Cover Films vus en 2021

Liste de

107 films

créee il y a presque 3 ans · modifiée il y a plus de 2 ans

Falling
6.3

Falling (2020)

1 h 52 min. Sortie : 19 mai 2021 (France). Drame

Film de Viggo Mortensen

Patrick Braganti a mis 7/10.

Annotation :

Pour son premier film, le comédien tape fort dans une démarche plutôt subtile sur les relations compliquées entre un père malade à la mémoire défaillante et un fils homosexuel à la vie de couple assez conventionnelle.
Comme dans toutes les histoires familiales il y a bien sûr le passé, les drames, les rancœurs accumulées et les distances qui s'établissent, se creusent et ne semblent plus pouvoir s'amenuiser.
Mais là où Viggo Mortensen vise juste et donc nous touche en plein cœur, c'est de faire du père homophobe, insatisfait et autoritaire un homme particulièrement antipathique et du fils en opposition depuis son adolescence un être rongé par la culpabilité et le désir plus ou moins enfoui d'être accepté pour ce qu'il est.
Le film se présente ainsi comme une succession de scènes où les dialogues, les conversations et surtout les affrontements verbaux tiennent le haut du pavé. L'écriture est fine en faisant preuve d'une réelle connaissance de ce qu'est la relation toujours conflictuelle entre parents et enfants. Entre ces longues séquences quelques plans de coupe sur la nature et les éléments comme autant de contrepoints de l'éternité et de l'indifférence de ceux-ci face au genre humain.
Grand acteur, mais aussi musicien (il signe ainsi la musique de son premier long-métrage) et peintre, Viggo Mortensen fait une entrée remarquée dans la catégorie des nouveaux cinéastes.

Garçon chiffon
5.6

Garçon chiffon (2020)

1 h 50 min. Sortie : 28 octobre 2020. Comédie, Drame

Film de Nicolas Maury

Patrick Braganti a mis 4/10.

Annotation :

Dans la veine des films nombrilistes si caractéristiques du cinéma français, l'opus du comédien Nicolas Maury pourrait bien avoir à l'instar de sa consœur Maïwenn un accès direct aux meilleures places.
Hélas s'aimer beaucoup ne suffit pas à faire un beau film. L'auto complaisance nécessite ainsi du talent, de l'humour et de la distance. Ce dont Garçon Chiffon est quasiment dépourvu de bout en bout.
Cette comédie dépressive d'une résilience annoncée est à peu près aussi mollassonne que son triste héros plaintif et in fine terriblement agaçant. Écrit par un trio de scénaristes en manque d'inspiration, le film emprunte plusieurs pistes : la jalousie, l'ego des acteurs, le suicide du père qu'il abandonne au fur et à mesure dans une narration qui s'enlise et ennuie fortement jusqu'à une résolution invraisemblable et délayée jusqu'à la fadeur.
Le générique final aligne les remerciements. Peut-être aurait-il d'abord fallu congratuler les spectateurs qui auront supporté les états d'âme égotistes d'un garçon qui aura fini par nous chiffonner et nous faire rater notre rentrée au cinéma tellement attendue.

Slalom
6.7

Slalom (2020)

1 h 32 min. Sortie : 19 mai 2021. Drame, Sport

Film de Charlène Favier

Patrick Braganti a mis 4/10.

Annotation :

En écho à son titre, la réalisatrice pour son premier long-métrage semble tergiverser ou louvoyer en permanence et finit par semer le mauvais trouble dans l'esprit du spectateur. Non pas celui que l'histoire d'une relation équivoque entre un entraineur de ski et sa nouvelle jeune recrue pourrait susciter, mais davantage celui provoqué par l'indécision de la cinéaste à la superficialité et au final à ne pas traiter le sujet. Mais au fond quel est le sujet ?
Car s'il s'agit d'aborder l'emprise exercée par un adulte vis-à-vis d'une adolescente en manque de repères (mère éloignée par son travail et père totalement absent) et en rechercher d'une autorité de substitution, on reste sur sa faim. Obéissant à une banale pulsion sexuelle, le coach semble aussitôt l'acte accompli s'en excuser et en mesurer les dangers et les limites, tandis que la jeune fille qui ne consent ni ne rejette voit d'abord dans ce rapprochement le témoignage de quelqu'un s'intéressant à elle.
Il n'y a pas ici assez d'ambivalence ni d'un traumatisme ou d'un choc qui soit perceptible à l'écran. Slalom parait ainsi se dissoudre de plus en plus dans des scènes accessoires : plans sur les montagnes, les descentes en ski, les compétitions en reléguant au second plan la dureté même des entrainements et surtout la tempête intérieure vécue par la jeune championne.
Un goût d'inabouti et de délayé qui reste longtemps en bouche.

The Father
7.6

The Father (2020)

1 h 38 min. Sortie : 26 mai 2021 (France). Drame

Film de Florian Zeller

Patrick Braganti a mis 7/10.

Annotation :

Le film parvient à déjouer et éviter tous les écueils de l'apitoiement lacrymal et de la performance cabotine. Au contraire, il faut ici saluer la sobriété et l'intelligence de l'écrivain réalisateur qui opte pour une construction labyrinthique idéale à témoigner de la perte de mémoire, donc de repères, d'histoires et de souvenirs.
On assiste donc au naufrage d'un homme qui perd pied, en saisit par instants la tragique réalité alors que celle-ci se déforme et se diffracte de plus en plus jusqu'à a se dérober totalement dans cette interrogation terrible : qui suis-je ?
Bouleversant sans jamais verser dans la facilité, pariant au contraire sur une cérébralité revendiquée, The Father est une belle surprise riche en émotions.

Vers la bataille
6.2

Vers la bataille (2019)

1 h 30 min. Sortie : 26 mai 2021. Drame, Aventure

Film de Aurélien Vernhes-Lermusiaux

Patrick Braganti a mis 6/10.

Annotation :

Premier film ambitieux aussi bien dans le sujet que dans ses partis pris formels. Choisir la trajectoire d'un photographe français en pleine guerre coloniale mexicaine au mitan du dix-neuvième siècle confronté à l'étranger, l'horreur de la guerre et les questions existentielles à propos de son métier n'est en effet pas la voie la plus simple.
Le résultat un peu bancal, parfois vain et abscons, prend au final la forme d'une lente dérive onirique à la lenteur assumée parfaitement mise en musique par Stuart A. Staples (qui y est donc pour beaucoup dans le lâcher-prise requis pour se laisser porter).
Il y a une promesse d'un futur réalisateur doté d'un regard singulier et d'une audace tout à fait appréciable.

Hospitalité
6.3

Hospitalité (2010)

Kantai

1 h 36 min. Sortie : 26 mai 2021 (France). Comédie dramatique

Film de Kōji Fukada

Patrick Braganti a mis 7/10.

Annotation :

Le film date de 2010 et ne sort qu'à présent, mais son sujet (la problématique de l'immigration à travers l'intrusion envahissante d'un vieil ami chez un modeste imprimeur à Tokyo) reste d'actualité et surtout universel, même si le cinéma nippon souvent articulé autour de la cellule familiale et des enfants ne nous a guère habitués à prendre une dimension sociale.
Plein de rebondissements, Hospitalité est d'abord une comédie réjouissante cultivant un sens de l'absurde et du burlesque par endroits qui énergise la narration pourtant confinée la plupart du temps dans un lieu exigu où l'atelier côtoie l'habitation. De cette promiscuité naissent des allées et venues, des croisements qui font osciller l'ensemble entre une scène de théâtre de boulevard et une variation du Théorème de Pasolini.
Premier coup de cœur de cette rentrée au cinéma qui laisse augurer du meilleur à venir puisque d'autres œuvres du cinéaste devraient sortir cet été.

Si le vent tombe
6.3

Si le vent tombe (2020)

1 h 40 min. Sortie : 26 mai 2021. Drame

Film de Nora Martirosyan

Patrick Braganti a mis 8/10.

Annotation :

C'est parce que ce genre de films existe qu'on aime tant le cinéma, territoire irremplaçable de découvertes, de coups de cœur qui sont autant de manières d'appréhender le monde. Le film nous transporte dans le Haut-Karabagh (qui fut il y a peu sous les feux de l'actualité) où un auditeur international (campé par l'impeccable et trop rare Grégoire Colin) est en charge d'étudier l'ouverture prochaine d'un aéroport flambant neuf dont le seul tort est probablement d'être trop près des frontières des pays limitrophes.
L'autre personnage principal est un gamin élevé par sa grand-mère, qui porte des bouteilles d'eau à travers cette espèce de no man's land à des malades, des ouvriers, un vieil officier retranché et solitaire.
Deux destins parallèles qui témoignent de la folie, de l'absurdité de la situation dans un paysage montagneux qui emprisonne et écrase les individus.
Si le vent tombe est un film qui transporte à tous les sens du terme. La mission de l'expert finit par l'ébranler davantage qu'il l'avait imaginé comme la mise en scène organique et élégiaque habille avec élégance et étrangeté séduisante ce très beau premier long-métrage.

Les Séminaristes
6.2

Les Séminaristes (2020)

Servants

1 h 20 min. Sortie : 2 juin 2021 (France). Drame

Film de Ivan Ostrochovský

Patrick Braganti a mis 4/10.

Annotation :

Tout à fait symptomatique d'un cinéma d'Europe de l'Est, c'est-à-dire prééminence d'une forme très radicale (format carré en noir et blanc très contrasté) et choix d'une narration elliptique et référencée historiquement et culturellement - ce qui obligerait presque le spectateur à réviser son manuel d'histoire contemporaine.
Sans réel repère temporel - hormis un énigmatique retour en arrière de 143 jours - et avec une absence totale d'incarnation et de sentiments humains - un comble pour des jeunes gens mus par leur foi - le film s'avère terriblement glacial et installe dès lors une distance avec le spectateur que rien ne vient jamais réduire.
Dommage car cela laisse l'impression décevante d'être passé à côté de quelque chose.

Des hommes
5.6

Des hommes (2020)

1 h 41 min. Sortie : 2 juin 2021. Drame, Historique, Guerre

Film de Lucas Belvaux

Patrick Braganti a mis 8/10.

Annotation :

Lucas Belvaux a plutôt bien compris et appréhendé ce qui constituait l'œuvre de Laurent Mauvignier et son adaptation est doublement fidèle à la narration et au procédé des longs monologues - qui fondent d'ailleurs le travail de l'auteur de Continuer.
On comprend vite que la guerre d'Algérie - qu'on appelait au demeurant les événements - est ici un révélateur certes traumatique des tréfonds de la nature humaine et son cortège de sentiments profonds, contradictoires comme la haine, la peur, la colère, la lassitude, la résignation.
Il est donc question d'un temps qui ne peut pas passer, pas s'oublier et encore moins se raconter car les mots sont incapables de transcrire l'horreur, ce que des hommes en viennent à accomplir; D'un temps qui marque, hante et détruit des jeunes soldats extirpés de leur campagne, engoncés dans leur ignorance, eux à qui les parents, l'école n'avaient rien appris.
L'importance des monologues choraux qui s'entrecroisent et se superposent rend inévitable l'omniprésence des voix off multiples qui reconstruisent comme un dialogue à distance au travers des témoignages et des temporalités. Jouant du contre-champ avec finesse, le cinéaste croit au pouvoir de l'évocation et de la suggestion en faisant confiance à l'intelligence de son spectateur;
Il fait bien car Des Hommes, surplombé par un Depardieu magistral, touche à l'universel et interpelle chacun.

Le Discours
6.3

Le Discours (2020)

1 h 28 min. Sortie : 9 juin 2021. Comédie

Film de Laurent Tirard

Patrick Braganti a mis 4/10.

Annotation :

Paraît-il qu'un petit dessin vaut mieux qu'un long discours. Alors peut-être aurait-il fallu passer quelques minutes à gribouiller plutôt que quatre-vingt dix à supporter les états d'âme d'Adrien, fraichement mis en pause par sa compagne Sonia, mis dans l'obligation de faire un discours lors du prochain mariage de sa sœur.
On a davantage l'impression d'être devant un one-man show de Benjamin Lavernhe assez agaçant dans ses névroses nombrilistes donnant lieu à une cascade de soliloques pénibles et très écrits, parfois traversés de quelques traits d'humour bien ciblés.
Mais c'est au final bien peu pour empêcher le marasme global d'une comédie poussive et lassante.

Suzanna Andler
4.4

Suzanna Andler (2020)

1 h 31 min. Sortie : 2 juin 2021. Drame

Film de Benoît Jacquot

Patrick Braganti a mis 7/10.

Annotation :

Il n'est certainement pas simple de s'emparer de l'œuvre de Marguerite Duras pour l'adapter à l'écran. Le réalisateur irrégulier Benoît Jacquot s'en sort plutôt pas mal en réussissant à faire entendre la petite musique durassienne interprétée par une Charlotte Gainsbourg inspirée.
Presque inexistante ou invisible, la mise en scène est d'une sobre élégance par la fluidité des mouvements de caméra qui caressent et enveloppent la comédienne.
Bien sûr on est dans un jeu désincarné et cérébral où toutes les réflexions (qui concernant l'amour et les relations humaines) sont intellectualisées comme si elles ne concernaient pas les protagonistes.
Suzanna et son jeune amant ne quittent jamais leur manteau donnant l'impression d'un départ imminent ou, pis encore, d'une étrangeté à soi-même et au monde.
Film d'atmosphère littéraire qui peut séduire comme provoquer un véritable rejet. Mais difficilement laisser indifférent.

Playlist
6.3

Playlist (2021)

1 h 24 min. Sortie : 2 juin 2021. Comédie

Film de Nine Antico

Patrick Braganti a mis 5/10.

Annotation :

Une petite comédie dans l'air du temps, sympathique et superficielle, qui sonne aussi anachronique après le passage de la pandémie, qui remet en question les façons de se rencontrer. L'ensemble est extrêmement balisé avec tous les clichés de l'existence de jeunes adultes en galère amoureuse et professionnelle.
Ancré dans la culture de la bande dessinée (dont la réalisatrice est issue) et de la musique indépendante, Playlist se présente avant tout comme un camaïeu de saynètes plus ou moins drôles et réussies où un scénario plus fourni et moins prévisible aurait pu servir de liant.
Agréable à l'œil, le film se déguste comme une friandise dont la saveur se dissipe dès l'ingestion.

Vaurien
5.8

Vaurien (2020)

1 h 36 min. Sortie : 9 juin 2021. Drame, Thriller

Film de Peter Dourountzis

Patrick Braganti a mis 5/10.

Annotation :

Le caractère distinctif du drame est de mettre en scène un homme aux agissements demeurant inexpliqués ou à peine illustrés par des bribes du passé et des séquences où le hors-champ a la part belle. C'est ce qui rend Vaurien malsain et glacial par endroits dans ses dérapages violents qui entretiennent un climat poisseux de peur et de tension.
Cependant le réalisateur ne croit pas assez à son sujet, le saupoudrant d'un univers de marginaux en tous genres qui frisent souvent la caricature.
Pierre Deladonchamps poursuit sa carrière en paraissant de plus en plus se spécialiser dans les rôles troubles et équivoques, en tout cas pas vraiment lisses et plutôt audacieux. Ça lui réussit bien et il est sans conteste la clef de voûte d'un ensemble en demi-teintes.

Nomadland
6.8

Nomadland (2020)

1 h 47 min. Sortie : 9 juin 2021 (France). Drame

Film de Chloé Zhao

Patrick Braganti a mis 7/10.

Annotation :

Le premier film de la jeune réalisatrice sino-américaine exaltait la fraternité. Le deuxième magnifiait la douleur. Mais une chose est certaine : les deux vous prenaient aux tripes et imprégnaient la rétine.
Malgré ses prix à Venise et aux Oscars et l'excellent accueil critique et public, on regrette amèrement de ne pas être dans les mêmes dispositions vis-à-vis d'un film certes plein de qualités, qu'on qualifierait pourtant de mièvre et de déceptif.
Mièvre oui, en dépit d'un sujet pourtant difficile : la nomadisation croissante des laissés-pour-compte de l'Amérique, victimes des crises successives et de la désindustrialisation massive du pays car la cinéaste ne parvient pas à réellement montrer l'âpreté de cette existence presque perçue comme une réédition (à rebours, soit du tout au rien) de la mythologie des pionniers d'antan, à présent tournés vers le partage, la solidarité et les préoccupations écologiques. Avec ces belles images - sans parler même de sa musique dégoulinante - le film prend des airs de clip promotionnel pour les Etats-Unis : ses grands espaces, sa nature foisonnante. Pis encore, il y a là quelque chose de l'exaltation des valeurs du pays : liberté de bouger, de tout plaquer et d'entreprendre.
Et donc trompeur - et c'est là où le film devient gênant - car la nouvelle vie de Fern qui a tout perdu paraît de plus en plus relever d'un choix de vie, d'un goût éperdu pour la liberté, l'absence d'attaches et la consolation d'amitiés fortes et éphémères. Autrement dit ce qui est dépeint est tellement ripoliné, voire angélique, qu'il den devient comme idéal ou édénique. Manière de garder la face, d'enfouir son chagrin pour la courageuse et rugueuse Fern (impeccable Frances McDormand) ?
Peut-être tout simplement des sujets plus consensuels ne conviennent-ils pas autant à Chloé Zhao qui avait placé la barre très haut.
Néanmoins il y a des instants de grâce dans Nomadland comme cet échange de briquet et de sandwich entre Fern et un jeune nomade. Soudain on renoue avec tout ce qui nous avait tant fait vibrer dans The Rider. Et c'est simplement magique.

143, rue du désert
6.9

143, rue du désert (2019)

1 h 40 min. Sortie : 16 juin 2021 (France). Société

Documentaire de Hassen Ferhani

Patrick Braganti a mis 7/10.

Annotation :

La magie du septième art peut se traduire par la capacité de faire pénétrer dans un endroit exigu (une sorte de relais routier) au milieu du désert algérien poussiéreux l'ensemble du monde. Ou comment une fenêtre dans un blockhaus symbolise l'ouverture et le regard sur l'extérieur et l'autre.
Malika la tenancière fatiguée et affaiblie regarde avec amusement, humanité et fatalité ceux (quelquefois celle) qui s'arrêtent chez elle avant de poursuivre un périple vers le sud ou le nord, selon qu'on est touriste ou migrant.
Le dispositif est si minimaliste qu'il n'aurait sans doute pas supporté une durée plus longue. Entre documentaire et fiction, puisqu'on ne sait jamais quelle est la réelle part du vrai et de l'inventé, cette escale improbable devient une parabole sans lourdeur ni message à la clef sur la marche du monde et des interrogations de ceux qui l'habitent.

Les 2 Alfred
6.2

Les 2 Alfred (2020)

1 h 32 min. Sortie : 16 juin 2021. Comédie

Film de Bruno Podalydès

Patrick Braganti a mis 7/10.

Annotation :

Les deux frères Podalydès officiant comme réalisateur, acteurs et scénaristes traitent avec subtilité, inventivité et tendresse des dérives du monde du travail (illustré ici par une start-up où il est totalement rédhibitoire d'avoir un enfant pour pouvoir prétendre y travailler).
Désireux de regagner la confiance de sa femme, Alexandre est donc prêt à cette compromission absurde de nier son statut de père afin de décrocher la timbale de ce poste fumeux.
Le réalisateur qui confirme son goût pour les univers décalés se moque avec sagacité de l'asservissement technologique brocardant sans forcer le trait le grotesque ridicule de ces nouveaux travailleurs biberonnés à une sémantique d'entreprise incompréhensible.
Les 2 Alfred établit ainsi une passerelle improbable entre Tati (pour l' inadaptabilité au modernisme avec en prime une dimension tournée vers l'enfance) et Houellebecq (pour le regard acéré mais nettement moins cynique et désespéré porté sur la société contemporaine).
L'ensemble demeure plaisant sans jamais être bête ou trop simpliste, soutenu par un casting aux petits oignons.

Sound of Metal
7.4

Sound of Metal (2019)

2 h. Sortie : 16 juin 2021 (France). Drame, Musique

Film de Darius Marder

Patrick Braganti a mis 4/10.

Annotation :

Un musicien perd soudain et de manière irréversible l'audition. Un traumatisme pour Ruben qui marque le début d'une nouvelle existence passant par le renoncement et la résignation. Comment accepter ce handicap qui le prive d'une faculté inhérente à son métier et sa passion ? Vaste interrogation à laquelle le film long et incohérent ne parvient jamais vraiment à répondre en mettant de côté le statut du musicien et ce que peut représenter pour lui cette funeste privation.
Le stage dans un centre où il est d'abord question de vivre avec la surdité - et non pas tenter d'y remédier - étire la narration dans des séquences anodines, lesquelles déstabilisent l'ensemble du film dont le principal intérêt finit par être l'interprétation habitée et incandescente de Riz Ahmed.

Médecin de nuit
6.6

Médecin de nuit (2020)

1 h 22 min. Sortie : 16 juin 2021. Drame, Thriller

Film de Elie Wajeman

Patrick Braganti a mis 8/10.

Annotation :

Construit sur un dispositif en temps réel (une nuit parisienne froide aux alentours des fêtes), le film oscille entre thriller noir et poisseux et chronique sociale d'une dépression et d'un mal-être généralisés.
Le docteur Mikaël (Vincent Macaigne qui éclate enfin dans un rôle loin des amoureux intello transis) est pris dans un engrenage qui le broie en mettant en péril sa vie familiale et professionnelle. Le destin est en route et malgré son courage téméraire et son humanité de thérapeute, il n'est pas certain que Mikaël puisse faire front.
L'atmosphère nocturne s'accompagne d'un malaise constant et croissant qui envahit aussi bien les patients angoissés que l'environnement glauque, peuplé de toxicomanes en quête d'ordonnances salvatrices et de truands sans foi ni loi.
Aux côtés d'un Macaigne douloureux et résolu, Pio Marmaï campe un cousin acculé et manipulateur tandis que Sara Giraudeau joue les femmes fatales, fragiles et désemparées.
L'ensemble est resserré, le rythme soutenu traduisant l'urgence et la précarité. Il réussit à tenir le spectateur en haleine de bout en bout et se révèle un sacré coup de poing à l'estomac.

La Nuée
6.5

La Nuée (2020)

1 h 41 min. Sortie : 16 juin 2021. Drame, Fantastique, Épouvante-Horreur

Film de Just Philippot

Patrick Braganti a mis 6/10.

Annotation :

Plus qu'un film fantastique ou d'horreur à proprement parler, on pense ici davantage à une descente aux enfers, un engrenage implacable qui prennent racine dans le concret de l'existence d'une femme et de ses deux enfants obligée de faire marcher son exploitation agricole, un élevage de sauterelles.
Le schéma du créateur manipulateur dépassé par ses créatures devenues impossibles à maîtriser est certes classique. L'originalité réside cependant dans le fait que l'angoisse est d'abord diffusée par la mère obsessionnelle. Les insectes en deviennent anecdotiques et ne suscitent guère d'effroi.
On est donc en face d'une horreur sociale et économique qui, du coup, sonne bien plus réelle et convaincante

5ème Set
6.4

5ème Set (2020)

1 h 53 min. Sortie : 16 juin 2021. Drame, Sport

Film de Quentin Reynaud

Patrick Braganti a mis 6/10.

Annotation :

Il faut reconnaître à Alex Lutz cette capacité à incarner, à composer des personnages à la fois antipathiques (ou en tout cas ne suscitant pas d'emblée un énorme capital de sympathie) et paradoxalement attachants (ou se révélant complexes dans leurs failles et leurs blessures). Ce fut le cas hier pour Guy, ça l'est de nouveau aujourd'hui avec Thomas, joueur de tennis bientôt quadragénaire, ancien grand espoir devenu une sorte de looser ringard à la limite du pathétique, tentant de retrouver un peu de gloire en jouant les qualifications d'un célèbre tournoi parisien.
Nul besoin d'être passionné de tennis pour apprécier la tentative presque désespérée d'un joueur tenaillé entre sa vie de famille et une mère qui tient plus du coach froid. On a rarement perçu aussi bien la violence de ce sport et son lot de séquelles physiques. Comme on saisit la versatilité et l'amnésie du public, l'appétit revanchard des journalistes et entraîneurs.
On est surpris de n'éprouver aucune empathie particulière pour un homme d'abord préoccupé de lui-même. Pourtant la précision énergétique de la mise en scène conduisant à un suspense prenant nous happe et nous tient en haleine, notamment au cours d'une séquence finale particulièrement palpitante.

Wendy
6.5

Wendy (2020)

1 h 51 min. Sortie : 23 juin 2021 (France). Drame, Fantastique

Film de Benh Zeitlin

Patrick Braganti a mis 4/10.

Annotation :

Peut-être faut-il avoir gardé son âme d'enfant pour pouvoir apprécier Wendy ? Sans quoi on peut tout à fait rester à l'extérieur d'un long-métrage dont le préambule avant l'évasion de Wendy et de ses frères jumeaux mettait pourtant en appétit. Situé dans une sorte de gargote en bordure d'une voie ferrée, vecteur idéal de rêves de s'échapper d'un avenir déjà tracé, il y avait là une étrangeté, une promesse que la suite ne tiendra pas.
Vouloir revisiter le mythe de Peter Pan, d'une confrontation fantastique entre générations qui questionne le vieillissement devait-il forcément s'accompagner de cette bouillie naturaliste où semble flotter en permanence l'influence de Terrence Malick : voix off pleine de questions existentielles, sublimation panthéiste des paysages de cette île mystérieuse et volcanique ?
La magie n'opère pas, ou alors en de très rares instants, supplantée par une lassitude durable où pointe même l'agacement devant une prétention formelle qui tombe complètement à plat.

Ibrahim
6

Ibrahim (2020)

1 h 19 min. Sortie : 23 juin 2021. Drame

Film de Samir Guesmi

Patrick Braganti a mis 4/10.

Annotation :

On aurait aimé partager l'enthousiasme critique au sujet du premier film du comédien sympathique et talentueux Samir Guesmi. Hélas cette histoire d'une relation compliquée entre un père et son fils adolescent semble cocher toutes les cases d'un parcours programmatique vers la réconciliation et l'apaisement.
Au-delà de ce défaut qui aurait pu être minimisé par le souffle de la mise en scène, l'incandescence d'un adolescent écartelé (qui ne surgira qu'en de courts instants) l'impression de vouloir faire dans la sobriété et donc d'appuyer sans cesse sur la pédale de frein surnage en permanence et crée un profond ennui.

Gagarine
6.9

Gagarine (2020)

1 h 38 min. Sortie : 23 juin 2021. Drame

Film de Fanny Liatard et Jérémy Trouilh

Patrick Braganti a mis 5/10.

Annotation :

Projet audacieux de mêler le réel (la destruction de l'ensemble immobilier Gagarine à Ivry-sur-Seine) à la fiction onirique (le projet de Youri de devenir cosmonaute et également de préserver l'endroit où il grandi).
Certes on a là une vision originale, sans misérabilisme ni stigmatisation, d'une banlieue multiculturelle. Et aussi le regard plein d'inventivité et d'imagination d'un duo de réalisateurs dont c'est le premier long-métrage. Cependant la magie n'opère pas vraiment, les relations entre les protagonistes paraissent artificielles et le parallèle établi entre la conquête spatiale et la transformation d'un appartement en capsule comme un îlot de protection ne fonctionne pas plus.
Le tout est enrobé d'une naïveté qui lui donne un aspect lénifiant et sans aspérités. Une sorte de conte auquel il manque de la grâce et de l'incarnation.

Minari
6.9

Minari (2020)

1 h 55 min. Sortie : 23 juin 2021 (France). Drame

Film de Lee Isaac Chung

Patrick Braganti a mis 7/10.

Annotation :

Un récit subtil et sans lourdeurs de l'installation d'une famille sud-coréenne dans l'Arkansas. Pour fuir une existence difficile en Corée, le choix de devenir fermier sera-t-il le bon pour Jacob et les siens ? La famille vit presque en autarcie, à part quelques collègues eux aussi venus de Corée et un voisin fermier fervent croyant.
On est à la fois dans l'Amérique magnifiée par Steinbeck ou Malick, et dans la Provence de Pagnol où Ugolin cherchait obstinément une source. L'entêté Jacob mène un combat pour la vie, l'intégration et la réussite. A quel prix devra-t-il le payer ?

Indes galantes
7.2

Indes galantes (2020)

1 h 48 min. Sortie : 23 juin 2021. Musique, Art

Documentaire de Philippe Béziat

Patrick Braganti a mis 8/10.

Annotation :

Il est toujours passionnant d'assister à la genèse d'un projet artistique, d'en suivre les différentes étapes et d'attendre le résultat de la confrontation de deux univers : la musique et le chant baroques d'un côté, la danse hip-hop et ses différents mouvements de l'autre.
Cette union détonante mise en scène par le talentueux et audacieux Clément Cogitore repose sur une entreprise de dépoussiérage ou de relecture des Indes Galantes de Jean-Philippe Rameau. Un pari risqué qui ne fit pas l'unanimité des critiques (le combat éternel entre tradition et modernité) alors qu'elle entraina l'adhésion générale d'un public aussi hétéroclite que l'assemblage entre chanteurs lyriques et danseurs, les uns et les autres pareillement charmés et fascinés par les prouesses de l'autre discipline.
L'écho de la pièce de Rameau avec les thématiques contemporaines des migrants, de la prédominance d'une partie du monde sur l'autre (et à travers elle une hiérarchisation des disciplines artistiques entre noblesse et trivialité) prouve largement combien la démarche (dont on brûle de voir l'achèvement au-delà des extraits forcément frustrants des répétitions et de la première) est amplement justifiée.
Au-delà même du message politique, il faut avant tout trouver son plaisir à côtoyer deux arts transcendés par la scène, la frénésie des heures de répétition, le charisme d'un chef d'orchestre espiègle et exigeant, l'écoute et la clairvoyance d'un metteur en scène, la joie communicative d'une chorégraphe heureuse.
Car ce qui diffuse d'abord ce formidable documentaire, c'est du bien, du bonheur devant une nouvelle - et toujours nécessaire - preuve que l'art suffit aussi à embellir et à rendre moins pénibles nos existences. Pour cela Indes galantes vaut toutes les cures de vitamines. A consommer sans aucune modération.

Février
6.6

Février (2021)

2 h 05 min. Sortie : 30 juin 2021 (France). Drame

Film de Kamen Kalev

Patrick Braganti a mis 7/10.

Annotation :

Film radical aussi bien dans la forme - se présentant comme une succession de tableaux qui évoquent l'Angélus de Millet - que dans le fond comme une interrogation métaphysique et allégorique sur le sens de la vie. C'est celle de Petar ponctuée en trois étapes : l'enfance, l'entrée dans l'âge adulte avec le service militaire et la vieillesse. Petar berger aux confins de la Bulgarie rurale mène une existence difficile, dénuée de tout confort, en osmose avec la nature et les animaux (les brebis de son élevage comme les goélands de l'île où il affecté en tant que marin).
Parfois gonflé d'emphase par la voix off du réalisateur lui-même, Février vaut d'abord par ses partis pris formels qui installent dans la longueur des scènes propices à la contemplation et à l'introspection. Un voyage âpre qui mérite largement l'effort de l'entreprendre.

Teddy
6.5

Teddy (2020)

1 h 28 min. Sortie : 30 juin 2021. Comédie dramatique, Fantastique, Épouvante-Horreur

Film de Ludovic Boukherma et Zoran Boukherma

Patrick Braganti a mis 5/10.

Annotation :

Il est vrai que la scène inaugurale (avec ses accents, ses gueules pas possibles et l'envie manifeste de ridiculiser les institutions notamment policières) renvoie directement au P'tit Quinquin de Bruno Dumont. Mais le reste du film, sauf en quelques endroits (le loto par exemple), ne tiendra pas cette note.
D'ailleurs quelle note tient-il au demeurant ? Celle de la dérision, du grand-guignol certainement. Dans cette comédie bancale et largement inexploitée, donnant l'impression que Teddy ne décolle jamais vraiment, on peut voir aussi une métaphore de la défense du loup (solitaire) et à travers lui de tous ceux montrés du doigt ou mis au ban de la société pour des motifs de différence, d'inadaptation au monde et d'exercice d'une liberté franche et dérangeante.
Pour entrevoir cet éventuel message, il faudra passer outre la loufoquerie généralisée et potache, parfois inspirée, souvent artificielle mais une fois encore le jeune Anthony Bajon y déploie son talent singulier et grandissant.

Sous le ciel d'Alice
6.4

Sous le ciel d'Alice (2020)

1 h 30 min. Sortie : 30 juin 2021. Comédie dramatique, Romance, Animation

Film de Chloé Mazlo

Patrick Braganti a mis 3/10.

Annotation :

Comment évoquer la situation du Liban depuis les années 50 avec sa litanie de conflits et de désillusions en recourant à la magie du cinéma, c'est le pari tenu par Chloé Mazlo. Pari certes audacieux mais hélas très partiellement tenu tant le choix d'une forme poétique et naïve déroute d'abord, puis interpelle ensuite dans la distance qu'elle installe avec cette vision acidulée et même bêtifiante d'une réalité que les gentils chromos et la palette pastellisée semblent presque nier.
Ça en devient même gênant et à la limite du ridicule dans ce jeu des acteurs et cet artifice des décors qui rappellent au mieux le cinéma d'un Eugène Green. Mais le contexte est ici autrement plus douloureux et grave pour souffrir durablement une ambition poétique et incongrue qui tombe constamment à côté de la plaque.

Sœurs
5.2

Sœurs (2020)

1 h 35 min. Sortie : 30 juin 2021. Drame

Film de Yamina Benguigui

Patrick Braganti a mis 3/10.

Annotation :

Mais en face de quoi sommes-nous exactement ? Une anti promotion de la chirurgie esthétique ? Un délire narcissique et nombriliste d'une réalisatrice accompagnée de son aréopage de comédiennes toutes aussi horripilantes et mauvaises les unes que les autres sans que jamais on puisse sauver quelque chose de ce fatras inepte qui agglomère de manière éhontée, voire obscène, l'histoire familiale, celle de l'Algérie, une réflexion creuse sur la liberté du créateur à s'emparer du réel. A partir d'un matériau plutôt solide, le film réussit l'exploit de n'en tirer aucun profit, se vautrant dans l'accumulation des clichés et laissant surtout la part belle au cabotinage de ses actrices. Une catastrophe absolue.

Annette
6.8

Annette (2021)

2 h 20 min. Sortie : 6 juillet 2021. Drame, Comédie musicale, Romance

Film de Leos Carax

Patrick Braganti a mis 6/10.

Annotation :

On connait l'amour de Leos Carax pour le cinéma. On connait aussi ses ambitions formelles et sa mégalomanie aussi qui le conduisent parfois à emprunter des voies expérimentales qui déroutent aussi bien qu'elles séduisent ou irritent. Et il n'est pas rare non plus de passer par toutes ces étapes tout au long d'un même film.
Le nouvel opus Annette n'échappe pas à la règle et disons d'emblée qu'il a suscité chez moi plus d'exaspération confinant par endroits à l'ennui qu'une admiration proche de la fascination. On frise trop souvent le ridicule pour pouvoir ressentir une véritable émotion face à une histoire d'amour tragique.
Elle réunit d'un côté Henry comique caustique et artiste provocateur qui tient tout autant de Gainsbourg ou Daft Punk avant de révéler son côté noir façon Harvey Veinstein (mais Driver signifie définitivement chauffeur et non pas chanteur) et de l'autre une soprano éthérée (Cotillard quelconque sans charme, mais n'ayant pas non plus grand-chose à interpréter).
Le passage aux États-Unis semble avoir précipité le cinéaste vers une certaine vulgarité ainsi qu'une ostentation formelle qui frise le clinquant pour ne pas dire le toc. La réflexion sur l'égotisme des artistes et la versatilité d'un public (débile, forcément débile ?) prompt à haïr ce qu'il avait porté aux nues tourne court.
Dans cette longue dérive existentielle qui ne possède jamais la poésie onirique ou la magie effleurant la grâce des films précédents, on extirpera sans états d'âme de belles séquences. Si Adam Driver n'est donc pas un chanteur, il est sans conteste un comédien charismatique et presque méphistophélique. Et on retiendra in fine que les enfants sont toujours les 'choses' de leurs parents...

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