verte riche en UV (non problématique pour des pellicules N&B).

Ces tubes d'un mètre de long étaient montés en série et placés côte à côte dans un grand cadre pour "arroser" le maximum de surface. Ce dispositif était nommé "rampes Cooper-Hewitt".
http://www.afcinema.com/IMG/jpg/Studio_Cineroman_550.jpg

Les avantages étaient nombreux : haut rendement lumineux et économique, lumière douce et uniforme, UV photogénique pour le noir et blanc, chauffent peu et ne fument pas, ne fatiguent pas les yeux. Mais il comportait quelques inconvénients également : intensité lumineuse non modulable et émission d'une lumière bleue-verte sans rayonnement rouge ne permettant pas d'utiliser la pellicule panchromatique et la couleur.

Joseph Von Sternberg se souvient qu'à l'origine, ces lampes étaient "faibles et vacillantes", mais que bientôt "leur éclat se stabilisa, leur puissance décupla" (Article "Plus de lumière" dans Cahier du cinéma n°63, oct.1956)

En pratique ... les rampes Cooper-Hewitt étaient assemblées en grand nombre tout autour du plateau, et constituaient parfois de véritables "murs de lumière".

Elles assuraient un éclairage assez puissant pour les émulsions de l'époque, tout en diffusant une lumière ambiante, non directionnelle, douce et uniforme. Elles ne permettaient donc pas un sculpté des éclairages.

Metropolis
8.1
17.

Metropolis (1927)

2 h 25 min. Sortie : 6 février 1927 (France). Muet, Drame, Science-fiction

Film de Fritz Lang

PiotrAakoun a mis 8/10.

Annotation :

Les opérateurs avaient recours à un autre type d'éclairage offrant d'autres propriétés :

LES LAMPES A ARC VOLTAIQUE

Bien avant Edison, en 1801, Sir Humphry Davy observa qu'un arc de lumière se produit lorsque 2 pièces de charbon assez proches sont reliées à un approvisionnement en électricité de haute tension. Durant les 70 années suivantes, plusieurs ingénieurs utilisèrent ce principe pour faire des lampes électriques.

Les lampes à arc furent tout d'abord fabriquées pour les mineurs, puis pour les phares marins en 1862.

Dans les studios, ces projecteurs étaient soit montés sur pied, soit en plafonnier et généralement regroupés par rangées de 6.

Les lampes à arc produisaient une lumière très forte et dirigée, qui était contrebalancée par la lumière des rampes "Cooper Hewitt" tès douce. Ces dernières permettaient donc de rehausser le niveau dans les ombres.

A cette époque, le caméraman ne pouvait pas changer l'éclairage fixé à l'avance. Les lampes à arc et les tubes au mercure étaient fixés au plafonnier et dirigés de manière à assurer une lumière douce et uniforme. La préoccupation majeure restait d'impressionner suffisamment et en tous points la pellicule afin de rendre les actions lisibles : de plus la référence était la luminosité ambiante du jour. Le plateau était construit afin de répondre à cette lumière et était installé directement sous les unités d'éclairage fixe.

Il faudra attendre une dizaine d'années avant qu'on n'utilise la lumière électrique pour dramatiser alors qu'elle le permettait depuis déjà plusieurs décennies au théâtre.

http://4.bp.blogspot.com/-RJ5GYJS3EGU/Ukx4lpoRjeI/AAAAAAAAFww/yKZ4nYCK_Q8/s1600/Metropolis-fritz-lang-3-Grand-Hotel-Francais-paris-blog.jpg

Le Dernier des hommes
7.7
18.

Le Dernier des hommes (1924)

Der Letzte Mann

1 h 27 min. Sortie : 11 septembre 1925 (France). Drame, Muet

Film de Friedrich Wilhelm Murnau

PiotrAakoun a mis 7/10.

Annotation :

B.3 - LA LUMIERE ARTISTIQUE ET EXPRESSIVE

Aux environs de 1915, la lumière fut considérée comme un art pouvant ajouter un aspect dramatique au film. Ici et là, des éclairagistes audacieux commençèrent à expérimenter l'utilisation de la lumière pour exprimer des sentiments et créer des effets.

Le cinéma était le principal divertissement de l'époque. La concurrence entre les productions permit de développer l'esthétique de la photographie. Le chef opérateur était donc encouragé à utiliser son imagination, la lumière devint alors un élément artistique à part entière.

Les opérateurs disposaient de meilleurs projecteurs leur permettant d'expérimenter plus de choses. Au début, ces appareils ont été adaptés par des bricoleurs.

NOUVEAUTES TECHNIQUES

En 1912, la Biograph remplaça les lampes à arc à faible intensité par des lampes à arc à "flamme blanche". Ce type de projecteur fournissait 2 fois plus de lumière et était plus ùmaniable. Le principal avantage de ces projecteurs plus puissants était d'augmenter la profondeur de champ.

Grâce à l'arrivée de nouveaux projecteurs spécialement adaptés à ses besoins, le chef opérateur pouvait exprimer sa créativité, et son statut artistique fut reconnu. Sa fonction devint alors officiellement "Directeur de la Photographie". C'est à cette époque qu'apparait la structure de l'équipe image comme nous la connaissons aujourd'hui.

Durant les années 20, l'intérêt pour les mouvements de caméra (travellings et panoramiques) se développa chez les réalisateurs européens tels que F.W. Murnau avec "Le dernier des hommes" en 1924. La nécessité d'un cadreur s'imposa, il s'inspirait souvent de l'art pictural classique pour composer son cadre. Il travaillait sous la direction d'un opérateur qui lui se concentrait sur la lumière. Aux Etats-Unis, il est nommé "the lighting cameraman" pour le distinguer de nouvel "camera operator". Et ce dernier avait un assistant : "focus puller" pour faire les changements de point nécessaires pendant les mouvements de caméra.

La reconnaissance officielle du travail des opérateurs aux Etats-Unis intervint en 1927 avec la création des Oscars, le premier décerné à la photographie revenant conjointement à C. Rosher et K. Strüs pour les images de l'Aurore de Murnau.

Les années 20 représentent l'âge d'or de l'art du décor et de la lumière au cinéma. Encore muet, le cinéma mettait l'accent sur ses propriétés visuelles. De plus, le public ne pouvait plus se satisfaire d'histoires sommairement racontées.

Moana
7.3
19.

Moana (1926)

Moana : A Story of the South Seas

1 h 30 min. Sortie : 7 janvier 1926. Comédie dramatique, Muet

Documentaire de Robert Flaherty

Annotation :

C - LA PELLICULE PANCHROMATIQUE ET LE CINEMA PARLANT

L'année 1929 marqua une étape importante dans l'évolution des techniques d'éclairage de cinéma. En effet, à la fois le cinéma devint sonore et les pellicules panchromatiques firent commercialisées. L'art de la photographie va en être bouleversé.

Les exigences du son rendirent obsolètes les lampes à arc trop bruyantes. On eut donc recours aux lampes à incandescences qui étaient silencieuses et parfaitement adaptées aux émulsions panchromatiques.

C.1 - LA PELLICULE PANCHROMATIQUE

La pellicule panchromatique était surtout sensible aux violets-bleus, peu sensible aux verts-jaunes et non sensible aux orangés-rouges. La verdure, la terre ou le sable apparaissaient donc gris sombre et les lèvres, noires (ce qui explique le surplus de maquillage), ...

Au contraire, la pellicule panchromatique était sensible à toute la gamme chromatique, et toutes les nuances de noir, de blanc et de gris étaient possibles. Les décors étaient parfois peints en tons dégradés rouges-orangés, de façon à obtenir une palette de gris nuancés. Cette nouvelle émulsion permit donc l'usage des sources à incandescence de colorimétrie orangée.

La pellicule panchromatique noir et blanc était initialement d'environ 10 Asa, puis 20 Asa dans les années 30, 80 dans les années quarante, et n'atteignit 250 Asa que dans les années cinquante. Cette faible sensibilité requérait donc beaucoup de lumière. Cependant, les lampes n'avaient alors qu'un faible rendement et consommaient donc beaucoup d'électricité pour produire un tel éclairement. L'énergie requise était donc considérable, les tournages se faisaient donc dans des studios équipés de leurs propres centrales électriques.

L'image était plus réaliste, fine, fidèle, sensible et détaillée. L'usage de la pellicule panchromatique se généralisa à partir de 1925. Ce fut le film "Moana" de John Flaherty, tourné en 1925 qui marqua son lancement.

La Passion de Jeanne d'Arc
8
20.

La Passion de Jeanne d'Arc (1928)

1 h 40 min. Sortie : 25 octobre 1928. Drame, Historique, Muet

Film de Carl Theodor Dreyer

PiotrAakoun l'a mis en envie.

Annotation :

L'image du film "La Passion de Jeanne d'Arc" réalisé en 1928 par Dreyer et éclairé par Rudolph Maté est remarquable par la douceur des aplats blanc et gris grâce à l'utilisation de cette pellicule.

LES LAMPES A INCANDESCENCE

Au début du cinéma, malgré le souhait d'utiliser des lampes à incandescence, les restrictions de sensibilité colorimétrique de la pellicule orthochromatique (aveugle aux rouges), associées au spectre d'émission de ce type de source lumineuse (majoritairement orangée), rendaient leur utilisation impossible.

Personne ne croyait que la lumière à incandescence pouvait entrer dans le domaine du cinéma. En effet, comparativement aux lampes à arc et aux tubes au mercure, elles avaient un rendement très faible et n'existaient pas dans des puissances suffisantes.

Deux phénomènes vont inverser les données :

- La pellicule panchromatique, grâce à sa sensibilité supérieure à toutes les radiations, rendait les sources à incandescence plus efficaces que les lampes à arc ou les tubes à vapeur de mercure.

- L'apparition du son synchrone demanda un silence absolu et les projecteurs à arc étant très bruyants, ils se devaient d'être remplacés.

C'est dans les environs de 1920, que l'on fit appel à la compagnie General Electrique afin de développer des projecteurs permettant de tourner des films en couleur. Ils fabriquèrent donc des lampes à incandescence au tungstène (10 kW et 3 kW Tungsten). Durant les quelques années suivantes, les chefs opérateurs essayèrent souvent d'utiliser ses sources. Ils pouvaient les placer là où les arcs à charbon ne pouvaient pas être placés. Elles produisaient une lumière douce, mais peu puissante.

Le premier objectif fut de créer des projecteurs assez compacts pour être placés proches des micros. Ils ont donc adapté les structures des anciens projecteurs à arc aux projecteurs à incandescence. A cette période, beaucoup d'essais de construction furent réalisés. Les directeurs de la photographie voulaient que les projecteurs éclairent un espace 2 fois plus grand et aient un rendement 2 fois plus élevé. Ainsi, des réflecteurs furent ajoutés dans les projecteurs.

C'est en 1927 que la lumière à incandescence se généralisa.

Lights of New York
21.

Lights of New York (1928)

57 min. Sortie : 6 juillet 1928 (États-Unis). Policier, Drame

Film de Bryan Foy

Annotation :

COMMERCIALISATION DES LAMPES A INCANDESCENCE

Deux entreprises hollywoodiennes ("Moles Richardson" et Bardwell & Mealister") développent des lampes à incandescence pour le cinéma et fournissent le matériel le plus fiable et polyvalent mondialement.

Ainsi, se développa donc une gamme de lampes à incandescence au tungstène, de puissances et de nature diverses.

On peut les diviser en 2 catégories :
- Les sources larges, créant une lumière douce et ambiante. La lampe était soit placée devant un réflecteur, soit installée dans un "plat à barbe" (grand réflecteur polyédrique).
- Les sources ponctuelles, créant une lumière directionnelle. Le projecteur était équipé d'une lentille de Fresnel. Ces projecteurs étant focalisables, ils permettaient de régler le diamètre du faisceau lumineux.

Les projecteurs Fresnel (à arc ou tungstène) devinrent l'équipement de base des studios traditionnels. En effet, ces éclairages très sélectifs étaient idéaux pour répondre aux exigences de la lumière très construite du cinéma classique.

Ce nouvel outil permettait au chef opérateur d'être plus libre et de "peindre avec la lumière" tout en offrant de nombreux avantages :
- Très silencieux, ils favorisaient la prise de son
- Stabilité des couleurs
- Possibilité de varier l'intensité lumineuse : pour la première fois il était possible de passer de l'obscurité totale à la luminosité maximale
- Réduction du maquillage
- Besoins électriques réduits d'un tiers par rapport à ceux des anciens équipements
- Possibilité d'une structure de projecteur facile d'utilisation : la lumière peut être dirigée dans toutes les directions désirées
- Diminution du risque de danger

Mais ces matériels étaient lourds à manipuler, encombrants, chauffaient notablement, et consommaient beaucoup d'électricité pour un faible rendement.

L'arrivée des émulsions panchromatiques et des sources à incandescence laissait espérer au chef opérateur une liberté totale. Cependant l'arrivée du son va limiter ses ambitions.

Le Chanteur de jazz
6.1
22.

Le Chanteur de jazz (1927)

The Jazz Singer

1 h 28 min. Sortie : 4 octobre 1929 (France). Drame, Comédie musicale, Romance

Film de Alan Crosland

PiotrAakoun l'a mis en envie.

Annotation :

C.2 - LE SON

Les opérateurs à cette époque devaient faire leurs preuves avant de se voir confier des productions importantes, c'étaient les ingénieurs du son qui régnaient sur le plateau.

La caméra et les opérateurs étaient enfermés dans des cabines insonorisées interdisant les mouvements de caméra. Puis, rapidement les studios proposèrent des caissons d'insonorisation plus petits, permettant plus de mobilité. Les projecteurs aussi devaient être insonorisés et ne pouvaient pas bouger. De plus, la présence de la perche et du perchman limitaient le cadre et entravaient l'éclairage.

C'était courant de tourner en multi-caméra pour faciliter la synchronisation du son. Les opérateurs devaient alors faire des compromis afin d'éclairer pour tous les axes de caméra, ce qui était très difficile.

Les Mendiants de la vie
6.9
23.

Les Mendiants de la vie (1928)

Beggars of Life

1 h 22 min. Sortie : 27 décembre 1929 (France). Aventure, Drame, Muet

Film de William A. Wellman

Annotation :

LES LAMPES A ARC

Beaucoup de studios détruisirent les lampes à arc, pensant que le son les rendait obsolètes, privant alors les chefs opérateurs de cette lumière dure qui leur permettait de recréer la lumière du soleil et les obligeant de composer avec la lumière douce des sources à incandescence.

Après quelques avancées techniques, les techniciens du son finirent par accepter l'utilisation des lampes à incandescence à arc, à condition qu'elles soient insonorisées. Les projecteurs étaient alors plus flexibles et les globes plus grands. Les lampes à arc haute intensité, étaient alors utilisées pour des effets de lumière très spécifiques : rayon de soleil, traînées de lumière et contre.

La production de nouveaux projecteurs à arc au charbon fut de nouveau remise en cause. La demande restait très spécifique et réduite et ne pouvait couvrir le coût de fabrication d'un projecteur avec réglage de l'angle du faisceau et d'un système insonorisant. Le projet fut donc abandonné. Cependant, l'arrivée du Tehnicolor ne tarda pas à exiger l'utilisation de la lumière blanche produite par ces lampes à arc au charbon.

Les années 20 étaient très innovantes en terme d'esthétique photographique, les studios américains des années 30 vont en profiter afin d'extraire le meilleur et ainsi codifier la lumière. La tendance classique s'orientant alors vers une certaine vraisemblance réaliste des effets lumineux. De plus, toutes les innovations techniques (son, pellicule panchromatique, projecteur à incandescence) contribuaient à dé-expressionniser l'image.

Le son réduira l'expressivité photographique. L'image devint alors plus classique et la lumière moins caricaturale et plus nuancée. L'inconvénient étant que le langage parlé avait tendance à prendre le pas sur le langage cinématographique.

Les Raisins de la colère
7.9
24.

Les Raisins de la colère (1940)

The Grapes of Wrath

2 h 09 min. Sortie : 31 décembre 1947 (France). Drame, Historique, Road movie

Film de John Ford

PiotrAakoun a mis 10/10.

Annotation :

C.3 - HOLLYWOOD, L'AGE D'OR DU CINEMA CLASSIQUE
(Des années 30 aux années 50)

C.3.1 - UNE NOUVELLE ESTHETIQUE

Chaque studio impose son style photographique et a ses chefs opérateurs attitrés :
- La "MGM", aux fris perlés et blancs lumineux avec William Daniels, George Folsey, Joseph Ruttenberg.
- La "RKO", aux noirs profonds avec Joseph August, Robert de Grasse, Nicholas Musuraca.
- La "Paramount", aux tonalités paisibles et diffuses avec Victor Milner, Karl Strüss, Charles Lang.
- La Warner, avec un traitement brut et sans afféterie avec Ernest Haller, Tony Gaudio, Sol Polito, Sidney Hickox
- L'"Universal", aux noirs et blancs ciselés.
- La "Fox", proche de l'expressionnisme avec Ernest Palmer, Arthur Miller, Leon Shamroy.
- La "Columbia" avec Joseph Walker et Rudolph Maté.

Seuls certains opérateurs tels que James Wonh Howe, Lee Garmes et Gregg Toland ("Les raisins de la colère") parvinrent à s'affranchir de ces contraintes.

Quand la ville dort
7.7
25.

Quand la ville dort (1950)

The Asphalt Jungle

1 h 52 min. Sortie : 6 décembre 1950 (France). Gangster, Film noir, Drame

Film de John Huston

PiotrAakoun a mis 8/10.

Annotation :

C.3.2 - LE STAR SYSTEM

Le cinéma américain mit ensuite en place des nouvelles techniques d'éclairage, qui consistaient à mettre en valeur le plus possible les acteurs. Le star-sytem instaura une hiérarchie entre les acteurs : de la star au dernier des figurants (la société américaine était fondée sur la réussite individuelle). Les gros plans étaient de plus en plus présents, l'éclairage du visage se normalisa.

Le cinéma classque imposait 3 impératifs : dramatisation, hiérarchisation et lisibilité.

Tout d'abord, un parfait exemple de ce triple enjeu, "la photogénie" avait non seulement un but esthétique, mais aussi un but de "hiérarchisation" (élire le visage de la star), de "dramatisation" (visage expressif) et de "lisibilité (ne pas défigurer même si la dramatisation l'exige). La photogénie proprement classqie commença chez Griffith avec Lilian Gish aux Etats-Unis.

L'expressionnisme n'hésitait pas à dramatiser violemment l'éclairage des visages ("Faust" de Murnau, "Loulou" de Pabst) contrairement au classicime qui était modéré par souci de lisibilité.

De plus, les principales techniques d'éclairage d'Hollywood répondaient aussi à ces trois exigences :

Principalement utilisé, l'"éclairage en trois points" était composé par :
- une lumière principale (key light) qui éclairait le visage de face : "dramatisation" par une attaque marquée.
- une lumière de remplissage (fill light) qui allégeait les ombres créées par la "key" : "lisibilité" du décor et du visage.
- une lumière en contre pour donner du relief au visage, auréoler la star : "hiérarchisation"

On retrouve cette technique notamment dans les films de la Paramount des années 20.

"La lumière faciale" et à hauteur des yeux offrait l'éclairage le plus descriptif du visage possible. Il laissait seulement la place aux ombres du menton, des fuyantes des joues et des pommettes et permettait de mettre en valeur la transparence des yeux clairs.

"Léclairage latéral" (de côté) était aussi couramment utilisé afin de sculpter davantage le visage. Cette lumière accentuait les traits du visage, elle était surtout réservée aux hommes.

La "core-light" était un éclairage central. Les acteurs étaient placés autour de la source principale laissant le décor dans l'ombre. Cette lumière est à la fois "dramatisante" et "hiérarchisante". On retrouve cette technique dans de nombreux thrillers hollywoodiens et pour créer une atmosphère de complot.

Shanghaï Express
7.3
26.

Shanghaï Express (1932)

Shanghai Express

1 h 22 min. Sortie : 22 avril 1932 (France). Drame, Aventure, Romance

Film de Josef von Sternberg

Annotation :

La "north-light" était un éclairage vertical provenant du haut. Son pouvoir était à la fois érotisant (mise en valeur de la chevelure et du visage), esthétisant, mais aussi idéoligisant. Cette lumière zénithale "à la Rembrandt", classico-baroque, a une forte connotation divine. Elle était réservée à la star qu'elle élit entre tous. C'est principalement Sternberg qui exploita cette technique avec Lee Garmes pour mettre en valeur Marlène Dietrich dans "Shangai Express", notamment.

Les opérateurs cherchaient constamment de nouveaux outils pour sublimer la star. Ils gardaient par exemple en secret les trames ou tulles utilisés pour adoucir l'éclairage sur le visage de la star.

Certaines actrices possédaient un chef opérateur attitré. Par exemple Lee Garmes pour Dietrich et William Daniels pour Greta Garbo. Sternberg confirme que les producteurs surveillaient de très près le traitement photographique des stars. Il fallait parfois respecter le bon profil de l'actrice.

Finalement, la "dramatisation" et la "hiérarchisation" impliquérent de mettre en valeur ou d'estomper un élément. La difficulté était que cela pouvait aller contre la "lisibilité" et impliquer des contradictions étranges dans l'éclairage. De plus, la dramaturgie lumineuse et la volonté de hiérarchiser ne répondaient pas forcément au même éclairage.

L'éclairage du décor, qui était si important à l'aube expressionniste du cinéma classique, fut relégué à jouer les utilités. L'éclairage des acteurs était alors prioritaire, de plus se tenant le plus souvent à l'avant-plan, ils étaient deux fois plus éclairés que le fond.

En pratique, dans les studios, l'opérateur éclairait d'abord le décor, puis il concevait un éclairage spécifique autour des comédiens. Ce dernier entrait souvent en contradiction logique avec l'éclairage global du plateau. En effet la hiérarchie acteur/décor allait parfois jusqu'à l'incohérence. Par ex., pour que l'acteur soit visible, il était toujours éclairé même s'il se tenait dans une zone d'ombre. Le nombre de projecteurs utilisés se multiplièrent afin d'effacer une ombre, ce qui renforçait l'artificialité de l'éclairage studio. Ce phénomène était flagrant dans les scènes de nuit ou d'intérieurs sombres, où les acteurs étaient toujours éclairés.

Certaines actrices possédaient un chef opérateur attitré. Lee Garmes pour Dietrich et William Daniels pour Garbo. Sternberg confirme que les producteurs surveillaient de très près le traitement photographique des stars.

Intrigues
6.9
27.

Intrigues (1928)

A Woman of Affairs

1 h 31 min. Sortie : 15 décembre 1928 (États-Unis). Drame, Muet

Film de Clarence Brown

Annotation :

Finalement, la "dramatisation" et la "hiérarchisation" impliquérent de mettre en valeur ou d'estomper un élément. La difficulté était que cela pouvait aller contre la "lisibilité" et impliquer des contradictions étranges dans l'éclairage. De plus, la dramaturgie lumineuse et la volonté de hiérarchiser ne répondaient pas forcément au même éclairage.

L'éclairage du décor, qui était si important à l'aube expressionniste du cinéma classique, fut relégué à jouer les utilités. L'éclairage des acteurs était alors prioritaire, de plus se tenant le plus souvent à l'avant-plan, ils étaient deux fois plus éclairés que le fond.

En pratique, dans les studios, l'opérateur éclairait d'abord le décor, puis il concevait un éclairage spécifique autour des comédiens. Ce dernier entrait souvent en contradiction logique avec l'éclairage global du plateau. En effet la hiérarchie acteur/décor allait parfois jusqu'à l'incohérence. Par ex., pour que l'acteur soit visible, il était toujours éclairé même s'il se tenait dans une zone d'ombre. Le nombre de projecteurs utilisés se multiplièrent afin d'effacer une ombre, ce qui renforçait l'artificialité de l'éclairage studio. Ce phénomène était flagrant dans les scènes de nuit ou d'intérieurs sombres, où les acteurs étaient toujours éclairés.

Cette contradiction était encore plus importante dans les plans rapprochés de visages, éclairés de façon spécifique, souvent en total contre-sens par rapport à l'éclairage global perçu dans les plans plus larges. Hiérarchiquement, l'éclairage du gros plan (représentant le regard) était plus important que les autres plans. Il imposait son propre traitement lumineux.

Pour conclure, le star-system a eu de profondes incidences sur l'éclairage. De plus, l'éclairage en studio impliqua du factice, en termes de quantité comme de qualité de lumière aussi bien qu'en terme de logique d'éclairage (emplacements de sources, intensité et directivité des rayons). On sentait la présence des projecteurs et la lumière était souvent contre nature (double ombre ...)

Durant les années 30, les techniques se sont donc normalisées.

Cependant cette période est aussi marquée par des expérimentations, et en particulier des tentatives pour avoir plus de profondeur de champ. Gregg Toland utilisaz pour cela des objectifs grands angles et des sources de lumière très puissantes. Son travail est remarquable dans des films tels que "Les Raisins de la Colère" ou "Citizen Kane".

Le Quai des brumes
7.5
28.

Le Quai des brumes (1938)

1 h 31 min. Sortie : 17 mai 1938. Policier, Drame, Romance

Film de Marcel Carné

PiotrAakoun a mis 9/10.

Annotation :

C.4 - LE CINEMA FRANCAIS DES ANNEES 30

Les Européens reprirent les méthodes américaines avec moins de matériel lumineux.

En France, peu d'opérateurs ont passé le cap du cinéma parlant. En effet, soit ils arrivaient en fin de carrière (c'est le cas de la génération d'Aubourdier, Chaix, Lucas, Specht et Gibory), soit ils n'ont pas su s'adapter aux mutations techniques (par exemple Jules Kruger). Quant à Périnal, révélé à la toute fin du muet par les films de René Clair, il s'est installé à Londres, invité par Korda.

Ce sont donc des opérateurs étrangers qui vont structurer l'art de l'éclairage en France. C'est Eugen Schüfftan (Metropolis, ...) et Curt Courant héritiers de l'expressionnisme allemand et l'américain Harry Stradling travaillant à Joinville dans les studios de la Paramount, (reprenant le style d'éclairage de l'américain Lee Garmes) qui vont former la nouvelle génération de chefs opérateurs : Michel Kelber, Robert Lefebvre, Henri Alekan, Louis Page. Roger Hubert, fut, lui, formé au contact d'Aubourdier et de Sparkuhl, et Armand Thirard au contact de Guichard et de Périnal.

Pépé le Moko
7.2
29.

Pépé le Moko (1937)

1 h 34 min. Sortie : 28 janvier 1937 (France). Policier, Drame, Romance

Film de Julien Duvivier

PiotrAakoun a mis 9/10.

Annotation :

Contrairement au cinéma muet marqué par de fortes personnalités, le cinéma se partageait en 2 grands courants :

- Tout d'abord, la lumière allemande, dite "style UFA". Elle sculptait les décors et les visages par petites touches plus ou moins brutales sans grand souci de réalisme, et privilégiant l'ambiance générale. Des faisceaux violents suffisaient par exemple à créer une atmosphère inquiétante. Les opérateurs les plus signifiants sont Kruger, Hayer et Lefebvre, s'inspirant chacun à leur manière de l'expressionnisme.

- Ensuite, la lumière américaine, plus structurée et hiérarchisée, recherchait la mise en valeur des comédiens. Michel Kelber, grand opérateur des studios français des années 30 à 50, souligne rétrospectivement que l'on concevait pour le décor "un éclairage indépendant, différent de celui porté sur les acteurs" ; "souvent la lumière naturelle (de logique réaliste), réservée au décor, était bloquée par un volet ou un nègre (panneau opaque), et l'acteur avait droit à sa propre lumière personnelle" ; "Un des avantages de cette lumière à l'américaine, c'est qu'elle seyait fort aux femmes ; et nous étions en plein star-system" (Cinématographe, n°68, juin 1981)

"Avec le style germanique, on éclaire le décor, avec le style américain, la star" (Arthur Crabtree, chef opérateur anglais)

Alekan, amateur de contraste élevés et formé par l'expressionniste Schufftan, reproche rétroactivement au studio académisé d'avoir, en suréclairant, laminé les contrastes et densités, limité l'expressivité. (Des lumières et des Ombres, Henri Alekan, 1984)

Les chefs opérateurs, Roger Hubert et Christian Matras empruntèrent autant à l'un qu'à l'autre courant. En effet Matras influencé par Schüfftan, Stradling et Maté, utilisait tout de même une lumiere d'ambiance, purement fonctionnelle, baignant décors et acteurs sans recherche d'une atmosphère particulière à la manière des productions Pathé-Natan (voir les filmographies de Victor Arménise et Raymond Agnel, par exemple)

Cependant, le cinéma français des années 30-50 ne se réduit pas à ces généralités, certains opérateurs tels que Léonce-Henry Burel et Armand Thirard ne se rattachent à aucun de ces courants, ils dépassèrent ainsi les modes et les styles et étaient d'une grande modernité.

La Chevauchée fantastique
7.6
30.

La Chevauchée fantastique (1939)

Stagecoach

1 h 36 min. Sortie : 24 mai 1939 (France). Western

Film de John Ford

PiotrAakoun l'a mis en envie.

Annotation :

C.5 - LE CINEMA NATURALISTE

Même si à cette époque, la mjorité des films sont tournés en studio, il y a toujours eu une sorte de "ligne de résistance" naturaliste : une tendance à sortir des murs du studio, un appel à la nature, comme un besoin vital d'air et de soleil;

On peut regrouper ces cinéastes alternant studio et nature par pays et par idéologie :

- Aux Etats-Unis, c'était idéalisation de la nature et de l'homme, mise en valeur d'un peuple de conquérants. Le western était le genre le plus symbolique. Citons les réalisateurs suivants : Ford, Hathaway, Hawks, Preminger, Ray, Walsh.
La lumière naturaliste américaine était puissante et possédait des contrastes marqués (Ford, exemplairement).

- En France, c'était un naturalisme poétique, intuitif, sensible au temps, ouvert à la rêverie. Les réalisateurs suivants en sont de parfaits exemples : Antoine, Grémillon, Pagnol, Renoir, Vigo (et non pas Carné ou Clair, qui faisaient du naturalisme de studio)
La lumière naturaliste française était plus impressionniste, elle offrait une grande palette de gris (Grémillon, Renoir).

- Au Japon, le naturalisme était plus abstrait et contemplatif, véritable métaphysique de la nature. On peut énumérer comme réalisateurs adeptes de cette tendance : Mizoguchi, Naruse, Ozu, ou encore Kurosawa.
La lumière naturaliste japonaise était plus éthérée, elle était douce, ambiante, et créait des aplats de gris (Mizoguchi, Ozu).

En URSS, c'était un naturalisme socialiste mettant en valeur la grandeur et la puissance du ciel soviétique.

On pourrait continuer avec l'Inde, la Chine, l'Amérique latine, et l'Afrique (notamment avec Cissé, du "Vent" à "La Lumière/Yeelen"). A chaque fois correspondraient des traits dominants en matière de lumière et de contrastes (noir et blanc ou couleurs).

CONCLUSION

L'aube des années 30, n'est pas seulement marquée par l'arrivée de la pellicule panchromatique, du son et des lampes à incandescences et des lentilles Fresnel, la couleur allait rapidement apparaître.

Même si, au milieu des années 20, l'introduction des émulsions panchromatiques et l'arrivée du son, imposa l'utilisation de lampes à incandescence et supprima celle des lampes à arc ; l'introduction du Technicolor un peu plus tard, imposa une autre évolution mais dans le sens opposé.

PiotrAakoun

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